REVUE DE PRESSE

Août-Septembre 2003

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François Chérèque (CFDT) "Grand jury RTL-Le Monde-LCI"

Le Monde du 30 septembre 2003

 

Selon le premier ministre, le budget 2004 est focalisé sur l'emploi. êtes-vous convaincu ?

 

Le chômage augmente depuis deux ans et demi et le gouvernement refuse de regarder la situation. Il aide les entreprises au niveau des marges mais abandonne une démarche de soutien de l'activité au niveau européen ou au niveau national, laissant tout au marché et attendant tout de la reprise économique qui n'arrive pas. C'est une mauvaise politique.

 

Vous déplorez la dette de l'assurance-maladie, mais vous critiquez les mesures annoncées pour la stabiliser, comme la hausse du forfait hospitalier. N'est-ce pas contradictoire ?

 

Non. Au lieu de prendre des mesures de financement de la protection sociale, le gouvernement se décharge sur les mutuelles, qui vont augmenter leurs tarifs. Ce n'est pas responsable de la part d'un gouvernement de transférer la décision aux autres. Mais, pire que cela, il sanctionne les plus pauvres. Car 18 % des personnes de plus de 80 ans, 18 % des jeunes de moins de 25 ans et 16 % des ouvriers n'ont pas de mutuelle. Si une personne âgée sans mutuelle est hospitalisée un mois, le forfait hospitalier va lui coûter les deux tiers de son revenu. Cette mesure est socialement dangereuse pour une partie de la population.

 

Vous êtes donc favorable au relèvement de la CSG ?

 

Oui. L'augmentation de la CSG ne suffira pas à résoudre le problème. Il faut une réforme globale, qui clarifie les rôles respectifs de l'Etat, dont la responsabilité doit être de définir une politique de santé, et des partenaires sociaux qui devraient pouvoir gérer en responsabilité totale. Mais en attendant cette réforme, il faut bien prendre des décisions pour combler la dette.

 

Si cette réforme ne s'engage pas, la CFDT quittera-t-elle la direction de la CNAM ?

 

Si on ne nous dit pas réellement quelle est la place des partenaires sociaux, on envisagera éventuellement de quitter notre responsabilité à la direction de la CNAM.

 

L'approbation de la réforme des retraites a provoqué de sérieux remous au sein de la CFDT. On parle de 15 000 départs d'adhérents, notamment dans la fédération des transports. C'est un échec ?

 

Le chiffre que vous citez est largement exagéré. Ce sont à peu près 6 000 à 8 000 adhérents qui pourraient nous quitter sur les 900 000 que compte actuellement la CFDT et qui sont d'accord sur la démarche réformiste et contractuelle que prône la CFDT depuis vingt-cinq ans. Ces départs, dans une fédération qui est en désaccord avec cette orientation, c'est donc une clarification politique.

 

La réforme des retraites n'a-t-elle pas isolé la CFDT ?

 

C'est ce que beaucoup disaient avant l'été. On est aujourd'hui dans une situation inversée. Qui aurait pu imaginer il y a trois mois que quatre syndicats allaient décider de signer un accord sur la formation continue et que la CGT se retrouverait obligée de signer cet accord pour ne pas s'isoler. Je dis à la CGT bienvenue au club de ceux qui négocient. Dans notre pays, il faut qu'on sorte d'un système où le sport national consiste à critiquer ceux qui amènent un plus aux salariés. Si tous les syndicats français s'engagent dans des réformes et dans une démarche contractuelle, ça fera avancer le syndicalisme.

 

Propos recueillis par Gérard Courtois, Ruth Elkrief et Pierre-Luc Séguillon

 

 

 

 

 

 

Spécialistes : les nouveaux tarifs sont désormais applicables

Quotidien du médecin du 29/09/2003

 

L'arrêté modifiant le règlement conventionnel minimal de 1998 et majorant de 2 euros les consultations de la plupart des spécialistes, et de 2,70 euros celle des psychiatres, neuropsychiatres et neurologues, est paru au " Journal officiel " du 25 septembre. Ces augmentations ne sont pas compatibles avec le DE. Cependant, les praticiens du secteur II, pourront les appliquer lorsqu'ils soigneront des bénéficiaires de la CMU.

 

 

" Il est enfin arrivé. " Dans l'entourage du président de la CSMF, on ne cachait pas sa satisfaction, quelques heures avant l'ouverture de l'université d'été de ce syndicat, organisé comme chaque année à Ramatuelle dans le Var (voir ci-dessous).

 

En effet, il était important pour le président de la Confédération, Michel Chassang, de se présenter devant ses troupes, avec la satisfaction du devoir accompli. C'est-à-dire avec un règlement conventionnel minimal signé, donc applicable immédiatement par les médecins, et des revalorisations tarifaires de 2 euros pour la plupart des spécialités et de 2,70 euros pour les psychiatres, les neuropsychiatres et les neurologues.

Ce texte, publié au " Journal officiel " du 29 septembre, n'apporte pas de modifications bouleversantes au projet initial. Mais il précise que, lorsqu'ils soigneront des bénéficiaires de la CMU, les médecins du secteur II pourront également appliquer ces majorations. On sait, en effet, que, selon l'article L. 162-5-13 du code de la Sécurité sociale, les médecins à honoraires libres doivent appliquer les honoraires du tarif opposable, lorsqu'ils reçoivent en consultation un CMU. La CSMF a donc tout fait pour que, dans ces cas-là, les médecins du secteur II bénéficient de la majoration prévue pour ceux du secteur I. " Il aurait été discriminatoire qu'il en soit autrement ", affirme le Dr Michel Chassang, qui se réjouit de cette modification importante. D'autant que dans certaines villes ou régions, les médecins du secteur II sont très souvent amenés à soigner des CMU.

En revanche, la CSMF n'a pas pu faire revenir les pouvoirs publics sur leur refus de cumuler cette augmentation des consultations avec l'application du DE et le forfait pédiatrique de 5 euros, qui concerne les consultations des enfants de moins de deux ans. Mais là, en effet, la tâche semblait plus ardue. Surtout après l'annonce d'un projet de loi de financement de la Sécurité sociale qui appelle chacun à la responsabilité et aux économies.

Autre modification plus attendue celle-là : le projet de RCM, qui a été écrit, on le sait, à partir de l'accord conclu entre la CSMF et les caisses en août dernier, confirme que la majoration des tarifs des consultations concernera également les cardiologues et les néphrologues, alors que, dans un premier temps, ils semblaient avoir été oubliés. En fait, toutes les spécialités sont concernées, mis à part trois d'entre elles : la radiologie, l'obstétrique et la chirurgie. On connaît d'ailleurs le courroux des chirurgiens notamment, malgré le nombre important de ceux qui exercent en secteur II et qui, de fait, ne sont pas vraiment concernés par ce RCM. Il n'est pas certain que la promesse de l'élaboration d'un contrat de pratique professionnelle les concernant en particulier soit suffisant pour les calmer.

L'ensemble des augmentations tarifaires devraient coûter 66 millions à l'assurance-maladie en année pleine, selon la CNAM. Cependant, ces majorations pourront seulement être appliquées jusqu'à la fin de 2004.

En contrepartie des nouveaux tarifs, des accords de bon usage de soins pour les cardiologues, les néphrologues et les ORL seront négociés entre les syndicats représentatifs des spécialistes et les caisses. Il semble que cette méthode ait surpris les syndicats dans la mesure où elle n'était pas prévue au programme.

" Il n'y a pour l'instant, précise le Dr Michel Chassang, qu'un seul accord de bon usage de soins ; il est annexé au RCM et il s'applique à l'antibiothérapie, comme pour les généralistes. " Il concerne donc les prescriptions d'antibiotiques et l'utilisation du test angine par les spécialistes concernés, afin d'arriver à un résultat aussi spectaculaire que pour les généralistes. On sait, en effet, que, selon les derniers chiffres de la CNAM, les prescriptions d'antibiotiques ont chuté de 10 % en quelques mois. Les pouvoirs publics souhaitent obtenir des résultats encore plus probants si les spécialistes se mobilisent également.

 

Beaucoup reste à faire

 

Le RCM ne prévoit qu'un seul contrat de pratique professionnelle et il concerne les médecins thermalistes.

" Tout n'est pas terminé pour autant, explique Michel Chassang. Des discussions vont se dérouler sur un contrat de santé publique qui concernera les anapaths sur le cancer ; des accords de bons usages de soins vont s'appliquer aux praticiens de la naissance, c'est-à-dire les obstétriciens et les échographistes ; des contrats de pratique professionnelle vont être discutés pour les chirurgiens et les anesthésistes, et figureront ensuite en annexe à ce RCM. "

Alors, satisfait, le président de la CSMF ? Michel Chassang reste modeste . " Beaucoup de choses restent à accomplir. Je redis que ce RCM n'est pas satisfaisant. Il est inéquitable et insuffisant, mais on ne peut pas tout faire après un blocage de huit ans des honoraires.

Il nous faut maintenant ouvrir deux chantiers essentiels : celui de la nomenclature avec la nouvelle classification commune des actes médicaux (CCAM) et celui de la réforme de l'assurance-maladie. Il faut s'y atteler. Le gouvernement doit s'y atteler. En attendant, il faut continuer à lutter pour avoir plus. " Et le président de la CSMF de réaffirmer sa volonté d'aboutir à une réforme qui mette en place un espace de liberté tarifaire. " Nous n'y avons pas renoncé, bien au contraire, dit-il. Je ne suis pas désespéré d'y parvenir. Mais nous n'y arriverons qu'en restant fortement mobilisés. " Un appel du pied aux autres organisations syndicales ? Michel Chassang ne le dit pas. Mais, affirme-t-il, " il faut que cessent aujourd'hui les polémiques ".

 

Jacques DEGAIN

 

Et la RCP ?

 

Aucune allusion à la RCP dans ce RCM. Ce qui peut inquiéter, voire exaspérer, un certain nombre de spécialistes qui attendent que des mesures soient prises rapidement. Mais elle fera l'objet d'une négociation particulière, explique le Dr Michel Chassang. Et tout sera terminé à la fin du mois d'octobre. La possibilité d'une prise en charge de primes dans le cadre du Fonds de réorientation et de modernisation de la médecine libérale (FORMMEL), mis en place par le plan Juppé, et composé de syndicats médicaux et des caisses, a été évoqué. Le FORMMEL est présidé par Jean-Marie Spaeth.

 

 

Patrick Pelloux, l'urgentiste qui a crevé l'écran

Quotidien du médecin du 29/09/2003

 

Décidément omniprésent depuis l'affaire de la canicule, le Dr Patrick Pelloux était le week-end dernier à la fois sur les chaînes de télévision et à Ronce-les-Bains (Charente-Maritime) pour un séminaire stratégique de son syndicat, l'Association des médecins urgentistes hospitaliers de France (AMUHF). Portrait d'un " sonneur d'alarme " et homme public controversé, devenu star en l'espace d'un été meurtrier.

 

 

" Vous êtes Monsieur Pelloux ? " C'est avec un sourire crispé que le président de l'AMUHF se fait interpeller par une passante dans son refuge, le petit café La Liberté, près de l'hôpital Saint-Antoine à Paris, où il reçoit désormais de plus en plus de journalistes tout en écoutant le dernier disque de son groupe préféré, les Têtes raides, intitulé " Qu'est-ce qu'on s'fait chier ".

 

La dame lui reproche la mise en cause du gouvernement dans l'affaire de la canicule meurtrière. Porté aux nues par les médias depuis qu'il a été l'un des tout premiers à tirer la sonnette d'alarme devant la multiplication des décès liés à la chaleur, le Dr Patrick Pelloux est devenu aussi une cible et même une marchandise.

Dans son costume noir, chic, recouvert d'un pantalon coupe-vent de moto, des lunettes de soleil remontées sur la tête, le héros de l'été affirme qu'il " a refusé Ardisson et Ruquier ", préférant aux émissions de divertissement celles qui " aident à la compréhension du système ". Celui qu'on surnomme " 3P " (" Président Patrick Pelloux ") chez les médecins urgentistes des SAMU de France, se demande toutefois s'il ne va pas finir par céder à l'un des multiples éditeurs qui l'ont déjà sollicité pour relater dans un livre sa version de l'hécatombe. Du reste, il nous supplie d'illustrer son portrait, non pas par sa propre photo, mais par " les images apocalyptiques de morts entassés sous des tentes ".

 

Une thèse sur le verglas

 

En attendant, on a revu son visage encore et encore dimanche soir à la télévision, puisque, en deuxième partie de soirée, il est passé simultanément à l'émission " France Europe Express " en compagnie du ministre Jean-François Mattei sur France 3, et dans le nouveau magazine " Les Coulisses du pouvoir " animé par Daniela Lumbroso sur France 2.

Ironie du sort, c'est la canicule qui l'a fait connaître du grand public alors qu'il avait jadis consacré sa thèse de médecine aux accidents causés par... le verglas. " Ça m'avait plu de voir comment le climat pouvait soudain entraîner un chaos total dans une société où tout est prévu ", explique le Dr Pelloux.

Mais, si la climatologie l'intéresse depuis longtemps, c'est avec les médias qu'il est dans son élément. " Charmeur " et doté d'un " certain narcissisme ", le remuant urgentiste de l'hôpital Saint-Antoine " aime bien les médias et sait bien les utiliser ", reconnaît " un ami ". En 1985-1986, en parallèle à ses études à la faculté de médecine, Patrick Pelloux a lui-même tâté du journalisme dans une radio libre. Son expérience d'animateur de bals, au piano et à l'accordéon, lui aurait également servi : " Quand vous savez parler à une bande d'ivrognes à deux heures du mat', vous savez parler à tous les médias ! " Ce don, le Dr Pelloux l'a largement utilisé au profit de l'AMUHF, le syndicat médical qu'il a fondé en 1997 pour améliorer le statut précaire des médecins urgentistes. Il se justifie en soulignant que la presse constitue " la seule arme " des urgentistes contraints de faire grève " à la japonaise ", avec un brassard, sans cesser le travail (compte tenu des réquisitions), car " on ne peut pas renverser des camions de SMUR, faire la grève totale et tuer des malades ".

Stratège, Patrick Pelloux n'a quand même pas su tout prévoir au cours de sa vie. Bien qu'il ait décidé de faire médecine en 1979, à 16 ans, lorsqu'il a vu le Dr Bernard Kouchner organiser une action humanitaire pour secourir les premiers boat people, il n'a finalement intégré ni Médecins sans Frontières " ni Médecins du Monde, à son grand regret : " La vie m'a rattrapé avec la naissance de ma fille et des problèmes d'argent. "

 

Ennemis multiples

 

Quelques années plus tard, le président-fondateur de l'AMUHF " a sacrifié sa vie personnelle au syndicat ", raconte l'un de ses proches, le Dr Frédéric Pain. Pour le secrétaire général de l'AMUHF, c'est là " son principal défaut ". Il en a d'autres. " Le problème de Patrick, c'est qu'il a un ego surdimensionné et tire la couverture à lui dans tous les endroits, confie un urgentiste de l'AMUHF. Il ne peut pas s'empêcher de parler comme dans un meeting, même quand on est deux. Au bout de deux-trois ans, il a pris la citrouille, mais il n'y a pas de bon leader qui ne soit pas comme ça ". Le Dr Pain, lui, ne pense pas que son président ait " la grosse tête ". Au contraire, il le trouve aujourd'hui " plus circonspect et plus prudent " qu'avant. Au rayon " qualités ", ses copains louent sa " générosité " et sa " fidélité à ses idées ".

Reste que le personnage est " quelqu'un d'entier, du style blanc/noir : il n'y a pas de gris chez Patrick ", poursuit le secrétaire général de l'AMUHF. " Son manque de nuances est peut-être un défaut dans sa communication, mais cela nous a servi énormément car cela nous a permis d'être clairs, tempère Frédéric Pain. Il est tellement entier que c'est parfois difficile de vivre avec. Cela a d'ailleurs "clashé" avec beaucoup de personnes dans le syndicat, dans son hôpital et chez les hospitaliers en général. Il a énormément d'ennemis car, quand quelqu'un le dérange, il réagit de manière brutale et entière. "

" Il y a des jalousies, des rancœurs, tout le monde tape sur moi, mais c'est pas grave, c'est le revers de la médaille ! ", confirme l'intéressé. A l'hôpital Saint-Antoine, il lui est arrivé récemment de retrouver les pneus de sa moto crevés. Au sein de la nomenklatura hospitalière, le Dr Pelloux identifie " les PUPH " (1) comme ses plus farouches détracteurs.

Côté praticiens hospitaliers, l'histrion semble exaspérer aussi certains responsables syndicaux. Le Dr François Aubart, président de la Coordination médicale hospitalière (CMH, à laquelle adhère pourtant l'AMUHF depuis sa rupture avec l'INPH) préfère, lui, s'abstenir de tout commentaire sur le Dr Pelloux.

Le Pr Louis Lareng, ancien président-fondateur des SAMU de France et actuel directeur de l'Institut européen de télémédecine, salue les qualités de l'homme tout en critiquant son style. " C'est un garçon impétueux, dynamique, plein de bonne volonté, qui exprime bien tout haut ce que beaucoup pensent tout bas, constate le Pr Lareng. Il voudrait qu'aux urgences, qui ont toujours été considérées comme une Cendrillon, les choses avancent vite. Mais, comme il est bouillonnant, il explose. Il est plus efficace d'avancer ses pions lentement, mais sûrement ". Au sein de la communauté hospitalière, certains estiment que le président de l'AMUHF a trop " irrité " par ses nombreuses interventions estivales pour ne pas se heurter tôt ou tard à " des problèmes dans sa carrière à l'hôpital ".

 

" Un anarchiste conformiste "

 

En outre, au lendemain de la mise en cause du gouvernement dans l'affaire de la canicule, la rumeur publique tient maintenant rigueur à l'urgentiste de ses liens avec le Parti socialiste et le soupçonne de manipulation politique. Patrick Pelloux " n'est plus membre du PS ", rectifie le Dr Claude Pigement, délégué national du PS à la Santé, même s'il s'est rendu notamment aux universités d'été du Parti socialiste à La Rochelle en 1998 et à un meeting de soutien au candidat Bertrand Delanoë à Paris, lors des élections municipales de 2001. " Ne tournons pas autour du pot : la gauche est sa famille politique, mais il garde aussi un esprit critique ", ajoute le Dr Pigement. Patrick Pelloux se défend en tout cas de tout sectarisme politique : il compte deux adhérents UMP dans le conseil d'administration de l'AMUHF, " a participé à un débat social à la Fête de l'Huma " et a trouvé enfin " extrêmement séduisant " de discuter longuement avec les députés UDF François Bayrou et Hervé Morin. S'il était convié, il " irait à un meeting UMP, mais pas FN ".

Après le président Chirac, le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin lui a, à son tour, rendu publiquement hommage : ces attentions ne peuvent le laisser insensible dans la mesure où " il a un grand respect pour les élus ", précise le Dr Philippe Aillères, cofondateur de l'AMUHF et " divorcé " de Patrick Pelloux, selon ses propres termes. " La République me plaît complètement, j'aime les institutions et j'adore l'Europe, renchérit le président de l'AMUHF. Je suis un anarchiste conformiste, c'est pour ça qu'ils ne me comprennent pas ! ". Amené à fréquenter les plus hautes autorités de l'Etat, le Dr Pelloux n'en reste pas moins un peu novice. Philippe Aillères se plaît à raconter comment ce " gars attachant " est arrivé en retard à une réunion interministérielle, en août à Matignon, après s'être égaré dans l'avenue du même nom située dans un autre arrondissement de la capitale...

Maintenant qu'il a approché les ors de la République, à quoi rêve donc le Dr Pelloux ? Serait-il tenté par un mandat électoral, comme son frère Roger, à la fois conseiller municipal Vert à Combs-la-Ville (Seine-et-Marne) et kiné comme leur père ? Il dément et assure n'avoir reçu de toute façon " aucune proposition pour un siège d'élu du PS ni pour une présence au Conseil économique et social ". Pour le délégué national du Parti socialiste à la santé, Patrick Pelloux a un handicap : " Ce n'est pas un homme d'appareil, mais plutôt un électron libre, avec une grande liberté de parole ". " Sa plus grande ambition en ce moment, c'est faire avancer le débat syndical ", tranche le secrétaire général de l'AMUHF.

" Du fait de son charisme, il a déjà contribué à la reconnaissance des services d'urgences autant que la série "Urgences" à la télé. Avant, les urgentistes, c'était l'externe à la porte ", résume le Dr Bruno Mangola, ex-président fair-play du Syndicat des urgences hospitalières (SUH), qui a été fondé cinq ans avant l'AMUHF et a pris ombrage de l'essor " médiatique " de cette association.

Un ponte de l'assurance-maladie voit même en lui " le José Bové de la médecine d'urgence ". Si le Dr Pelloux n'a " jamais eu aucun contact " avec le leader de la Confédération paysanne, il se sent en revanche " complètement proche de l'idée selon laquelle la santé n'est pas une marchandise ". " Tant qu'on gardera une vision financière de la santé, on ne s'en sortira pas ", avertit le président de l'AMUHF. Sa plus grande crainte ? Assister dans l'avenir à " l'exploitation des médecins des pays du tiers-monde " en France si " on n'arrive pas, avec 200 000 médecins, à faire la permanence des soins, de la coordination et de la prévention ". Cette nouvelle cause lui irait pourtant comme un gant.

 

Agnès BOURGUIGNON

(1) Professeurs d'université-praticiens hospitaliers.

 

Une étude confirme le rôle du médicament dans la baisse de la durée des séjours à l'hôpital

Quotidien du médecin du 29/09/2003

 

Dans sa dernière étude, l'économiste de la santé Claude Le Pen démontre les relations complexes qui unissent le médicament et l'hôpital, et explique comment, selon lui, le médicament participe à la diminution structurelle des frais d'hospitalisation.

 

" Médicament et hôpital : la nouvelle donne " est le titre de la dernière étude de Claude Le Pen, qui l'a réalisée avec la participation du LEEM (Les Entreprises du médicament) et du LIR (Laboratoires internationaux de recherche).

 

L'auteur part du constat mis en évidence dans le rapport Couanau (1) que l'hôpital " est devenu le lieu quasi monopolistique de l'expérimentation et de la mise en œuvre des techniques médicales les plus innovantes, et partant, les plus coûteuses ". Avec pour corollaire, un doublement du coût moyen des soins délivrés au cours d'une journée d'hospitalisation entre 1985 et 2000. Dans le même temps, la durée moyenne d'hospitalisation en court séjour s'est réduite presque naturellement ; elle est passée, pour la même période, de 9 à 6 jours, avec une baisse de 20 % du nombre de journées. Un raccourcissement de la durée moyenne d'hospitalisation et du nombre total de journées dû pour une part à des impératifs financiers en raison de leur coût élevé. Mais pour Claude Le Pen, d'autres facteurs entrent en jeu pour expliquer cette baisse, et en particulier le médicament, qui, bien qu'il ne représente que 6 % des dépenses hospitalières en 2000, aurait " joué un rôle majeur dans ce processus ". Selon l'économiste, " il a fortement contribué à la diminution des durées de séjour en rendant possible la poursuite en ville de traitements commencés à l'hôpital et en offrant des solutions thérapeutiques ambulatoires alternatives à des patients hospitalisés ".

 

L'exemple du sida

 

Et Claude Le Pen cite un certain nombre d'exemples à l'appui, comme les molécules antivirales dans le traitement du sida. Les malades qui, auparavant, étaient soignés à l'hôpital pour des affections opportunistes suivent aujourd'hui leur traitement en ville. L'étude indique que " dans les trois années qui ont suivi l'arrivée des trithérapies, de 1996 à 1999, ce sont près de 300 millions d'euros qui ont été économisés par le système hospitalier ". De même, pour les patients schizophrènes, de nouvelles générations d'antipsychotiques dits atypiques ont permis à ceux qui étaient résistants aux traitements antérieurs de quitter la structure hospitalière. Des études ont montré que si, dans cette pathologie, le coût des médicaments s'est accru, cet accroissement a été largement compensé par la diminution de la durée des séjours. A preuve, l'unité psychiatrique de l'hôpital de Lille, où " le coût des médicaments a augmenté de 1 000 euros par patient et celui des séjours a baissé de 27 000 euros ".

Enfin, d'autres médicaments ont permis une modification de la pratique chirurgicale : les immunosuppresseurs, qui permettent de contrôler les phénomènes de rejet, ont rendu possible les greffes d'organes. D'une part, note l'auteur du rapport, ces médicaments ont permis de nouveaux types d'intervention, mais en plus, dans le cas de greffe du rein par exemple, le coût de l'opération additionné à celui du traitement médicamenteux est sept fois moins onéreux que le coût des dialyses à répétition que devaient subir les patients en centre hospitalier.

Pour Claude Le Pen, c'est clair, " l'alourdissement du poste médicament dans les dépenses hospitalières (qui est passée de 4 % à 6 % entre 1980 et 2000, NDLR) n'est pas illogique ".

 

Henri de SAINT ROMAN

 

(1) Une mission parlementaire qui a étudié les problèmes de l'organisation interne de l'hôpital et qui a été rendue publique en mars 2003.

 

 

Déremboursement de 82 médicaments :

Mattei espère 40 millions d'économies

Quotidien du médecin du 29/09/2003

 

Le " Journal officiel " a publié la semaine dernière la liste de 82 médicaments à service médical rendu (SMR) insuffisant qui ne seront plus remboursés. Le gouvernement espère, avec cette mesure, économiser 40 millions d'euros en année pleine. Deux autres vagues de déremboursements sont prévues en 2004 et 2005, soit un total de près de 650 médicaments visés.

 

" L'arrêté devait paraître entre le 15 et le 20 août, a expliqué Jean-François Mattei. Pour une raison que vous comprendrez aisément, une bonne partie du mois d'août a été très occupée ". Ce qui explique manifestement le retard pris dans la publication de cet arrêté, qui est finalement paru il y a quelques jours seulement au " Journal officiel " (1). Sont concernés 82 médicaments à SMR insuffisant (notamment des antitussifs, des expectorants, des anti-acides, des médicaments pour prévenir ou traiter la cataracte, des antibactériens, des corticoïdes...), et au ministère de la Santé, on attend de cette mesure 40 millions d'euros d'économie " au maximum ", en année pleine.

 

En fait, c'est début juillet qu'aurait dû être initialement publiée la liste de médicaments déremboursés. Mais il semblerait que la décision du Conseil d'Etat, le 20 juin dernier, d'annuler les baisses de 65 % à 35 % du taux de remboursement de deux médicaments pour motivation insuffisante des avis rendus par la commission de la transparence ait incité le ministre à revoir sa copie. Cette première vague de déremboursements, dont l'industrie pharmaceutique avait accepté, sans enthousiasme, le principe dans l'accord-cadre qu'elle a signé au mois de juin dernier avec les pouvoirs publics, sera suivie d'au moins deux autres : en 2004, une deuxième vague de déremboursements devrait concerner un nombre plus important de médicaments à SMR insuffisant, suivie d'une autre en 2005.

Le 5 juin dernier, au cours d'une réunion avec des journalistes, Jean-François Mattei annonçait : " En juillet 2004, nous procéderons à une deuxième vague plus importante pour des médicaments qui ne méritent plus d'être remboursés, mais qui entrent dans le cadre de l'automédication, ce qui permet à certaines personnes de se sentir soignées. Nous avons décalé cette deuxième vague de déremboursement à l'été 2004 pour laisser aux industriels le temps d'adopter une politique commune sur ces médicaments ; et en 2005, nous dérembourserons des médicaments sans utilité médicale, mais qui n'ont pas d'équivalents plus utiles. Ces médicaments ont une utilité sociale, et c'est un point de vue à prendre en considération ".

Il devrait s'agir alors des veinotoniques dont le coût pour la Sécurité sociale est beaucoup plus élevé.

La première liste des 82 médicaments déremboursés parue au " J. O. " en comprenait 84 au départ. Au ministère de la Santé, on indique que deux médicaments (Néocodion Enfant et Néocodion Adulte) ont été précédemment déremboursés à la demande expresse du laboratoire concerné.

Pour les 82 médicaments restants, le déremboursement prendra effet pour les patients un mois après la publication au " Journal officiel ", soit le 25 octobre 2003, pour laisser le temps aux pharmaciens d'écouler certains de leurs stocks et aux médecins d'être parfaitement informés de la nouvelle situation de ces médicaments.

 

Henri de SAINT ROMAN

 

(1) La liste complète des médicaments concernés par le déremboursement est disponible en ligne sur le site du ministère de la Santé : www.sante.gouv.fr (rubrique : point presse/les dossiers).

 

 

Les caisses veulent développer la chirurgie ambulatoire

Quotidien du médecin du 29/09/2003

 

Une grande enquête des trois caisses nationales d'assurance-maladie (CNAM, MSA et CANAM) montre que les interventions chirurgicales sans hébergement pourraient largement se substituer aux opérations traditionnelles plus coûteuses, surtout dans les hôpitaux publics, à condition que les établissements procèdent à une " révolution culturelle ".

 

Le retard important de la chirurgie ambulatoire (1) en France est déjà connu - seulement 30 % des actes chirurgicaux qui pourraient être effectués dans la journée le sont en France, ce qui la place au 12e rang des 14 pays de l'OCDE. Mais, selon une vaste enquête publiée par l'assurance-maladie, jusqu'à " 30 % des établissements hospitaliers publics et privés " pourraient d'ores et déjà transférer une partie de leur activité chirurgicale vers ce mode opératoire.

 

Environ " 30 000 patients et 1 280 établissements " ont été contactés en 2001-2002 pour cette enquête en quatre volets (coût, besoins, opinion des acteurs et offre de soins) sur les " Conditions du développement de la chirurgie ambulatoire ", " la plus grande au monde " sur le sujet, selon Pierre-Jean Lancry, directeur délégué aux risques à la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM). En 1999, la chirurgie ambulatoire était beaucoup plus pratiquée dans le secteur privé (87 % des interventions chirurgicales) que dans le public (13 %), avec en outre une grande disparité de pratiques selon les régions pour 18 gestes " marqueurs ". Par exemple, la chirurgie ambulatoire représentait 6,1 % des arthroscopies du genou réalisées en Auvergne contre 53,8 % en Bourgogne, et 11,1 % des opérations de la cataracte en Haute-Normandie, contre 70,7 % en Poitou-Charentes. L'étude des trois caisses d'assurance-maladie mesure précisément le potentiel de développement de cette pratique acte par acte et région par région, en croisant les besoins de la population (état de santé, environnement, psychisme) avec les caractéristiques de l'offre de soins (un trajet de plus de 60 minutes entre le domicile et une structure de soins étant contre-indiqué).

L'étude révèle ainsi qu'en Basse-Normandie, la quasi-totalité des patients (95 %) pourraient se faire extraire des dents en ambulatoire alors que seulement 16,4 % le font aujourd'hui. En Ile-de-France, jusqu'à 78,5 % de la population concernée pourrait se faire opérer de la cataracte sans hospitalisation, au lieu de 46,9 % actuellement. Par cet " état des lieux extrêmement fin ", souligne le Pr Hubert Allemand, médecin-conseil national de la CNAM, cette étude " mâche le travail " des unions régionales des caisses d'assurance-maladie (URCAM) et des agences régionales d'hospitalisation (ARH) pour les schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS).

L'assurance-maladie fait valoir que " 90 % des patients interrogés " dans le cadre de son enquête se sont déclarés " satisfaits " de leur prise en charge en ambulatoire. Mais, bien sûr, les caisses ont elles-mêmes intérêt à ce que cette pratique se développe sur le plan économique. A partir de 5 000 dossiers concernant cinq actes chirurgicaux fréquents (2), l'étude montre que les économies potentielles varient, selon les actes pratiqués, " de 7 % (cataracte) à 26 % (varices) dans les établissements privés et de 25 % (arthroscopie du genou) à 51 % (varices) dans les hôpitaux publics ". La chirurgie ambulatoire est plus économique " avant, pendant et après ", souligne Pierre-Jean Lancry, puisque la comparaison hospitalisation traditionnelle/ambulatoire porte sur les dépenses trois semaines avant l'opération et sur les soins de suite dans un délai de deux mois. Au total, les caisses évaluent à " 100 millions d'euros " le gisement d'économies annuelles sur les cinq interventions étudiées.

En attendant, l'étude relève que les " freins " à l'essor de la chirurgie ambulatoire ne sont pas économiques mais essentiellement " culturels ". " On a besoin d'une évolution des mentalités et des comportements, notamment dans les hôpitaux ", affirme le Pr Allemand. Cette pratique nécessite une mobilisation et une synchronisation des professionnels autour du malade en un laps de temps très court. Or c'est un exercice difficile ou peu incitatif " dans les grands établissements ", selon les caisses.

 

Agnès BOURGUIGNON

 

(1) La chirurgie ambulatoire recouvre des interventions réalisées en l'espace de 12 heures ne nécessitant pas d'hébergement, contrairement à l'hospitalisation traditionnelle.

(2) Il s'agit des interventions suivantes : opération de la cataracte, décompression du nerf médian du canal carpien, extraction de deux dents de sagesse, intervention sur les varices du membre inférieur, arthroscopie du genou avec méniscectomie.

 

 

 

A Ramatuelle, la CSMF se remet en ordre de marche pour 2004

Quotidien du médecin du 29/09/2003

 

Pour sa 9e université d'été à Ramatuelle, la CSMF a assumé ses doutes et ses tensions internes pour mieux préparer l'avenir. Le premier syndicat de médecins libéraux se pose déjà en acteur de la réforme annoncée. Mais la voix du partenariat est loin d'être un fleuve tranquille.

 

de notre envoyé spécial

 

En repoussant d'un an au moins toute réforme d'envergure de l'assurance-maladie, officiellement pour ne pas présumer du processus de concertation qui va s'ouvrir, le gouvernement ne s'est-il pas trompé de calendrier ? On pourrait être tenté de le croire.

 

A Ramatuelle, en tout cas, où s'est tenue pendant trois jours la 9e université d'été de la CSMF, le premier syndicat de médecins libéraux a clairement montré, entre ateliers, rencontres informelles et tables rondes, son immense appétit de réformes. Quelle gouvernance pour l'assurance-maladie ? Quel panier de soins ? Quelle place pour l'assurance complémentaire ? Quelle régionalisation ?

Pour le Dr Michel Chassang, président de la " Conf ", " tout est à revoir, tout est à inventer ". En clair, ce ne sont pas les " rustines " ou les " bouts de chandelles " du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2004 (PLFSS) qui empêcheront le bateau de " prendre l'eau de toutes parts ".

Problème : le Dr Chassang a tranché seul le débat stratégique et on ne cesse de le lui reprocher. Pour peser de tout son poids dans la réforme, la CSMF " devait faire un geste ", montrer sa bonne volonté au gouvernement, prendre toutes ses responsabilités au risque de perdre quelques plumes. D'où la signature, cet été, d'un accord inattendu avec les caisses, ouvrant la voie d'un règlement conventionnel minimal pour les spécialistes et prévoyant des revalorisations tarifaires pour les seuls médecins cliniciens du secteur I.

 

Illisible

 

Mais pour beaucoup de confédérés, qui sortent la tête haute de huit ans d'opposition acharnée, la pilule reste amère. Trop brutalement administrée. " Texte de la honte ", " signature croupion ", " décision autocratique ", a-t-on pu entendre ça et là. Des propos durs malgré la douceur varoise. L'explication interne a eu lieu à huis clos. La marmite de Ramatuelle bouillait. " On n'entend plus les coordinations, mais maintenant c'est en interne que ça bouge ", analyse le Dr Chassang. Jamais sans doute dans l'histoire récente de la Conf le débat n'a été aussi exacerbé. Certains ont déjà intégré le virage du partenariat. " Moi, je fais partie de ceux qui ont demandé à Chassang d'aller de l'avant ; car on ne peut pas rester éternellement en opposition, résume le Dr Denis Aucant, au nom de la puissante fédération des radiologues. 1995-2003, il fallait tourner la page. "

D'autres cadres assument la ligne officielle mais ont dû ramer de toutes leurs forces pour éviter la rupture. " Les anesthésistes sont furieux, explique le Dr Michel Lévy, 22 ans de syndicalisme, secrétaire général du Syndicat national des anesthésistes-réanimateurs (SNARF). Ils ont vécu comme une insulte leur exclusion du monde des cliniciens dans le RCM. " Fallait-il claquer la porte de la maison confédérale ? " Cela aurait été stérile et la CSMF est la seule centrale qui ait une structure. "

D'autres enfin ne s'en remettent pas et égratignent le médecin de famille à la tête de la Confédération : " Il y a un malaise avec Chassang. Il n'a pas de discours clair pour les spécialistes ", glisse un psychiatre.

Quant aux généralistes de la CSMF, ils sont pour l'instant plus en retrait dans cette polémique. Même si plusieurs départements ruraux ont fait connaître leur mécontentement. " Ce qui est très mal vécu, c'est la rupture du front syndical avec le SML et Alliance. Dans cette histoire, c'est la CSMF qui a été le "maillon faible" ", commente le Dr Luc Duquesnel, président de la CSMF 53, qui parle de " stratégie illisible pour la base ".

Certains enfin se demandent ce qu'est devenue la revendication d'un nouvel espace de liberté tarifaire.

Le Dr Chassang n'ignore rien des crispations et des doutes qui habitent la Confédération depuis quelques semaines. Il espère un retour à un minimum de sérénité pour que la Conf, à nouveau en ordre de marche, puisse jouer " tout son rôle. Rendez-vous est pris pour 2004 ".

 

Cyrille DUPUIS

 

 

 

Hausse du forfait hospitalier : " injuste " pour les cliniques

Quotidien du médecin du 29/09/2003

 

La Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) " proteste énergiquement " contre le relèvement du forfait hospitalier de 10 à 13 euros, une mesure qu'elle qualifie d'" injuste et surprenante ".

La FHP, " au nom des établissements de moyen séjour qu'elle représente, considère cette décision comme paradoxale au moment où le gouvernement prépare le plan Vieillissement et Solidarités destiné à améliorer la prise en charge des patients les plus âgés ". La FHP souligne que la revalorisation correspond " à une majoration supérieure à l'indice de revalorisation INSEE depuis 1996 ".

 

 

Personnes âgées : le plan d'action de la FHF

Quotidien du médecin du 29/09/2003

 

Après avoir fait le point en interne sur la catastrophe sanitaire de l'été et considérant que " l'impact véritable " du vieillissement de la population est encore " devant nous ", la Fédération hospitalière de France (FHF, qui regroupe l'ensemble des hôpitaux publics mais aussi des services de soins infirmiers à domicile, des maisons de retraite publiques... autant d'établissements mobilisés pendant la canicule) a élaboré un plan d'action. Ce programme s'articule autour de trois axes, dont le premier est l'adaptation des structures aux enjeux démographiques et à la pandémie de la maladie d'Alzheimer. Suit l'augmentation du nombre de professionnels qualifiés, le but étant d'atteindre dans cinq ans des ratios planchers (une infirmière pour neuf résidents et une aide soignante pour cinq résidents dans les maisons de retraite, par exemple). Enfin, la FHF reprend l'idée de la création d'un cinquième risque pour la compensation des handicaps. Dans ce cadre, elle prône la réévaluation des financements collectifs consacrés à la prise en charge sanitaire, sociale et médico-sociale des personnes âgées.

 

L'AMUHF, le SMG et la Coordination nationale des réseaux se rapprochent

Quotidien du médecin du 29/09/2003

 

 

 

 

 

L'Association des médecins urgentistes hospitaliers de France (AMUHF, voir le portrait de son président, Patrick Pelloux, en page 10), le Syndicat des médecins généralistes (SMG) et la Coordination nationale des réseaux se sont attelés ensemble à l'élaboration de propositions pour le " renouveau de la médecine générale ".

 

Dans la perspective de la réforme annoncée de la Sécurité sociale et en tirant leurs propores enseignements des dysfonctionnements constatés l'été dernier lors de la canicule, les trois organisations avancent leurs pions. Elles appellent tout d'abord médecins, usagers et citoyens à la constitution " d'un front de résistance contre la privatisation de l'assurance-maladie et pour l'établissement d'une couverture sociale de haut niveau pour tous ". Elles sont ensuite soucieuses de promouvoir une autre manière d'appréhender les questions de santé que celle qui prévaut aujourd'hui. " Les catastrophes sanitaires, ça se prévoit par une culture de la santé publique que nous n'avons pas ", insiste le Dr Patrice Muller, président du SMG. Comment l'acquérir ? Entre autres, en modifiant les pratiques des médecins, répondent l'AMUHF, la Coordination et le SMG, qui suggèrent sept pistes d'" amélioration ".

La concertation et la coordination du médecin généraliste avec les autres acteurs locaux du soin et du secteur sanitaire et social sont une nécessité, affirment les trois structures, tout comme l'élargissement et le renforcement de la FMC. La participation des généralistes libéraux à la continuité des soins doit, quant à elle, être " complètement repensée " (une architecture est proposée avec une médecine de " premier niveau ", service public de proximité, chargée de trier les " urgences ressenties "). Et le paiement à l'acte doit disparaître, remplacé par un salariat à temps plein ou partiel.

En l'état actuel des choses, les trois organisations restent dubitatives sur l'utilité de donner de nouveaux moyens au système de santé - 800 millions d'euros vont être dévolus aux urgences - par exemple. " On n'arrivera à rien, prévient Patrick Pelloux, en pérennisant un vieux système. Il ne sert à rien de réinjecter de l'argent dans un système pas performant. Nous ne sommes pas en train d'apporter des réponses cohérentes et innovantes à la crise. " Didier Ménard, le président de la Coordination des réseaux, s'interroge également : " On nous donne des moyens, mais des moyens pour quoi faire ? On s'aperçoit que les premiers financements des réseaux de soins issus de la loi du 4 mars 2002 étouffent les réseaux de proximité et valorisent des structures très hospitalo-centrées ".

 

 

 

La coordination des médecins généralistes opposée à la prime à l'installation

Quotidien du médecin du 29/09/2003

 

La Coordination nationale des médecins généralistes (CONAT) " rejette le principe de la prime à l'installation " prévue dans le projet de loi sur les territoires ruraux (" le Quotidien " du 8 septembre).

La CONAT demande une " amélioration des conditions de travail libéral " à travers " la possibilité de création de cabinets secondaires (et de) collaboration de médecins assistants ", et " l'aide au regroupement des professions libérales de santé leur permettant de bénéficier de secrétariat à coût réduit (soutien des collectivités locales et territoriales) et de travailler dans un cadre libéral favorisant la coordination des soins ".

La coordination souhaite aussi " des aides financières ", à condition qu'elle n'entravent pas la liberté d'installation et prennent la forme d'" exonération définitive de la taxe professionnelle (actuellement seulement deux ans) " et de " fiscalité de zone franche définitive ". En outre, elle souligne que le volontariat de la permanence des soins dans ces zones est " un facteur essentiel pour lutter contre cette démographie médicale déficitaire ".

 

 

 

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Mattei au chevet de l'hôpital

Libération 30 septembre 2003

 

489 millions d'euros, 15.000 lits et 10.000 postes: le ministre de la Santé a annoncé mardi un "Plan Urgences" • Entretien avec l'urgentiste Patrick Werner •

Par Grégory SCHNEIDER

 

 

 

Jean-François Mattei a rendu sa copie. Mardi, le ministre de la Santé a fait connaître son "plan Urgences": 489 millions d'euros sur cinq ans (dont 150 millions en 2004), 10.500 postes médicaux et non-médicaux créés durant cette période et 15.000 "lits de sortie" des services d'urgence. "C'est un plan pour les urgences d'une ambition jamais égalée", s'est félicité le ministre. Qui ajoute avoir voulu construire "une réponse à la mesure" des événements de cet été, alors que le nombre de décès liés à la canicule a été évalué à 14.802 par l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale). Mattei affirme avoir voulu construire un plan "global", "depuis l'amont (...) jusqu'à l'aval, à l'hôpital, dans les services de soins de suite et jusqu'au retour au domicile".

En savoir plus avec Reuters

 

Patrick Werner, chef du service des urgences de l'hôpital Beaujon de Clichy, et président du CNBH (Comité national de défense de l'hôpital), réagit au plan du ministre.

 

Le chiffre de 489 millions d'euros sur cinq ans vous parait-il satisfaisant?

C'est considérable. Il y a dix jours, le gouvernement avait annoncé le débloquage d'une aide de 880 millions d'euros consacrée aux investissements et à la modernisation des bâtiments: l'investissement, c'est bien, mais il importait surtout d'améliorer le fonctionnement. Mattei parle de plus de 10.000 postes créés, de l'ouverture de 15.000 lits: ça me semble répondre à la crise que connaissent les services d'urgences depuis deux décennies. Maintenant, il faut regarder le détail et vérifier qu'on n'habille pas Paul en déshabillant Jacques.

 

Où se situent précisément les besoins en lits?

A tous les niveaux. Celui des "lits d'aigus" ou "MCO", pour médecine-chirurgie-obstétrique: c'est le stade où l'on soigne les affections aiguës, le patient se présente pour être immédiatement admis. Ensuite, il y a l'hospitalisation "non-aiguë", qui peut durer jusqu'à un mois: les suites, la rééducation, les moyens séjours. Là aussi, on manque de lits. Comme en long séjour, le dernier stade –hospitalisation longue, prise en charge de personnes âgées souffrant de maux récurrents... D'après l'annonce faite par le gouvernement, ce sont surtout les deux premiers niveaux qui bénéficieraient des 15.000 lits créés. Ils figurent, de fait, le goulet d'étranglement des hôpitaux: ils sont situés en bout de chaîne, et il est pourtant impossible de refuser du monde.

 

Mattei parle de 4.000 postes d'infirmiers créés, dont 600 pour les Services mobiles d'urgences et de réanimation.

Encore faut-il qu'il les trouve. Une étude récente du ministère de la Santé montre qu'il existe actuellement 50.000 infirmières qui n'excercent pas ce métier: salaire trop faible, absence d'aide au logement (comment se loger à Paris par exemple au prix du marché, avec 1.500 euros par mois?), astreintes les jours fériés, conditions de travail difficiles –un seule personne peut avoir plus d'une vingtaine de patients en charge... Il ne suffit pas de vouloir créer des postes, il faut aussi que ceux-ci soient attractifs.

 

Les 100 nouveaux postes de permanenciers du 15, dont le salaire mensuel est par ailleurs augmenté de 76 euros?

Il fallait absolument revaloriser la fonction. Ce sont les permanenciers qui prennent les appels et évaluent la gravité des cas: ces véritables "contrôleurs de santé" n'étaient jusqu'ici pas reconnus à la mesure de leurs responsabilités, qui sont écrasantes.

 

Comment appréhendez-vous le fait qu'il a fallu un drame pour faire réagir les gouvernants?

Cette critique est valable pour l'ensemble du personnel politique, de droite ou de gauche. Valoriser les métiers des services d'urgence est un choix politique au sens noble. Il faut savoir ce qu'on veut: la santé coûte cher, et on ne parle que de restriction depuis 20 ans. On a restructuré les services à la baisse, fermé les petites structures (sans renforcer les grosses), lancé les 35 heures sans création de postes... Il était temps d'endiguer cette tendance.

 

 

 

 

 

 

 

Les prévisions très sombres de la commission des comptes

pour l'an prochain

Quotidien du médecin, du 25/09/2003

 

Plombé par les très mauvais résultats de sa branche maladie, le régime général de la Sécu affichera à la fin de l'année un déficit de 8,9 milliards d'euros. En 2004, le trou pourrait atteindre les 13,6 milliards. Les chiffres s'emballent et, pour la commission des comptes de la Sécurité sociale, même un retour de la croissance ne suffira pas à redresser la barre.

 

" Situation exceptionnellement difficile ", " déficits très préoccupants ", " dégradation très rapide ", " besoins de trésorerie considérables "... Les commentaires de la commission des comptes de la Sécurité sociale sont aussi alarmants que ses chiffres : un déficit de 8,9 milliards d'euros cette année pour le régime général, creusé essentiellement par la branche maladie (- 10,6 milliards à la fin de l'année), et qui se creusera bien plus encore en 2004 : le trou sera alors de 13,6 milliards, les comptes du régime général étant une nouvelle fois plombés par ceux de l'assurance-maladie, déficitaire de 14,1 milliards d'euros).

 

 

 

 

Les experts donnent des repères : " Le solde du régime général en 2003 serait proche du point le plus bas enregistré au cours de la décennie quatre-vingt-dix (- 10,3 milliards d'euros en 1995) ", soit juste avant le plan Juppé (voir graphique). Ils fournissent des illustrations : le déficit 2004 représentera " environ trois fois les remboursements d'honoraires des généralistes, environ deux fois les remboursements d'honoraires des spécialistes et environ 90 % des remboursements de médicaments ". Ils offrent aussi des explications. Cette année, c'est une " conjonction de facteurs défavorables " qui provoque la chute. L'économie marchant au ralenti, les recettes sont en berne : celles assises sur les salaires, bien sûr, mais d'autres aussi, sur lesquelles les pouvoirs publics n'imaginaient pas ne pas pouvoir compter (la hausse des prix du tabac en 2003 n'a rapporté que 200 millions d'euros, au lieu du milliard escompté ; " pour la première fois, note la commission, [cette mesure]a eu un impact sensible sur la consommation, dont la baisse a pratiquement annulé l'augmentation des droits "). Pendant ce temps, les dépenses progressent allègrement, " plus vite que les recettes ". C'est du côté de l'assurance-maladie que le phénomène est le plus spectaculaire, même si en 2003 (où l'ONDAM serait dépassé de 1,2 milliard d'euros, avec des dépenses en hausse de 6,4 %) les dépenses enregistrent " une légère décélération " par rapport à 2002 (année de " progression exceptionnelle, notent les experts, liée notamment aux mesures de revalorisation des honoraires des professionnels de santé, ainsi qu'aux crédits supplémentaires accordés aux (hôpitaux) "). Toujours soutenue en 2003 (+ 7,7 %), notamment sous l'effet " en année pleine des mesures en faveur des professionnels décidées en 2002 ", la croissance des dépenses de soins de ville pourrait ralentir l'an prochain, parce que, entre autres, les effets reports de 2002 s'estompent et parce que " les mesures d'économie sur le médicament (...) devraient jouer en année pleine ". Mauvaise nouvelle pour le régime général : les résultats des régimes vieillesse et famille vont marquer le pas en 2004. A la CNAV (Caisse nationale d'assurance vieillesse), nettement excédentaire depuis 2000, on atteindra à peine l'équilibre l'an prochain sous l'effet de mesures liées à la loi retraite (celle autorisant les départs anticipés, en particulier). Les dépenses de la branche famille vont s'accroître, elles aussi, avec la mise en place de la nouvelle prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE). Le diagnostic de la commission des comptes, CQFD, est plus que sombre : " Le déficit du régime général se dégrade très rapidement et, en l'absence de mesures correctrices, dépasserait nettement en 2004 le niveau historiquement élevé de 1995. " Signe, s'il en fallait, de la mauvaise posture de la Sécu, ses besoins de trésorerie sont énormes et ses frais financiers grimpent en flèche. La trésorerie de l'ACOSS (la banque de la Sécurité sociale) " connaît une dégradation très rapide, commente la commission, avec 311 jours de solde négatif en 2003 (114 en 2002). Son solde est négatif en permanence depuis juin 2003 ".

 

Le retour de la croissance ne suffira pas

 

Or, couverts par la Caisse des dépôts et consignations (à des taux d'intérêt plutôt bas), les besoins de trésorerie de l'ACOSS commencent à lui coûter cher : 120 millions d'euros en 2003, sans doute 500 millions en 2004. Pour les experts, un retour à une croissance meilleure ne suffira pas à faire disparaître le trou de la Sécu. Car si l'on voulait " rétablir l'équilibre en 2010 ", il faudrait, calculent-ils, que chaque année à partir de 2005 la croissance des recettes soit supérieure d'un peu plus de 2 points à celle des dépenses. Impensable. Dans le strict domaine de la branche maladie, la commission relève des évolutions de fond qui ne vont pas dans le sens d'une embellie (poids croissant des dépenses relatives aux personnes exonérées du ticket modérateur, " déformation générale " de la consommation de soins au profit de ceux qui sont le mieux pris en charge par l'assurance-maladie...). Surtout, elle insiste : la tendance à la hausse des dépenses de santé est " favorisée par la grande liberté dont l'ensemble des acteurs disposent dans le système de soins ".

Karine PIGANEAU

 

 

 

Bertrand Fragonard à la tête du Haut Conseil pour l'assurance-maladie

Quotidien du médecin, du 25/09/2003

 

Bertrand Fragonard présidera le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie qui sera mis en place dans quelques jours par le Premier ministre. On sait que cette instance doit faire l'analyse de la situation du système de protection sociale. Un diagnostic qui sera dressé dans la perspective de la réforme de la Sécurité sociale. On se souvient que Bertrand Fragonard, président de chambre à la Cour des comptes, a été directeur de la CNAM de 1997 à 1998.

 

 

Le déficit du régime général et la préparation du PLFSS 2004

 

Ce que prévoit le gouvernement

 

• Médecine de ville Dans un ONDAM (Objectif national des dépenses d'assurance-maladie) restreint à + 4 % - il était de + 5,3 % cette année -, le nouveau PLFSS se donne pour objectif de ralentir le rythme de croissance des dépenses liées aux soins de ville en 2004 et de réaliser par ce biais une économie de 800 millions d'euros. Actuellement de 4,5 % par an, la hausse des volumes d'actes devra rester l'an prochain dans les limites de 3,5 %. De la même façon, la croissance des prescriptions (7 % par an, environ) devra ralentir de 1,6 %. Comment y parvenir ? En mettant l'accent sur la maîtrise médicalisée. S'appuyant sur les récents exemples de la réforme de la visite, du développement des génériques et du bon usage des antibiotiques, le PLFSS 2004 trace de nouveaux axes de développement pour cette maîtrise. A commencer par la promotion des accords de bon usage des soins (AcBUS) : une simplification de mise en œuvre est planifiée, qui transfère du ministre de la Santé à la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) le pouvoir d'approbation des futurs accords. Egalement considéré comme un " outil de maîtrise ", le dossier médical partagé est prudemment mis sur les rails. Le gouvernement, échaudé par le précédent du carnet de santé, prévoit pour l'an prochain des " expérimentations pilotes ", financées par le Fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV). Autre piste : le test de la gestion du risque par des groupes de médecins, l'idée étant de permettre aux URCAM (unions régionales des caisses d'assurance-maladie) d'inciter des cercles de praticiens libéraux à élaborer des formes d'autoévaluation et d'autoencadrement collectifs de leurs pratiques, éventuellement avec un intéressement, et de favoriser ainsi des économies. On s'y attendait, la maîtrise des dépenses remboursées aux patients atteints d'une affection de longue durée (ALD) est au programme, le contrôle médical étant recentré sur l'admission à exonération de certaines pathologies et de certaines prestations. Dans le même ordre d'idées, les règles d'exonération du ticket modérateur liées aux actes dont la cotation est supérieure à 50 vont être clarifiées et, notamment, ciblées sur les actes les plus coûteux. La gestion des indemnités journalières est, elle aussi, sur la sellette et l'Etat annonce qu'il va fixer dans ce domaine des " objectifs ambitieux " à la CNAM. A côté de la maîtrise des dépenses, le PLFSS insiste sur la nécessaire " coordination des soins " et lui donne un coup de pouce, en dégageant 125 millions d'euros (" soit, précise le texte, un quasi-triplement de la dotation de 2003 ") pour le développement des réseaux. Enfin, l'édition 2004 du PLFSS responsabilise les usagers selon des modalités qui concernent les médecins de très près. Elle prévoit en effet " d'exclure du remboursement par l'assurance-maladie les actes effectués en dehors de toute justification médicale " (certificat médical autorisant l'obtention d'une licence sportive, d'un brevet de pilote, du droit de conduire au-delà d'un certain âge, etc.) et annonce des mesures sévères : " Les prestations qui auront été indûment remboursées à ce titre pourront faire l'objet d'un remboursement par l'assuré. "

 

• La politique hospitalière La plus spectaculaire des décisions du gouvernement concerne l'augmentation du forfait journalier, qui correspond à la participation financière des patients aux frais d'hébergement et d'entretien liés à l'hospitalisation lorsque celle-ci dure plus d'une journée. Son montant, stable depuis 1996, est revalorisé de 10,67 à 13 euros, ce qui constitue " un rattrapage par rapport à l'évolution de la richesse nationale ", précise le PLFSS. Les bénéficiaires de la CMU demeurent les seuls à être exonérés de cette charge. Le forfait journalier pour une hospitalisation en hôpital psychiatrique passe de 10,67 à 9 euros. Le PLFSS 2004 veut, en outre, inciter les établissements à se faire accréditer et dégage dans cette optique une enveloppe de 7,6 millions, alors que, jusqu'à présent, l'accréditation ne donnait droit à aucun supplément de revenus. Cet argent sera versé aux cinquante établissements volontaires pour expérimenter la nouvelle procédure d'accréditation (" le Quotidien " du 23 septembre). Le projet de loi reprend dans son volet consacré à la modernisation de l'hôpital chacun des cinq grands chantiers lancés dans le cadre du plan Hôpital 2007. La principale annonce concerne la tarification à l'activité. L'échéance fixée pour que les mêmes modalités de financement s'appliquent aux secteurs public et privé - l'objectif de cette réforme - est de dix ans. D'où une mise en œuvre progressive. En 2004, une partie seulement des budgets hospitaliers publics (10 %) sera concernée, tandis que sera appliqué un coefficient correcteur pour les établissements privés " afin de tenir compte des différences tarifaires ", précise le PLFSS. Les missions d'intérêt général seront financées forfaitairement, tandis que certaines activités, comme les urgences, bénéficieront d'un financement mixte (forfait et financement à l'activité). Le projet de loi confirme que la relance de l'investissement hospitalier, qui a commencé en 2003 avec l'injection d'un milliard d'euros dans les hôpitaux, va se poursuivre jusqu'en 2007. Autre réforme sur les rails : la simplification de la planification sanitaire. L'ordonnance du 4 septembre 2003 prévoit la suppression de la carte sanitaire, la simplification du régime des autorisations et le renforcement du schéma régional de l'organisation sanitaire (SROS). La même ordonnance crée les nouveaux groupements de coopération sanitaire (GCS), qui, en étant ouverts aux professionnels libéraux et aux établissements médico-sociaux, devraient faciliter les coopérations entre les établissements et le secteur ambulatoire. Le PLFSS 2004 " prévoit d'expérimenter, dans certains GCS, une rémunération identique entre les médecins libéraux et hospitaliers concourant ensemble à une même activité, avec une part forfaitaire et une part liée à l'activité ".

 

• La politique du médicament Comme les années précédentes, le gouvernement mise largement sur le médicament pour apporter quelques économies, voire quelques crédits, à l'assurance-maladie. La mesure qui heurtera sans doute le plus l'industrie pharmaceutique concerne la hausse de la taxe sur la promotion, qui rapporte aujourd'hui environ 200 millions d'euros par an à l'assurance-maladie. Le gouvernement veut accroître ce rendement et imposer la promotion pour 150 millions d'euros supplémentaires. Tout bénéfice pour l'Etat, puisque l'on sait que les laboratoires ne peuvent déduire cette taxe de leurs bénéfices imposables. Le gouvernement envisage aussi de réformer ce dispositif de taxation en mettant en place un système plus progressif de taxation par tranches de dépenses de promotion, afin explique-t-on, de moins pénaliser les petites et moyennes entreprises. Autre mesure d'économies dont " le Quotidien " s'était fait l'écho : la fin de la liberté des prix pour les médicaments vendus par les entreprises à l'hôpital. Avec, cependant, des exceptions, pour certains médicaments qui n'ont pas d'AMM définitive, les préparations magistrales, les préparations hospitalières et des médicaments bénéficiant d'une autorisation d'importation. Autre confirmation : la baisse du taux de remboursement des médicaments homéopathiques (qui passe de 65 à 35 %) et qui va apporter si cette disposition est votée par les parlementaires, environ 70 millions d'euros d'économies à l'assurance-maladie. Le gouvernement veut également développer sa politique en faveur des génériques. C'est dans cet esprit qu'il est favorable à la création d'un groupe générique dès l'autorisation de mise sur le marché d'un médicament, même avant l'échéance du brevet du princeps. Etant entendu que la commercialisation du générique ne pourrait se faire avant l'expiration des droits de propriété intellectuelle. Mais cette disposition, dans l'esprit des partisans de cette mesure, permettrait d'accélérer la mise sur le marché du générique dès la fin de ces droits. Aujourd'hui, l'inscription au répertoire des génériques se fait à la commercialisation de la copie. Selon le nouveau texte, elle se fera dès l'obtention de l'AMM. Cette mesure pourrait rapporter quelque 20 millions selon le plan du gouvernement. D'autant que de nombreuses molécules, importantes, vont devenir généricables dans les prochains mois. Enfin, le gouvernement compte accroître le nombre de groupes génériques concernés par le tarif forfaitaire de remboursement (TFR), qui consiste à fixer un taux unique de remboursement par groupe générique, quel que soit le prix du médicament.

 

Un dossier de la rédaction

 

Les autres mesures financières

 

Pour " stabiliser " le déficit de la Sécurité sociale, le gouvernement va tenter de contenir les dépenses et table essentiellement, du côté des recettes, sur la hausse du produit des taxes sur le tabac, qui doit lui rapporter 800 millions d'euros. Beaucoup moins lucratives : la modification de la taxe sur la publicité des produits de santé (150 millions, voir plus haut) et l'efficacité accrue du recours contre un tiers de l'assurance-maladie en cas d'accident (100 millions) - le gouvernement souhaite notamment déterminer par décret les conditions dans lesquelles les victimes, les établissements et les assureurs doivent informer les caisses de la survenue d'accidents causés par un tiers. Par ailleurs, le PLFSS 2004 fait, comme prévu, disparaître le FOREC (Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de Sécurité sociale, qui compense les allègements de charges consentis aux entreprises dans le cadre des 35 heures), éponge sa dette, et transfère ses futures charges au budget de l'Etat.

 

Le déficit du régime général et la préparation du PLFSS 2004

 

Mattei veut réduire la croissance des volumes d’actes et de prescriptions

 

La pente est forte mais le gouvernement ne perd pas pied. C’est en substance ce que Jean-François Mattei a expliqué après avoir eu la confirmation du déficit catastrophique du régime général de la Sécurité sociale attendu en 2003. Entre volontarisme et méthode Coué, le ministre de la Santé s’est efforcé de montrer qu’il tenait bon la barre et qu’il ferait tout pour éviter une nouvelle aggravation de la situation l’année prochaine. Parce que la Sécu " est au cœur de notre contrat social ". Marqué par " la clarification et l’ambition ", le projet de financement (PLFSS) pour 2004, dont Jean-François Mattei a dévoilé les grands axes, avant de le présenter en conseil des ministres le 8 octobre, ne vise en effet qu’à contenir l’hémorragie. " Nous faisons tout ce qu’il est possible de faire pour stabiliser le déficit ", s’est défendu Jean-François Mattei, déjà accusé par la gauche d’" impéritie " et de " laxisme ". La réforme structurelle permettant de " rééquilibrer les comptes sociaux " ne sera adoptée qu’à l’automne prochain, comme l’a annoncé Jean-Pierre Raffarin lors des journées parlementaires de l’UMP.

 

ONDAM : + 4 %

 

Jean-François Mattei s’est toutefois fixé " un devoir prioritaire " : la mise en œuvre des outils de la maîtrise médicalisée. Avec un objectif ambitieux même s’il n’est pas opposable au médecin : réduire la croissance des soins de ville de " 800 millions d’euros " dès 2004. Ce qui supposera une diminution de la hausse des volumes d’actes et des prescriptions. Dans cet esprit, le gouvernement a fixé un objectif national des dépenses d’assurance- maladie (ONDAM 2004) en augmentation de seulement 4 % par rapport aux dépenses 2003. C’est largement en deçà du rythme d’évolution actuel des dépenses (proches de 6 %). Cet effort de régulation se fera " avec l’adhésion du corps médical ". Confiant, le ministre a rappelé qu’il y avait déjà " trois exemples qui marchent " : les visites, les génériques et les antibiotiques. Le ministre voit aussi dans la publication du RCM et dans l’adhésion du SML à la convention généraliste des " signes d’espoir ". Le PLFSS prévoit plusieurs mesures pour que cette maîtrise médicalisée porte ses fruits : la simplification du dispositif des accords de bon usage des soins (AcBUS), un meilleur contrôle des admissions en ALD et des arrêts de travail ou encore l’expérimentation du dossier médical partagé " dans quatre régions dès 2004 ". Plus audacieux : en matière de gestion du risque, le projet de loi prévoit de déléguer à des groupements de médecins libéraux certaines compétences des unions régionales des caisses d’assurance- maladie (URCAM). Les assurés feront un effort non négligeable avec la réévaluation du forfait hospitalier et, comme toujours dans cet exercice, les laboratoires sont mis à contribution avec la hausse de la taxe sur la promotion pharmaceutique. Quant à la mise en place de la tarification à l’activité à l’hôpital, c’est, selon le ministre, " une révolution copernicienne ". Une autre expression pour tenter de convaincre que ce PLFSS ne se contente pas de colmater les brèches.

 

Cyrille DUPUIS

 

 

 

M. Mattei fait le choix de laisser

l'assurance-maladie en déficit de 11 milliards d'euros en 2004

 

Parmi les mesures prévues dans le PLFSS figurent l'augmentation des prix du tabac, la hausse du forfait hospitalier et la révision des prises en charge à 100 %

 

Le ministre de la santé avait raison de dire que le déficit du régime général en 2004 serait "abyssal" : il est fixé 11,2 milliards d'euros. Mais il a eu tort de présenter, mardi 23 septembre, son projet de loi de financement de la Sécurité sociale comme un PLFSS de "stabilisation" des comptes : il n'en est rien. Pour la seconde année consécutive, le gouvernement n'a pas réussi à colmater les brèches, malgré l'annonce d'une série de mesures portant sur 3,1 milliards d'euros (hausse des prix du tabac, du forfait hospitalier, etc.). Il laisse donc se dégrader la situation financière de la sécurité sociale.

 

A la fin de l'année 2003, le régime général (maladie, accidents du travail, vieillesse, famille) sera déficitaire de 8,9 milliards d'euros. En l'absence de mesures correctrices, ce "trou" se creuserait à 13,6 milliards d'euros en 2004. Le PLFSS 2004 le limite à 11,2 milliards d'euros. Mais, contrairement aux affirmations du ministre, le déficit de l'assurance-maladie n'est même pas contenu : il passera de 10,6 milliards en 2003 à 10,94 en 2004.

 

"L'importance des déficits et le rythme auquel ils se creusent créent des risques importants : celui d'une dérive financière et d'une perte durable de la maîtrise du système ; celui aussi d'être contraint, si d'autres solutions n'étaient pas rapidement mises en œuvre, à des hausses de prélèvements qui seraient d'autant plus massives qu'elles seraient différées ", avertit le secrétaire général de la commission des comptes François Monier, qui en appelle à des "actions structurelles".

 

On en est loin aujourd'hui. Qualifié par M. Mattei de "première étape du nécessaire retour à l'équilibre des comptes de l'assurance-maladie", - fixé "à l'horizon de la législature" - le PLFSS 2004 ne comporte aucune réelle mesure de régulation du système. Tout juste contribue-t-il à une certaine clarification des relations entre l'Etat et la Sécurité sociale en supprimant le fonds (FOREC) mis en place par le gouvernement Jospin pour financer les 35 heures.

 

Les recettes supplémentaires que M. Mattei a trouvées portent sur un montant légèrement supérieur à un milliard d'euros. Elles proviennent d'abord d'un nouvel alourdissement de la fiscalité sur le tabac, qui sera "intégralement affecté à la Sécurité sociale". Les pouvoirs publics en attendent 800 millions d'euros de recettes. A cela s'ajoute une modification de la taxe sur la publicité des produits de santé (+ 150 millions d'euros) et une efficacité accrue du recours contre tiers (+100 millions d'euros) qui permet à l'assurance-maladie de mieux "responsabiliser" les responsables d'accidents et leurs assureurs.

 

DÉVELOPPER LES GÉNÉRIQUES

 

Les mesures d'économies s'élèvent à 1,8 milliard d'euros. Si le ministre de la santé estime qu'elles sont réparties de manière "équilibrée" entre les différentes acteurs concernés, force est de constater qu'elles concernent surtout les assurés. Ainsi, le forfait hospitalier, gelé depuis 1996, passera de 10,67 à 13 euros par jour, sauf pour les séjours psychiatriques (où il tombera à 9 euros). L'économie est estimée à 180 millions d'euros pour l'ensemble des régimes de Sécurité sociale.

 

Dans le domaine du médicament, le ministre de la santé veut poursuivre, en 2004, la politique qu'il a engagée depuis dix-huit mois. Sont ainsi prévus le déremboursement d'une deuxième vague de médicaments à services médical rendu (SMR) insuffisant, la diminution du taux de remboursement des soins homéopathiques (de 65 % à 35 %) et le développement des génériques. Avec la baisse de la marge des grossistes répartiteurs, l'ensemble de ces mesures rapporterait quelque 250 millions d'euros.

 

Le ministre de la santé a précisé qu'il attendait beaucoup de la maîtrise médicalisée des dépenses de soins de ville, citant en exemple la "diminution relative " du nombre des visites de médecins généralistes depuis la revalorisation de leurs honoraires en juin 2002, ainsi que les accords de bon usage des soins, comme celui sur les antibiotiques.

 

Confronté à un net accroissement des prises en charge à 100 %, le gouvernement a décidé de limiter les exonérations totales de ticket modérateur aux actes les plus coûteux. Il en espère 500 millions d'économies. De même, les patients en affection de longue durée (ALD) ne seront pris en charge à 100 % que pour les actes et les prestations spécifiés dans un protocole de soins. Comme prévu, les indemnités journalières sont placées sous haute surveillance. Pour le reste, M. Mattei a confirmé que la réforme de l'assurance- maladie prendrait neuf mois et passerait pas trois étapes : le diagnostic partagé, la concertation et la négociation. Et annoncé que Bertrand Fragonard, président de chambre à la Cour des comptes, et ex-directeur de la CNAM, présiderait le haut conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie.

 

Claire Guélaud

 

 

 

Le Parti socialiste dénonce "l'irresponsabilité" du gouvernement sur la "Sécu"

 

M. Madelin (DL) prône "un peu de concurrence"

 

Les mesures d'économies annoncées, mardi 23 septembre, par le ministre de la santé, Jean-François Mattei, pour résorber une petite partie du déficit de la Sécurité sociale, n'ont convaincu ni la gauche ni les partenaires sociaux. Le PS a réagi dans un communiqué publié, mardi, à l'issue de son bureau national. Il y dénonce "l'irresponsabilité" du gouvernement. "Face à la gravité de la situation, juge le PS, le gouvernement se contente de mesures qui touchent les seuls patients" et qui "vont peser sur les catégories moyennes". Mercredi matin, sur Europe 1, Alain Madelin a, pour sa part, proposé l'introduction "d'un peu de concurrence" dans le système de l'assurance-maladie, regrettant que "l'on ait perdu des années et des années sur ce dossier".

 

L'Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) regrette que les mesures "frappent les plus démunis", qui ne bénéficient pas d'une complémentaire santé. "L'augmentation de 21,8 % du forfait journalier et la diminution du taux de remboursement des médicaments homéopathiques constituent un transfert de charges vers les mutuelles", estime l'UNSA, pour qui "rien ne justifie un tel gouffre financier". Le président de la Mutualité française, Jean-Pierre Davant, dénonce, lui aussi, "un nouveau transfert des charges vers les mutuelles" et des mesures qui, selon lui, "ne peuvent que stabiliser les déficits. Pour la CGT, "il y a vraiment urgence à prendre des mesures nécessaires pour apporter des ressources pérennes au régime général".

 

"ABSURDE"

 

Le Syndicat national des médecins homéopathes français (SNMHF), dans un communiqué, condamne la décision du gouvernement de ramener de 65 % à 35 % le taux de remboursement des médicaments homéopathiques. "C'est une mesure économiquement absurde, socialement injuste et éthiquement condamnable", écrit le syndicat, avant de rappeler que l'homéopathie ne représente que 0,8 % de l'ensemble des remboursements pharmaceutiques à la charge de l'assurance-maladie et que le déremboursement va "conduire à un transfert vers des produits allopathiques plus chers et mieux remboursés".

 

55,5 milliards d'euros manqueront au budget de l'Etat

 

La fraude à la redevance TV davantage poursuivie

 

De record en record, le gouvernement se prépare à une année 2004 financièrement désastreuse. Après l'annonce du déficit "abyssal" des comptes sociaux, le projet de loi de finances pour 2004, qui sera présenté en conseil des ministres jeudi 25 septembre, devrait indiquer que le budget de l'Etat plonge dans le rouge à hauteur de 55,5 milliards d'euros. Un montant record, ne marquant pas d'amélioration par rapport au déficit de 2003. Entre l'Etat et la "Sécu", le besoin de financement supplémentaire atteindra 66,7 milliards d'euros (437,5 milliards de francs). Heureusement pour le gouvernement, les taux d'intérêt européens sont à un niveau historiquement bas. Surtout, l'adoption de la monnaie unique en Europe protège la France du risque de change. L'euro caracole à 1,145 dollar.

 

3,7 % DU PIB

 

A lui seul, le déficit de l'Etat pèse 3,7 % du produit intérieur brut. La dernière fois que la France s'est approchée de ce seuil et l'a dépassé (de 1992 à 1996), elle a dû affronter plusieurs crises de change. La situation a toutefois évolué. "Ces crise pesaient surtout sur la parité d'échange entre le mark et le franc, ou d'autres devises européennes. Or, aujourd'hui, l'Allemagne n'est plus le bon élève de la classe. Quant aux Etats-Unis, ils affichent des déficits encore plus élevés", plaide Christian de Boissieu, président du Conseil d'analyse économique.

 

Malgré le poids de ce déficit et de celui des comptes sociaux, le premier ministre et le ministre de l'économie ont annoncé que le solde des comptes publics présenté à Bruxelles serait inférieur à 3,7 %. Comment y arrivent-ils ? Outre les retraitements nécessaires pour passer de la comptabilité budgétaire à la comptabilité nationale, deux autres facteurs entrent dans le calcul de ce chiffre de 3,7 % : le solde des "organismes divers d'administration centrales", les ODAC (structures de défaisance, Cades, fonds de réserve des retraites, offices agricoles, établissements publics administratifs de l'Etat...), et surtout celui des administrations locales, qui doivent donc être largement positifs. Dans l'entourage du député PS Didier Migaud, certains s'interrogent sur les risques de hausse des impôts locaux.

 

Malgré cette situation, le gouvernement n'a pas renoncé à la baisse de la TVA sur la restauration, si cette mesure obtient, ce qui n'est pas encore certain, l'approbation, à l'unanimité, du conseil des ministres des finances européens. Un article dans le projet de loi de finances prévoit que l'Etat mette cette mesure en œuvre quatre mois après l'entrée en vigueur de la directive européenne. Pour Bercy, il est peu probable que cela pèse sur le budget 2004.

 

Le projet de loi de finances comprend aussi, selon Les Echos et Le Figaro du 24 septembre, une disposition permettant à l'Etat de consulter les fichiers d'abonnés des diffuseurs et distributeurs de services payants par câble et satellite pour améliorer le recouvrement de la redevance pour la télévision (116, 50 euros). Selon ces quotidiens, l'Etat pourra réclamer jusqu'à dix ans d'arriérés aux fraudeurs.

 

Sophie Fay

 

La mission parlementaire sur la canicule relève "de réels dysfonctionnements et insuffisances"

 

François Fillon, ministre des affaires sociales, propose, de son côté, de financer l'aide aux personnes âgées par la suppression d'un jour férié et une taxation "des revenus du capital"

 

Pas de réquisitoire. Pas de phrases définitives. Même si "toute crise doit conduire à identifier les responsabilités", la mission parlementaire d'information "sur la crise sanitaire et sociale déclenchée par la canicule", mise en place le 26 août, n'a pas voulu céder "à la tentation de désigner à la hâte des boucs émissaires". "Le problème est trop grave et complexe pour prétendre tirer dès maintenant et de façon définitive l'ensemble des enseignements qu'appelle la crise", a expliqué Denis Jacquat, le président (UMP, Moselle) de cette mission, en présentant son rapport à la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, mercredi 24 septembre.

 

Le même jour, François Fillon, le ministre des affaires sociales, a annoncé, dans un entretien au Parisien, la mise en place " avant la fin de l'année, d'un système d'alerte susceptible de veiller et aider les personnes âgées", chez qui la surmortalité a été estimée à 15 000 personnes cet été. Il a ajouté que le financement des dépenses de prise en charge des personnes âgées passera par la suppression d'un jour férié, mais sera aussi accompagnée d' "un effort de solidarité" de la part des "revenus du capital".

 

Le président de la mission d'information, tout en estimant que "notre système sanitaire a su faire face", confirme que la crise survenue durant la première quinzaine d'août - "une catastrophe naturelle" - a mis en exergue "de réels dysfonctionnements et insuffisances". La mission reprend à son compte le fait qu'elle "n'a été ni anticipé, ni détecté très rapidement".

 

"Ou plutôt, est-il précisé dans le rapport, si ce drame a été assez vite détecté, il n'a pas été perçu immédiatement par la plupart des responsables administratifs comme une crise majeure." A l'image du rapport rédigé pour le gouvernement par l'inspectrice générale des affaires sociales, Françoise Lalande, la mission pointe les responsabilités de la Direction générale de la santé (DSGS) et de l'Institut de veille sanitaire (INVS).

 

"L'INVS s'est mobilisé plutôt mollement", indique le rapport, qui ajoute que "le jugement émis par Mme Lalande, selon lequel l'INVS n'a pas joué -pleinement le rôle que la loi lui a confié'' n'est pas infirmé par les travaux de la mission". La DGS "ne s'est pas mobilisée lourdement" sur les messages de prévention estime d'autre part la mission, qui rappelle que des "éléments concordants" d'alerte sont "remontés dès le 6 et 7 août".

 

Sont également pointés, mais sans plus, "des dysfonctionnements dans les remontées d'information et les communications entre administrations centrales de la santé et avec le cabinet" du ministre de la Santé, Jean-François Mattei. Notamment, le 11 août, quand ce dernier est intervenu à la télévision pour relativiser la crise.

 

MOBILISATION "TARDIVE"

 

La mobilisation "de la hiérarchie des services chargés de la sécurité civile" est par ailleurs qualifiée de "tardive". La mission relève que le Centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (COGIC) "ne s'est guère senti concerné".

 

Le système hospitalier - particulièrement les urgences - a, en revanche, "su répondre à la crise", juge la mission, qui "n'a pas le sentiment" que la profession des médecins généralistes "ait failli à sa mission". "Même si certaines défaillances individuelles sont indéniables", pondère-t-elle.

 

Le rapport de la mission esquisse "35 pistes de réflexion". Au sujet des systèmes d'alerte, elle propose que le dispositif de Météo-France pour les grands froids trouve un "symétrique" pour les grandes chaleurs, ou qu'une "centralisation informatique en temps réel" des prises en charge des victimes par les SAMU, pompiers et hôpitaux soit mise en place. Elle plaide pour une transmission informatisée des certificats de décès pour "un suivi au jour le jour".

 

Côté médical, la mission "encourage" la "mise en place d'un service minimum entre représentants des médecins libéraux, SAMU et services des urgences". Elle incite à tenir compte du vieillissement de la population dans les politiques de formation et de prévention (mises en garde relatives à la chaleur sur les médicaments). L'existence d'"au moins une pièce" climatisée dans "l'ensemble des établissements" est présentée comme un "impératif" pour les maisons de retraite. La mission juge estime aussi "prioritaire de renforcer la présence de personnels soignants, en particulier la nuit".

 

Le rapport pousse enfin à des "analyses complémentaires" sur la crise : populations touchées, facteurs aggravants potentiels (pollution, médicaments), influence des facteurs sociaux. "Ces points justifient une commission d'enquête", insiste la mission.

 

La création de cette instance a reçu le feu vert de la commission des affaires sociales de l'Assemblée, mercredi 24 septembre. Elle devra encore être approuvée en séance publique par les députés, sans doute le 7 octobre.

 

Philippe Le Cœur

 

 

 

Assurance-maladie : l'autopsie d'une faillite

Claire Guélaud, Le Monde

 

Le rapport annuel de la Cour des comptes détaille les causes de l'augmentation des dépenses de santé (+ 7,2 %) en 2002 et juge invraisemblable l'équilibre en 2006. La commission des comptes de la Sécurité sociale doit annoncer le 23 septembre un déficit estimé à 10 milliards d'euros

 

La COUR DES COMPTES a rendu public, jeudi 18 septembre, son rapport annuel consacré à l'application de la loi de financement de la Sécurité sociale. Pour la Cour, l'année 2002 marque un tournant. Alors que la SÉCURITÉ SOCIALEavait contribué à la réduction du déficit public, elle a concouru, en 2002, à sa dégradation à hauteur de 0,3 % du PIB. Ce rapport détaille les causes de l'emballement des dépenses de santé. Pour la Cour, elle s'explique par la croissance des soins de ville, la HAUSSE DES PRESCRIPTIONS, l'accroissement du nombre de personnes en affection de longue durée, la forte hausse des indemnités journalières et la revalorisation des honoraires des médecins généralistes. De son côté, le gouvernement a décidé d'augmenter le FORFAIT HOSPITALIER, dont le montant est actuellement de 10,67 euros.

 

Un réquisitoire . C'est ce que vient de dresser la Cour des comptes dans son rapport annuel, qui devait être rendu public, jeudi 18 septembre à Paris. Dans ce texte, le sixième du genre consacré à l'application de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS), les magistrats examinent à la loupe le déficit 2002 et font un bilan sans concession de l'emballement des dépenses d'assurance-maladie depuis 1996. Etrillant au passage, sans les nommer, le gouvernement de Lionel Jospin, celui de Jean-Pierre Raffarin et les gestionnaires des caisses nationales d'assurance-maladie, CNAM en tête.

 

A moins d'une semaine de la réunion, mardi 23 septembre, de la commission des comptes de la "Sécu", au cours de laquelle seront présentés le niveau, probablement, historique du déficit 2003 (autour de 10 milliards) et les grandes lignes du projet de loi de financement (PLFFS) pour 2004, la Cour des comptes démonte, avec une incisive sobriété, les causes du "décrochage" des dépenses constaté depuis 2000 et accentué en 2002. Son analyse, qui aboutit à un constat de faillite du système de régulation, sonne comme un avertissement lancé au ministre de la santé, Jean-François Mattei, et, au-delà, à l'ensemble du gouvernement.

 

RETOURNEMENT CONJONCTUREL

 

Pour la Cour, l'année 2002 constitue un tournant. Entre 1999 et 2001, fait-elle valoir, la Sécurité sociale avait contribué à la réduction du déficit public. En 2002, elle a concouru à sa dégradation, à hauteur de 0,3 point de PIB. Le déficit du régime général atteint 3,4 milliards d'euros. Sous l'effet du retournement conjoncturel, les recettes ont commencé à fondre, tandis que les dépenses continuaient à progresser à un rythme soutenu. Un phénomène de ciseau classique. Mais, du fait de la poursuite du ralentissement, les magistrats n'imaginent pas de retour rapide à l'équilibre, un objectif "qui ne sera très vraisemblablement pas atteint à l'horizon 2006". Un an de suspension des remboursements des consultations - une hypothèse évidemment absurde - ne permettrait pas de sortir la Sécurité sociale du rouge, pointent-ils en privé.

 

Les dépenses des régimes de base de la Sécurité sociale se sont élevées à 316,9 milliards d'euros en 2002, après 300 milliards en 2001, soit une progression de 5,6 %. Bon an mal an, elles représentent un cinquième de la richesse nationale depuis 1997. Cette stabilisation relative résulte de la progression moins forte des moyens consacrés à la politique familiale. En 2002, les dépenses de la branche famille et de la branche vieillesse ont augmenté de quelque 4 %, tandis que celles de l'assurance-maladie s'envolaient (+ 7 ,2 %). Cette branche, qui était déficitaire de 6,4 milliards d'euros en 2002 et probablement de 11 milliards en 2003, est dans le rouge depuis dix ans. Et elle concentre l'essentiel du déficit.

 

Signe de la gravité de la situation, les dépenses ont, depuis 1997, systématiquement dépassé l'objectif prévu, "d'abord de façon modérée, de l'ordre de 1,5 à 2 milliards d'euros les premières années, puis à partir de 2001 de façon plus importante : dépassement de 2,9 milliards d'euros en 2001 et de 4,9 milliards en 2002". Les dépassements cumulés représentent 15 milliards d'euros, dont près de 13 sont imputables à la seule assurance-maladie.

 

Pour 2002, l'objectif national des dépenses d'assurance-maladie (Ondam) avait été fixé à 112,8 milliards d'euros. Il s'est finalement élevé à 116,7 milliards d'euros. Ce dépassement de 3,9 milliards est le plus élevé jamais enregistré. Quant à la hausse des dépenses (+ 7, 2 %), la plus forte depuis 1997, elle s'explique par un emballement général, très marqué pour les deux principales enveloppes de l'Ondam : les soins de ville (+ 7,9 %) et les établissements (+ 6,3 %).

 

REVALORISATION DES HONORAIRES

 

La Cour explique la croissance des soins de ville par l'augmentation du volume des prescriptions. A eux seuls, les établissements hospitaliers sont à l'origine de près d'un quart des remboursements. Le poste le plus concerné est le médicament (19,3 milliards d'euros présentés au remboursement en 2002). L'écart entre le taux de croissance de la prescription libérale et celui de la prescription hospitalière a dépassé les 10 points en 2002.

 

Circonstance aggravante, le taux de remboursement des soins de ville dépasse désormais 82 %. Cette évolution semble due, en grande partie, à l'accroissement récent du nombre de personnes en affection de longue durée (ALD). Plus de 5,7 millions de personnes ont été prises en charge à 100 % dans ce cadre, et 900 000 nouveaux bénéficiaires ont été recensés en 2001. La création d'un tarif de visite à domicile majoré pour les patients en ALD âgés de plus de 75 ans semble avoir incité les médecins à recourir davantage à ce dispositif, très inflationniste.

 

Les indemnités journalières connaissent, elles aussi, une forte accélération depuis cinq ans. Mais la progression de 2002 (+ 11 %) a battu des records. Cette évolution s'accompagne d'une concentration des arrêts de travail sur les 55-59 ans, accréditant l'idée qu'un nombre important d'entreprises se servent des "IJ" comme d'une préretraite...

 

A ces tendances de fond s'ajoute le cumul de décisions exceptionnelles. Les protocoles hospitaliers de 2002 et 2001 et le financement de l'aménagement et de la réduction du temps de travail (ARTT) ont majoré l'Ondam de 3,4 milliards d'euros par rapport à 1999, remarquent les magistrats.

 

La revalorisation des honoraires des médecins généralistes, qui ont vu le tarif de leur consultation passer à 20 euros en juin 2002, a coûté 690 millions d'euros en année pleine, alors que le ministère de la santé a toujours présenté l'accord comme autofinancé grâce au développement des prescriptions de génériques (70 millions de dépenses en moins). Ce chiffrage tombe à point nommé alors que le gouvernement s'apprête à revaloriser les honoraires des spécialistes cliniciens inscrits en secteur 1. En année pleine, il en coûtera quelque 66 millions d'euros supplémentaires à une branche maladie exsangue.

 

La Cour des comptes relève aussi que, dès le départ, le respect de l'objectif 2002 était peu vraisemblable. Elle déplore l'absence de collectif social et pense que l'Ondam, conçu pour être un outil de suivi et de régulation, est devenu illisible et inefficace. Le moins que l'on puisse dire est que la situation ne s'est pas améliorée en 2003.

 

 

L'impact du vieillissement de la population

 

Plus de 2,1 millions de personnes ont, aujourd'hui, 80 ans ou plus. Elles seront près de 8 millions en 2050. Or c'est dans cette tranche d'âge qu'un seuil est franchi, avec le développement de polypathologies. Dans la troisième partie de son rapport, la Cour des comptes s'est donc intéressée aux effets du vieillissement sur les dépenses d'assurance-maladie, au cœur de la création éventuelle d'un cinquième risque de la Sécurité sociale (la dépendance). Si les magistrats ne tranchent pas la question, ils éclairent les termes du débat. Les 65 ans et plus représentent 16 % de la population, mais 36,5 % des dépenses remboursées par l'assurance-maladie et 39 % de la consommation de médicaments. Dans cette tranche d'âge, la dépense annuelle de produits pharmaceutiques est de 850 euros, contre 230 euros pour les moins de 65 ans. Les personnes âgées surconsomment des médicaments à l'effet incertain et s'exposent à de sérieux risques d'interactions. La Cour des comptes invite les praticiens à modifier leurs habitudes de prescription et les pouvoirs publics à développer des actions de prévention ciblées.

 

 

Le gouvernement va augmenter le forfait hospitalier, gelé depuis 1996

 

Après huit ans de gel, le forfait journalier payé par la plupart des malades hospitalisés (10,67 euros par jour actuellement) augmentera l'année prochaine. Inscrite dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2004, cette hausse sera officiellement annoncée, mardi 23 septembre, par le ministre de la santé, Jean-François Mattei, lors de la réunion de la commission des comptes de la "Sécu". "Il y aura augmentation, car il n'a pas été réévalué depuis 1996" (dans le cadre du plan Juppé de redressement des comptes de la protection sociale), indiquait, jeudi, l'entourage de M. Mattei. Cette mesure s'inscrit dans le cadre d'un plan de 4 à 5 milliards d'euros d'économies et recettes nouvelles destinées à stabiliser à 10 milliards d'euros le déficit de l'assurance-maladie en 2004.

 

Cette revalorisation du forfait journalier - créé par le ministre des affaires sociales Pierre Bérégovoy, en 1983 - sera "de l'ordre de la hausse du coût de la vie depuis 1996", a précisé le ministère de la santé. Celle-ci a été de quelque 10 % entre 1996 et la fin de 2003. Un produit qui valait 100 francs cette année-là en vaut aujourd'hui 110. Le montant du forfait journalier devrait logiquement approcher des 12 euros au 1er janvier 2004.

 

La hausse de ce forfait est une mesure classique des plans de redressements de l'assurance-maladie, de M. Bérégovoy en 1983 à M. Mattei en 2003. En 1987, il ne coûtait que 23 francs (soit 3,51 euros) aux malades hospitalisés. Il était passé à 33 francs (5,03 euros) en 1991, puis à 55 francs (8,38 euros) en 1993 et à 70 francs en 1996, soit une hausse de 27 % en trois ans. L'augmentation de ce forfait, qui permet de financer les dépenses hôtelières des hôpitaux publics et des cliniques privées (repas, blanchisserie...), a toujours été dénoncée par plusieurs syndicats, notamment la CGT.

 

Un certain nombre de malades en sont toutefois exonérés : les femmes qui accouchent, les victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles, les handicapés âgés de moins de 20 ans, les bénéficiaires de la couverture maladie universelle (CMU) et les titulaires de l'Aide médicale d'Etat (AME).

 

Le PS a immédiatement contesté cette décision. "Alors que le gouvernement ne parle que de baisse de la fiscalité, c'est un impôt nouveau sur les ménages", dénonce Alain Claeys, secrétaire national chargé de la santé. Cette mesure est prise en absence de toute réforme de structure de l'assurance-maladie. Et elle est profondément inégalitaire : toutes les personnes exclues de la CMU parce qu'elles ont des revenus légèrement supérieurs au seuil retenu seront lourdement pénalisées, car elles n'ont bien souvent pas de mutuelle qui rembourse ce forfait".

 

Jean-Michel Bezat

 

 

Le rapport de la Cour des comptes sur la Sécu

Dépenses : l'incroyable faillite des mécanismes de régulation

 

Le sixième rapport de la Cour des comptes sur la Sécurité sociale dresse un bilan accablant de la régulation des dépenses d'assurance-maladie depuis 1996. Tous les mécanismes de maîtrise ont failli, contribuant à porter le déficit de la branche à un niveau " jamais atteint ": 6,1 milliards d'euros en 2002, plus de 11 milliards en 2003. Le rapport épingle autant les outils comptables du passé que les mesures sur le médicament, la politique conventionnelle, la gestion du risque par l'assurance-maladie ou l'action sur les comportements. Rien n'a été concluant pour infléchir l'évolution des dépenses.

 

Le sixième rapport de la Cour des comptes sur la Sécurité sociale que François Logerot, premier président, a rendu public hier, révèle la déficience quasi systématique des mécanismes de régulation des dépenses d'assurance-maladie depuis 1996.

 

Le tableau n'épargne ni les instruments d'encadrement financier (maîtrise dite " comptable " honnie par la profession médicale), ni la politique conventionnelle avec les libéraux, ni la gestion du risque par les caisses, ni les outils tentant d'agir sur les comportements des patients ou des prescripteurs, ni la politique du médicament. Une faillite globale qui, conjuguée au ralentissement des recettes depuis 2002, a contribué aux déficits vertigineux que l'assurance-maladie accuse aujourd'hui : 6,1 milliards d'euros en 2002 et vraisemblablement " plus de 11 milliards en 2003 ".

 

Conflits permanents

 

Les divers mécanismes d'encadrement financier par le biais de sanctions collectives et individuelles (reversements, lettres clés flottantes, objectifs de dépenses déléguées...), en place jusqu'à la loi de financement de 2001, ont totalement échoué. " Aucun de ces systèmes n'a pu fonctionner, en raison soit de problèmes juridiques, soit d'impossibilités techniques (...) ", analysent les magistrats de la rue Cambon. Il est vrai que le Conseil constitutionnel et le Conseil d'Etat ont beaucoup censuré à l'époque, grâce aux recours opiniâtres des syndicats... La gestion du risque maladie par les caisses n'a que très faiblement progressé. " Alors que 5 % des assurés occasionnent 60 % des remboursements du régime général, leurs caractéristiques n'ont pas été étudiées de manière à déterminer si des mesures correctrices pouvaient être prises ", regrette le rapport, qui critique " le défaut de connaissance patent " en matière d'indemnités journalières, de transports sanitaires ou d'ALD. En 2003, les pouvoirs semblent toutefois avoir pris conscience de la nécessité de s'attaquer à ces postes de dépenses très dynamiques. La politique du médicament ? " Les quantités consommées par habitant sont parmi les plus élevées au monde ", rappelle la Cour, qui juge que des " objectifs contradictoires " sont poursuivis simultanément (réseau de distribution dense et préservé, protection contre l'importation parallèle, taux moyen de remboursement élevé, nombre élevé de présentations admises au remboursement...).

La politique conventionnelle avec les professions de santé libérales, " enserrée dans un faisceau de contraintes juridiques et pratiques " a montré également ses limites pour réguler les dépenses de ville. " Alors même que la plupart des professions, à l'exception des spécialistes, étaient sous convention depuis la fin des années 1990, le rythme des dépenses s'est fortement accéléré ", constate la Cour. De fait, presque toutes les conventions ont été attaquées, et souvent partiellement annulées, en raison des conflits permanents entre l'assurance-maladie et les syndicats non signataires. Les difficultés de l'option médecin référent (6 181 médecins fin 2001, 6 372 fin 2002, soit 10 % des généralistes) ou de la démarche de soins infirmiers (DSI) sont une autre illustration de ces blocages. Récemment encore, alors que la loi du 6 mars 2002 avait rénové l'architecture des conventions en prévoyant la signature d'un accord-cadre interprofessionnel (ACIP), la démarche " a buté sur le refus de certains syndicats médicaux que l'accord-cadre soit conclu avant leur propre convention ".

Quant aux négociations sur les honoraires, chapitre le plus sensible de la vie conventionnelle, la Cour des comptes estime sans fard qu'" elles se déroulent sans repères clairs ". Ainsi, la CNAM ne ferait pas de comparaison entre les revenus des libéraux et ceux d'autres catégories, elle maîtriserait mal certains " effets de nomenclature " ou ne connaîtrait pas le total des rémunérations qu'elle verse " indépendamment des honoraires " (prise en charge partielle des cotisations sociales, aides à la formation, paiement des astreintes, rémunérations liées aux réseaux...). Bref, la caisse serait un assez piètre gestionnaire.

 

Evaluation des pratiques : montée en charge poussive

 

Les mécanismes de régulation à moyen terme, qui visent à infléchir certains comportements abusifs, n'ont pas encore fait leurs preuves, même si la dynamique est souvent intéressante, relève le rapport. L'évaluation des pratiques professionnelles démarre, mais très lentement. En mars 2003, 180 médecins libéraux s'étaient portés volontaires pour se soumettre à une évaluation individuelle ou collective ", note la Cour. La certification des pratiques médicales " n'en est qu'à ses balbutiements ". Les références médicales opposables, issues de la convention de 1993, qui visent à éliminer soins dangereux et prescriptions inutiles ? Depuis 1999, " les RMO demeurent en théorie opposables, mais leur non-respect n'est pas sanctionné ". Pire, qu'il s'agisse de références médicales ou de référentiels de pratique, " l'assurance-maladie a peu fait appel à l'ANAES (Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé) ces dernières années, sauf dans la période la plus récente ". Une note encourageante : le développement d'accords de bon usage des soins (AcBUS). Mais là encore, le rapport considère que leur champ " ne recouvre pas celui des sources actuelles de dérive des dépenses ". Last but not least, la formation médicale continue (FMC) fait l'objet d'un sous-chapitre, très critique, que la Cour résume en une phrase (trop ?) lapidaire. " Une histoire tourmentée a abouti à une coexistence de divers systèmes, dont aucun n'a aujourd'hui de dimension significative ". Les milliers de médecins libéraux qui se forment régulièrement, au-delà des péripéties légales et conventionnelles, apprécieront.

 

Cyrille DUPUIS

 

2002 : le dérapage général

 

Selon le rapport, les dépenses d'assurance-maladie en 2002 " ont en pratique évolué hors de tout cadre de régulation ". Du coup, le dépassement de l'Objectif national d'assurance-maladie (ONDAM) a été le plus important depuis l'origine (1997). Arrêté à 112,8 milliards d'euros par la loi de financement, l'objectif a été exécuté à 116,7 milliards, soit un dépassement de 3,9 milliards. Si cette dégradation exceptionnelle a plusieurs causes (tous les secteurs de soins ont contribué au décrochage), les dépenses de soins de ville ont augmenté plus vite que celles des établissements sanitaires. " Elles ont représenté plus de 77 % du dépassement total de l'ONDAM ", précise le rapport. Pour l'assurance-maladie, le seul coût des revalorisations tarifaires pour les infirmières, les laboratoires d'analyses médicales et surtout les généralistes (en janvier, puis en juin) a été de 780 millions d'euros en 2002 (1,1 milliard en année pleine). Le poste des IJ a aussi bondi de 14,1 % en 2002 (1 milliard d'euros supplémentaire). Les dépenses de médicaments ont progressé de 6,9 %. Mais d'autres décisions " prises en cours d'exécution " par les pouvoirs publics auraient dû, selon les magistrats, conduire à une révision de l'objectif, comme la forte revalorisation des tarifs des cliniques (+ 3,93 %), les dispositions pour tirer les conséquences de la RTT dans les établissements publics (400 millions d'euros pour le compte-épargne temps) ou pour faire face aux insuffisances de financement des hôpitaux (300 millions).

 

 

 

Un sondage " le Quotidien du Médecin "-CSA

Pour les Français, les médecins libéraux ne sont pas responsables de la catastrophe sanitaire

 

Les médecins libéraux seront satisfaits d'apprendre que seulement 7 % des personnes interrogées par l'institut de sondage CSA (1) pour " le Quotidien du Médecin " les mettent directement en cause dans le drame de la canicule et les tiennent pour responsables de l'augmentation des décès, notamment des personnes âgées, au cours de l'été. Une majorité relative dénonce d'abord le système de santé et son manque de moyens.

 

Les accusations portées par le rapport Lalande contre les médecins libéraux, dont un grand nombre, selon ce document, auraient été absents cet été, ce qui aurait contribué largement à accentuer les conséquences de la canicule et donc les décès liés à cette catastrophe sanitaire, n'ont pas convaincu les Français. Loin s'en faut.

 

Selon le sondage publié par " le Quotidien du Médecin " et réalisé par l'Institut CSA auprès de 1 000 Français, seulement 7 % des personnes interrogées estiment que " la récente vague de décès liés à la canicule " est principalement due à l'absence des médecins libéraux au mois d'août. Un résultat d'autant plus intéressant que les personnes âgées de 75 ans et plus, qui ont été, selon toutes les informations aujourd'hui disponibles (mais on le saura précisément lundi avec la présentation d'un nouveau rapport), les principales victimes de cette catastrophe sanitaire, sont également persuadées que ce n'est pas l'absence des médecins libéraux qui aura été la cause essentielle des décès constatés : en effet, seulement 7 % des plus de 75 ans, comme la moyenne nationale, les accusent clairement. Les 65-74 ans (8 %) sont légèrement plus nombreux à croire à la responsabilité des médecins libéraux dans cette affaire.

Si l'on prend maintenant en considération les résultats par catégories d'agglomération, on s'aperçoit que les personnes résidant dans les villes de plus de 100 000 habitants sont sensiblement plus sévères pour les médecins libéraux, puisque 10 % d'entre elles, interrogées par les enquêteurs de CSA, pensent que les médecins libéraux pourraient être tenus pour responsables de cette catastrophe. En revanche, dans l'ensemble de l'agglomération parisienne, qui regroupe plus de 11 millions d'habitants, les praticiens sont largement exonérés de toutes responsabilités, puisque seulement 4 % des personnes interrogées les désignent.

 

Le système de santé en accusation

 

Les résultats de ce sondage doivent à l'évidence satisfaire les médecins libéraux et leurs organisations, et en premier le Dr Pierre Costes, président de MG-France, qui s'est carrément insurgé contre les conclusions du rapport Lalande et les accusations dont les praticiens faisaient l'objet. " L'été, les médecins sont là ", affirmait le président de MG-France dans l'entretien publié par " le Quotidien du Médecin " du 17 septembre, et " les généralistes, poursuivait-il, n'ont pas pour habitude d'abandonner leurs patients ". De toute évidence, les Français lui donnent entièrement raison.

En revanche, pour le gouvernement, les résultats du sondage sont mitigés. S'il peut légitimement se féliciter de ce que, pour 20 % des Français seulement ( même 12 % pour les 75 ans et plus), cette catastrophe sanitaire soit le résultat de l'imprévoyance et de l'inaction du gouvernement, 39 % (28 % des 75 ans et plus) estiment qu'elle est due au manque de moyens de notre système de santé. Une majorité relative des 1 000 Français interrogés met donc directement en cause l'efficacité du système de santé et ne pense certainement pas qu'il est toujours le meilleur du monde, comme une enquête internationale l'affirmait il y a encore trois ans.

Des résultats d'autant plus préoccupants que 46 % des 18 à 24 ans, 41 % des 25 à 34 ans et 44 % des 35 ans à 40 ans mettent directement en cause l'efficacité du système. C'est-à-dire que les moins de 50 ans, pris globalement, pourraient être majoritaires à mettre en cause le système de santé et à demander en conséquence des modifications et des réformes, alors qu'ils restent dans la moyenne nationale lorsqu'il s'agit de faire porter la responsabilité de ce drame aux médecins libéraux. Le gouvernement ne pourra pas longtemps ignorer cette forte demande des moins de 50 ans.

 

C'est la " fatalité " pour les plus âgés

 

A noter aussi, et c'est intéressant, que les femmes, tous âges et toutes catégories sociales confondus, sont largement plus nombreuses (41 %) que les hommes (36 %) à mettre en avant les défaillances du système de santé, alors qu'au contraire les hommes sont plus nombreux (24 % contre 14 %) à stigmatiser le gouvernement.

Enfin, on notera (mais ce n'est pas une surprise) que la " fatalité " est mise largement en avant par les 75 ans et plus : 46 % d'entre eux pensent que c'est la raison essentielle du nombre de décès importants dus à la canicule, alors que 32 % de l'ensemble des Français (et 38 % des 65-74 ans) pensent que c'est la cause principale de la catastrophe. Un résultat qui, lui, ne surprendra personne.

 

Jacques DEGAIN

 

Le système de santé français, principal accusé

 

Selon vous, la récente vague de décès liés à la canicule, est- ce principalement...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ensemble des

Français ( %)

65- 74 ans

75 ans et plus

le manque de moyens de notre système de santé

39

25

28

la fatalité

32

38

46

le résultat de l’imprévoyance et de l’inaction du gouvernement

19

20

12

la conséquence de l’absence des médecins libéraux au mois d’août

7

8

7

Ne se prononcent pas

3

9

7

Total

100

100

100

 

Hausse du forfait hospitalier, mesures sur le médicament : le PLFSS 2004 prend forme

Jacques DEGAIN

Quotidien du médecin du 19/09/2003

 

Nouveau grand oral télévisé pour le Premier ministre, qui, devant les cameras de M6, doit participer dimanche soir, à 20 h 50, à une émission spéciale de " Zone interdite ". Au sommaire, entre autres, les problèmes de santé. Certes, la canicule sera au menu, mais Jean-Pierre Raffarin devrait préciser les grandes lignes du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2004 avec des mesures aussi peu populaires que le relèvement du forfait hospitalier, l'alourdissement de certaines taxes sur les alcools et le tabac, ou la baisse de remboursement, voire le déremboursement de certains médicaments. L'application d'un forfait par boîte de médicament est aussi évoquée, ainsi que le doublement de la taxe sur la promotion pour l'industrie pharmaceutique.

 

Les grandes lignes du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2004 commencent à être connues. Jean-François Mattei doit, mardi 23 septembre, les dévoiler après que les dernières prévisions de la commission des comptes de la Sécurité sociale, assez catastrophiques, auront été rendues publiques.

 

Mais on devrait avoir une idée assez précise des intentions du gouvernement, dès dimanche soir, par l'émission " Zone interdite " sur M6, à laquelle Jean-Pierre Raffarin doit participer. Le Premier ministre, qui a besoin de redorer un blason quelque peu terni après l'affaire de la canicule cet été et les maladresses de certains de ses ministres, aura cependant bien du mal à annoncer des mesures propres à rassurer l'opinion publique.

En effet, la situation de la Sécurité sociale est telle (16 milliards de déficits cumulés pour 2002-2003 et sans doute 15 milliards pour la seule année 2004, des déficits presque entièrement à la charge de l'assurance-maladie) que le gouvernement ne peut plus tergiverser et faire patienter l'opinion jusqu'à la réforme globale du système de protection sociale annoncée dans un premier temps pour cet automne, mais qui ne sera élaborée qu'à l'été, voire à l'automne 2004.

Pour tenter de boucher les trous ici et là, d'apporter quelques crédits ou de créer certaines économies, le gouvernement devrait annoncer des mesures concernant notamment l'hôpital et le médicament, puisqu'en l'absence d'un système de maîtrise les médecins libéraux ne devraient pas être mis à contribution, d'autant que le contact a été renoué entre les pouvoirs publics et les syndicats médicaux après plusieurs mois de crise.

 

200 millions d'euros

 

S'agissant de l'hôpital, une hausse du forfait hospitalier, qui reste à la charge du patient ou est prise en charge par sa mutuelle, a d'ores et déjà été confirmée par le ministre de la Santé devant les députés après que la nouvelle eut été dévoilée par notre confrère " Les Echos " le 17 septembre. Aujourd'hui fixé à 10,67 euros par journée d'hospitalisation, ce forfait pourrait augmenter substantiellement. Certains parlent même d'une hausse de 75 %. Jean-François Mattei a en tout cas implicitement confirmé une forte progression en annonçant devant les députés que " cette augmentation sera de l'ordre de la hausse du coût de la vie depuis 1996 ".

Une mesure que devraient dénoncer les syndicats : en effet, si ce forfait ne s'applique pas aux bénéficiaires de la CMU, il concerne ceux qui sont juste au-dessus du seuil d'attribution de la CMU (revenu mensuel de 566,50 euros pour une personne seule) et qui ne peuvent pas toujours se payer une assurance complémentaire. Mais avec cette mesure, le gouvernement compte faire économiser 200 millions d'euros par an à l'assurance-maladie.

Le médicament est sans doute le secteur avec lequel le gouvernement espère, comme c'est souvent le cas, se procurer de belles économies. Plusieurs pistes sont privilégiées par les pouvoirs publics.

 

Médicament : la taxe sur la promotion doublée ?

 

L'une est certaine ou presque : il s'agirait de doubler la taxe sur la promotion qui frappe surtout la visite médicale. Aujourd'hui, cette taxe rapporte 200 millions d'euros par an : le gouvernement envisage carrément de la doubler pour obtenir 200 millions supplémentaires. Certains échos laissent cependant penser qu'il se montrerait moins gourmand en " se contentant " d'un revenu complémentaire de 150 millions d'euros.

Autre mesure envisagée : l'abaissement du remboursement des médicaments homéopathiques. Mais le gouvernement hésitait encore cette semaine. Le danger est que l'on assiste alors à certains transferts de prescriptions vers des médicaments allopathiques ; risque faible en vérité, tant les partisans de l'homéopathie sont attachés à cette médication. Mais surtout beaucoup, parmi eux, tentaient encore de convaincre le gouvernement que le jeu n'en valait pas la chandelle. Il est vrai que les économies resteraient limitées : les médicaments homéopathiques coûtent aujourd'hui 150 millions d'euros à l'assurance-maladie ; abaisser le remboursement de 65 à 35 % reviendrait à réaliser une économie de 70 millions. Peut-être n'y a-t-il pas de petites économies.

Le gouvernement étudie aussi la réduction des taux de remboursement de certains médicaments au service médical rendu (SMR) modéré et de procéder à de nouveaux déremboursements pour les spécialités à SMR faible. Pour éviter que des recours en Conseil d'Etat n'annulent, comme cela se fait périodiquement, de telles mesures, le gouvernement va légaliser cette procédure dans le PLFSS 2004.

A l'étude encore : la fin de la liberté des prix des médicaments destinés aux hôpitaux.

Enfin, on ne négligera pas les rumeurs qui annoncent l'application d'un forfait par boîte de médicament, fixé à 0,50 euros. Une mesure qui pourrait rapporter selon certains experts jusqu'à 1 milliard d'euros. La manne serait intéressante, mais la disposition serait très impopulaire. Car si les taxes sur le tabac et les alcools forts ne devaient pas être vraiment contestées, du moins officiellement, l'application du forfait par boîte de médicament, à la charge du patient, risque de soulever des remous dans l'opinion, dont le gouvernement se passerait bien en ce moment.

 

 

 

 

Le Rapport de la Cour des comptes sur la Sécu

Le système sanitaire jugé inadapté aux personnes âgées

Agnès BOURGUIGNON

Quotidien du médecin du 19/09/2003

 

" Attention aux personnes âgées ! " : voilà en substance le message d'alerte lancé par le rapport de la Cour des comptes, qui a enquêté avant la canicule meurtrière de l'été.

 

A partir de données fournies par la Caisse nationale d'assurance-maladie (" le Quotidien " du 10 septembre), le rapport évalue à 4 100 euros la dépense moyenne de soins d'une personne de plus de 65 ans en 2001 (hors frais hospitaliers et établissements d'hébergement), contre 1 772 euros par assuré en moyenne. Les personnes de plus de 65 ans " réalisent 36,5 % des dépenses remboursées alors qu'elles ne représentent que 15,8 % de la population totale ". Et pour cause : plus de la moitié (52 %, voire " 59 % au-delà de 85 ans ") sont en affection de longue durée (ALD) prise en charge à 100 %, contre 8,5 % en moyenne pour l'ensemble de la population.

En conséquence, le rapport recommande aux pouvoirs publics de mieux prendre en compte les personnes âgées, à la fois dans les analyses et prévisions, les programmes régionaux et nationaux de santé, et dans la formation des médecins généralistes, en " améliorant (leur) formation générale et continue en gériatrie ".

Comme nous l'annoncions au début de l'été (" le Quotidien " du 17 juillet), le rapport juge les pratiques de prescription " perfectibles " et les médicaments actuels " insuffisamment adaptés " aux personnes de plus de 65 ans, alors que celles-ci représentent 39 % de la consommation totale. Il faut donc, selon la Cour, promouvoir les recommandations et outils d'aide à la prescription auprès des médecins, " inciter les laboratoires pharmaceutiques à inclure (les personnes âgées) dans les essais cliniques " et dans " les études post-AMM " (autorisation de mise sur le marché).

Pour la prise en charge de cette population, le rapport relève que " le morcellement des services, des structures et des financements rend indispensable le développement de la coordination gérontologique " à travers les réseaux. Mais, justement, il faudrait " établir et suivre un inventaire des réseaux de santé pour les personnes âgées ", " évaluer les effets et les coûts de la mise en place de ces réseaux " et " clarifier (leur) rôle " par rapport à celui des CLIC (centres locaux d'information et de coordination), des équipes financées par l'APA (allocation personnalisée d'autonomie).

La Cour des comptes souligne enfin les limites de la prise en charge des personnes âgées en urgence. Parfois dépendantes et souffrant souvent de polypathologies compliquant le diagnostic, les personnes âgées ont souvent " une prise en charge urgente inadaptée ". Celle-ci a un coût humain et un coût économique " lié au mauvais usage de structures lourdes et aux complications médicales induites ". C'est pourquoi la Cour préconise une évaluation en la matière et la " mise en œuvre sans retard " des circulaires du 18 mars 2002 et du 16 avril 2003 organisant les filières de soins gériatriques.

 

 

 

Raffarin ponctionne les malades

Première mesure pour la Sécu : la hausse du forfait hospitalier.

Par François WENZ-DUMAS

Libération jeudi 18 septembre 2003

11 milliards d'euros.

C'est le montant du déficit de l'assurance maladie attendu pour 2003.

 

 

La méthode est maintenant éprouvée : on lance une information, et on attend les réactions. Si elles ne sont pas trop hostiles, la mesure est validée. C'est ce qu'a fait hier le ministère de la Santé en annonçant que le forfait hospitalier allait être revalorisé.

 

Le forfait hospitalier, c'est une somme fixe, actuellement de 10,67 euros par jour, que tout patient hospitalisé doit mettre de sa poche au titre de sa participation aux frais d'hébergement. Sa revalorisation est prévue dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2004) actuellement soumis aux derniers arbitrages de Matignon et de Bercy, et qui sera présenté par le ministre de la Santé, Jean-François Mattei, mardi prochain, en même temps que le rapport de la Commission des comptes de la Sécurité sociale.

 

2 à 3 euros. Le niveau de cette revalorisation n'a pas été précisé. "Il n'a pas été réévalué depuis 1996", rappelait-on hier au ministère de la Santé, où l'on évoquait une augmentation "de l'ordre de la hausse du coût de la vie depuis 1996". Elle pourrait donc être de 2 à 3 euros. Le forfait hospitalier n'est pas remboursé par la Sécurité sociale, mais il est en général pris en charge par l'assurance complémentaire, mutuelle ou assurance privée. Des exonérations sont prévues, notamment pour les accouchements, les accidents du travail, les maladies professionnelles, les handicapés de moins de 20 ans, ainsi que les personnes possédant la couverture maladie universelle (CMU).

 

Cette revalorisation n'irait pas directement dans les caisses de la Sécurité sociale. Mais elle apporterait quel ques millions d'euros au budget des hôpitaux. Autant de moins à financer par les cotisations sociales ou les prélèvements fiscaux. Cela restera cependant une goutte d'eau, comparé aux dix milliards d'euros de déficit de l'assurance maladie attendus pour 2003.

 

La commission des comptes de la Sécurité sociale devrait même réajuster, mardi prochain, sa dernière estimation, et annoncer un manque à gagner de plus de 11 milliards en 2003 pour la seule branche maladie. En 2002, le trou était de 6,1 milliards d'euros partiellement compensé par l'excédent de 2,7 milliards d'euros dégagé par les branches vieillesse et famille. Cette année le solde de ces deux branches devrait être tout juste équilibré.

 

Avec d'aussi sombres perspectives, l'objectif du gouvernement n'est plus d'équilibrer les comptes sociaux, mais d'essayer au moins de contenir le déficit au-dessous de 10 milliards d'euros en 2003 et 2004. Un niveau record depuis 1995. Il avait fallu les ordonnances Juppé puis le retour de la croissance pour revenir à un niveau de déficit plus raisonnable, et même à un léger excédent en 1999, 2000 et 2001. Au regard de tel déficit, l'intérêt de cette revalorisation du forfait hospitalier peut paraître dérisoire. "Il ne faut pas se leurrer", fait observer Claude Pigement, délégué du Parti socialiste pour les questions de santé : "Ceux qui seront pénalisés par des mesures comme la revalorisation du forfait hospitalier, ce sont ceux qui n'ont pas les moyens de s'offrir une complémentaire, mais qui ne bénéficient pas de la CMU. C'est économiquement incohérent et socialement injuste."

 

Ballon d'essai. Cette annonce ressemble aussi à un ballon d'essai, destiné à tester les réactions des patients et des mutuelles. D'autres hypothèses restent à l'étude : forfait de 1 euro par feuille de maladie, ou taxe non-remboursable sur les médicaments prescrits. Mais après la catastrophe sanitaire du mois d'août, le gouvernement ne peut envisager qu'avec la plus extrême prudence ces mesures qui pénalisent les personnes âgées.

 

 

Décentralisation: Raffarin recule en rase campagne

Il a annoncé le report d'un an des transferts de compétences aux collectivités locales.

Par Vanessa SCHNEIDER

jeudi 18 septembre 2003

 

Encore un recul sur la décentralisation. Jean-Pierre Raffarin a annoncé, hier, à l'occasion du congrès de l'Assemblée des départements de France, le report des transferts de compétences au 1er janvier 2005 au lieu de 2004 "pour ne pas faire des transferts dans la précipitation, sans pouvoir rassurer sur les financements qui vont avec", a-t-il expliqué. La veille, Christian Poncelet, le président (UMP) du Sénat, avait tiré le signal d'alarme. "La décentralisation ne saurait se résumer à un simple transfert de prélèvements obligatoires et encore moins à une opération de délestage, avait-il déclaré, ajoutant que "la relance de la décentralisation doit s'effectuer sur des bases financières saines, sûres et sereines."

 

Discussions. Le Premier ministre a entendu ses craintes. Et s'est voulu apaisant. "La concertation n'est pas terminée, puisque nous entrons maintenant dans la phase parlementaire, qui reste une phase de débats", a-t-il déclaré. Tout en se disant "ferme sur le calendrier et sur les principes", il a assuré qu'il était "ouvert aux amendements" et s'est donné "un an pour, de concert, évaluer les sommes que l'Etat doit transférer".

 

Histoire de calmer les inquiétudes, il a rappelé que le montant des transferts devra correspondre à l'intégralité des moyens mis en oeuvre par l'Etat et que leurs modalités ne devront pas dégrader le taux d'autonomie fiscale des collectivités. "Nous financerons loyalement les transferts de compétence, en privilégiant les res sources fiscales, a-t-il martelé. A échéance de 2005, le gouvernement financera les 8 milliards d'euros de nouvelles compétences des départements, pour moitié sous forme d'une part non modulable de la TIPP nationale, et pour l'autre moitié, sous forme d'impôts qui devront être modulables par le conseil général". Le conseil des ministres du 1er octobre examinera le texte relatif aux transferts de compétences qui sera ensuite soumis au Sénat.

 

Référendum. Ce n'est pas la première fois que Jean-Pierre Raffarin doit remballer ses projets de décentralisation qui lui sont pourtant si chers. Au printemps, lors de la grogne dans l'Education nationale, il avait dû renoncer au transfert des conseillers d'orientation et des psychologues et avait annoncé le report de celui des personnels techniques.

 

L'échec du référendum en Corse a, par ailleurs, considérablement fragilisé une autre mesure phare du dispositif Raffarin : la possibilité pour les collectivités locales d'organiser des consultations directes. Profitant du dernier aveu de faiblesse du chef du gouvernement, le PCF a, hier, demandé "l'abrogation pure et simple du texte".

 

Indifférence. Le Premier ministre avait fait de ce thème son grand oeuvre. Mais la décentralisation suscite la méfiance des élus et l'indifférence dans l'opinion. "Là-dessus il s'est planté, confiait récemment un de ses ministres, les Français veulent qu'une voiture marche, ce qui se passe sous le capot, ils n'en ont rien à faire." Jean-Pierre Raffarin comptait faire de sa réforme un argument de campagne lors des régionales et des cantonales de 2004. Il veut maintenant éviter qu'elle se retourne contre son camp.

Déficits: la France prête à rentrer dans le rang

[2003-09-14 12:38]

par Yves Clarisse

 

STRESA, Italie (Reuters) - La France a effectué ce week-end un virage sur l'aile pour se concilier les bonnes grâces de ses partenaires européens et échapper aux sanctions qui risquaient de punir le dérapage de son déficit.

 

Pour la première fois depuis l'arrivée du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin aux affaires, en mai 2002, le ministre de l'Economie et des Finances Francis Mer est parvenu à rassurer ses homologues réunis vendredi et samedi à Stresa (Italie) sur la détermination de la France à se plier à la discipline budgétaire imposée par le traité de Maastricht.

 

"On a le sentiment qu'il y a une volonté de changer d'attitude (...) et que le gouvernement français va prendre des initiatives pour renverser la tendance", a déclaré le ministre belge des Finances, Didier Reynders. "Il faut qu'à l'intérieur du gouvernement tout le monde ait la même attitude."

 

Le changement de ton a été noté par tous les participants, qui n'avaient guère réussi jusqu'à présent à dialoguer avec l'ex-PDG d'Arcelor, peu habitué au monde politique.

 

A Madrid, en juin 2002, le ministre français s'était refusé à tout engagement de réduction du déficit structurel (hors aléas de la conjoncture), contrairement aux 11 autres pays de la zone.

 

A Luxembourg, en octobre 2002, il avait irrité ses homologues en disant que la France avait "d'autres priorités" que la réduction du déficit alors que tous les autres pays se serraient la ceinture pour éviter un dérapage incontrôlé.

 

UNE MEILLEURE COMMUNICATION

 

Ces dernières semaines, les clignotants se sont mis au rouge les uns après les autres: le gouvernement français a confirmé sa volonté de poursuivre la baisse des impôts au moment où il annonçait que le déficit public atteindrait 4% du PIB en 2003 après avoir déjà dépassé le seuil de 3% en 2002.

 

En annonçant mardi dernier que la France n'entendait pas repasser sous le seuil des 3% avant 2006, le ministre délégué au Budget, Alain Lambert, signifiait aux autres pays européens que la France entendait ignorer les règles et les invitait presque à déclencher les sanctions prévues par le pacte, dont des amendes.

 

C'est dans ce contexte que Francis Mer est arrivé à Stresa pour une performance appréciée par ses partenaires.

 

"Il a finalement appris à ne pas se comporter devant les ministres des Finances comme s'il était face à une délégation syndicale de la CGT," a ironisé le conseiller d'un ministre.

 

"Tout le monde s'est accordé pour dire qu'il avait été brillant," explique un responsable gouvernemental. "Jusqu'à présent, son style, c'était: 'causez toujours, je m'en fiche'".

 

Mais l'amélioration des relations entre Francis Mer et ses pairs n'est pas uniquement due à une meilleure communication.

 

Il a visiblement obtenu des arbitrages au plus haut niveau en faveur d'une politique budgétaire beaucoup plus rigoureuse, tant il est vrai que le dérapage commençait à érode sérieusement l'influence de la France dans l'Union européenne.

 

"J'ai indiqué que je parlais au nom du gouvernement", a-t-il expliqué en présentant ses projets pour l'avenir.

 

Le "grand argentier" français a pris des engagements qui, s'ils sont concrétisés dans le projet de loi de finances pour 2004 qui sera présenté le 24 septembre, lui vaudront la clémence de la majorité des autres pays afin d'éviter les amendes.

 

 

 

La France mettra en oeuvre en 2004 une réforme "douloureuse" de la sécurité sociale, consacrera l'essentiel des fruits de la croissance à la réduction du déficit et gèlera les dépenses afin de revenir en 2005 sous la barre des 3%, a-t-il promis.

 

Francis Mer joue la carte de la pleine collaboration avec ses partenaires et les institutions européennes.

 

"Nous n'avons pas définitivement arrêté nos décisions, nos propositions, et il est clair que cet échange avec les collègues sera utilisé pour nourrir les dernières décisions que nous devons prendre dans les prochains jours", a-t-il dit.

 

Après avoir fait fi des critiques des petits pays "vertueux", la France dit désormais comprendre leur inquiétude devant le dérapage des finances publiques françaises.

 

"Il ne faut pas oublier les conséquences que cela a sur les autres pays", a-t-il remarqué en rappelant que le respect de la discipline "fait partie du règlement de copropriété" de l'euro.

 

Alors que le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin qualifiait il y a quelques jours à peine la Commission de "bureau" obsédé par les statistiques, Francis Mer s'est explicitement placé ce week-end sous sa surveillance.

 

"Nous allons avec la Commission en temps réel travailler à l'amélioration significative du déficit que l'on doit obtenir en 2004 par rapport aux 4% de 2003 de manière à rendre crédible le franchissement dans le bon sens de la limite de 3% en 2005".

 

Si c'est le cas, l'immense majorité des pays de l'UE ont indiqué qu'ils ne feraient pas de "fétichisme" sur 2004 - le mot est du Premier ministre et ministre des Finances luxembourgeois Jean-Claude Juncker - pour peu que la trajectoire soit bonne, malgré les réticences de quelques petits pays vertueux.

 

 

 

 

Cliniques déficitaires : la FHP tire la sonnette d'alarme

Quotidien du Médecin, 12 septembre 2003

 

Le président de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) alerte une nouvelle fois les pouvoirs publics sur les risques de démantèlement du secteur hospitalier privé en raison " d'une cruelle absence de moyens ". Max Ponseillé s'inquiète du retard pris dans l'expérimentation de la tarification à l'activité et accuse les hôpitaux de " freiner " le dossier.

 

Le traditionnel point presse de rentrée de la FHP a commencé comme à l'accoutumée, c'est-à-dire par le rappel, chiffres à l'appui, de la mauvaise santé financière des 1 300 cliniques privées françaises.

 

Rentabilité " quasi nulle " (en chute de 90 % depuis 1995, elle s'établit à 0,2 % en 2001), déficit " record " (37 % des cliniques déficitaires en 2001, contre 28 % en 2000 et 23,5 % en 1995)... La situation " se dégrade d'année en année ", constate Max Ponseillé. Et ce d'autant plus que les tarifs fixés par les pouvoirs publics " ne suffisent pas " pour contrer " l'envolée incontrôlable de certaines charges, parmi lesquelles la responsabilité civile médicale ", ajoute le président de la FHP, avant de conclure, pessimiste : " La faillite de notre secteur paraît plus que probable... à moins que des mesures d'urgence ne soient décidées et mises en œuvre très rapidement. "

Des mesures d'autant plus indispensables, rappelle Max Ponseillé, que les cliniques, en prenant en charge 30 % des patients hospitalisés chaque année, sont " irremplaçables dans le dispositif de santé français ". La centaine de cliniques qui disposent d'un service d'accueil des urgences UPATOU " a répondu présent cet été, le personnel y était mobilisé ", mais, malgré cela, " les pompiers les ont très peu sollicitées par endroits, et, autre déception, le rapport Lalande sur la canicule ne les évoque même pas ". " La preuve que notre secteur n'est pas reconnu ", dit, amer, le président de la FHP. " Je tire la sonnette d'alarme, poursuit-il. Sans une aide significative pour les cliniques, je crains vraiment que le tissu hospitalier ne se déchire, et que cela ne conduise à une catastrophe sanitaire qui pourrait avoir une tout autre ampleur que celle de cet été. "

Mais, alors, que demandent les cliniques ? Plus important que tout le reste, la mise en œuvre rapide de la tarification à l'activité (T2A), telle qu'elle a été présentée l'an dernier par le ministre de la Santé. " Or je suis très inquiet, dit Max Ponseillé. Nous sommes à trois mois de l'application de cette réforme, et le dossier n'avance pas. L'expérimentation a pris beaucoup de retard. En fait, elle n'a même pas commencé : jusqu'à présent, on n'a eu qu'à remplir deux questionnaires. Rien n'est prêt sur le plan informatique, c'est pourquoi on demande que l'application de la tarification à l'activité soit décalée de six mois, pour nous laisser le temps de tester les nouveaux circuits de facturation avec les caisses. Cela étant, l'ensemble des cliniques MCO sont prêtes au changement. Cela ne me semble pas être le cas des hôpitaux publics, qui demandent que l'enveloppe (budgétaire) ne soit plus commune (aux secteurs public et privé), et qui veulent une application progressive " (seulement 10 % des allocations versées en 2004 sous forme de T2A, le reste sous dotation globale).

Max Ponseillé a l'impression que le gouvernement est prêt à accepter ces modifications. " L'hôpital fait tout pour freiner " la réforme, dénonce-t-il. " Nous nous sentons leurrés, loin de notre compte. " Car, pour la FHP, seul le passage à une T2A basée sur une régulation médicalisée, avec une enveloppe unique et un calendrier resserré, peut sauver les établissements privés du naufrage, en permettant de comparer les coûts et l'efficience des hôpitaux et des cliniques.

Autre dossier " chaud " de la rentrée abordé mercredi : la flambée des primes en responsabilité civile et la fermeture annoncée du pool d'assureurs (GTAM). " Les trois cent cinquante cliniques qui vont s'adresser au bureau central de tarification des assurances vont faire face à un double problème : trouver un contrat pour le premier janvier 2004, et à un prix raisonnable ", a annoncé Loïc Geffroy, délégué général de la FHP. " Prolonger le GTAM d'un an ou deux aurait pu rassurer les assureurs sur l'évolution de notre sinistralité ", poursuit-il. Mais cette hypothèse semble définitivement rejetée par le pool lui-même. La FHP se rend aujourd'hui au ministère de la Santé pour essayer de trouver une solution au problème, en présence des syndicats de médecins libéraux et des assureurs.

Delphine CHARDON

 

 

 

Canicule : Mattei se défend sans gloire

Il répondait au Parlement de son action durant l'été.

Par Matthieu ECOIFFIER Libération vendredi 12 septembre 2003

 

C'est pas de sa faute... "Nous n'avons rien su !", a fini par lâcher hier Jean-François Mattei, à propos des alertes remontées début août du milieu hospitalier et des maisons de retraite. Le visage impavide mais les mains agitées, se disant "profondément touché et même profondément meurtri" par ce "drame humain", le ministre de la Santé était le premier responsable auditionné hier par la "mission d'information" sur la canicule. Composée, à la proportionnelle, de députés de chaque groupe politique, cette instance a été créée le 26 août par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale. Objectif : proposer rapidement des mesures à intégrer dans les deux projets de loi ­ santé publique et financement de la Sécurité sociale ­ qui seront examinés dès le mois d'octobre. Et ce, sans attendre les conclusions de la "commission d'enquête" qui verra le jour à la rentrée parlementaire : une machinerie aux "pouvoirs d'investigations beaucoup plus larges, qui peut travailler pendant six mois, auditionner et réauditionner", a prévenu Claude Evin (PS).

 

La faute à la nature. Avant de se soumettre pour la première fois à un débat contradictoire, Jean-François Mattei a pris soin de bétonner sa ligne de défense. Trois quarts d'heure d'un plaidoyer détaillant sa version des faits, esquivant toute responsabilité dans la gestion politique de cette catastrophe. Et dénonçant, par avance, toute critique comme "polémique" produites par une "illusion rétrospective" à la lueur des 11 400 morts officiels. Face à la canicule "exceptionnelle par son intensité et sa durée", il "n'y a eu aucune alerte véritable au sens d'alarme, ni mobilisation par anticipation", a-t-il reconnu. La faute à qui ? A la nature. "J'ai invité les trois experts les plus compétents sur la question des vagues de chaleur du Center for Disease Control d'Atlanta (CDC). Que m'ont-ils dit le 29 août ? Qu'il s'agit d'une catastrophe naturelle qui ne dit pas son nom et que l'opinion publique a beaucoup de difficultés à reconnaître comme telle. C'est eux qui le disent." Mais quid des deux canicules de 1976 et de 1983 à Marseille ? Nulle leçon n'en a été tirée en matière de santé publique, selon le ministre marseillais, car "jamais le bilan épidémiologique n'a été dressé au plan national". Puis il insiste : la chaleur a "pris en défaut notre système de veille et d'alerte" si performant pour le risque infectieux.

 

Il y a aussi la faute des médias : le 8 août, ils n'ont pas relayé le communiqué de la Direction générale de la santé (DGS) : "Ces recommandations n'ont guère retenu l'attention et ont même prêté à sourire tant les mesures rappelées ne semblaient pas authentiquement médicales : boire abondamment... se doucher fréquemment". La faute aussi de la DGS qui n'a pas alerté les médecins alors qu'il existe, révèle-t-il pour la première fois, un réseau "DGS urgent, institué à cet effet". Puis il raconte : "En fonction des éléments qui me sont communiqués à 19 h 30 j'interviens le 11 août sur TF1 à 20 heures." Une précision importante car, à 19 h 36, la DGS envoie par mail au cabinet de Mattei un projet de communiqué alarmant sur la "saturation des funérariums". Selon le ministre, il n'en aurait donc pas été informé : d'où sa prestation rassurante en polo alors que les morgues se remplissent.

 

Société négligente. A ce moment-là, "l'hôpital fait face". Ensuite ? "Toutes les décisions prises et la mobilisation sont occultées par le développement de la polémique sur les chiffres. [...] Ces estimations ont créé la confusion et contribué au trouble légitime de l'opinion." La faute, sous-entend Jean-François Mattei, à son collègue de l'Intérieur destinataire des certificats de décès. Après Chirac et Raffarin, le ministre de la Santé n'oublie pas de culpabiliser la "société" qui néglige les personnes âgées. Seul l'hôpital a "fait face" mais quand les patients arrivaient aux urgences, il était déjà trop tard. Le drame s'étant joué "en amont" : dans les maisons de retraite et les appartements.

 

Alertes claires. Peu convaincus par cet exposé, certains députés aiguisent leurs piques. D'abord sur sa prestation de ministre de la Santé. "Quand je vous ai vu à la télévision, Monsieur le Ministre, décontracté, je me suis dit : là-haut, il ne sait pas ce qui se passe dans le pays ! [...] On était alertés, les communiqués de Météo France étaient clairs dès juillet", clame Maxime Gremetz (PC). Claude Evin fait le lien entre la parole du ministre et ses conséquences sur ses services : "Personne ne peut dire que le gouvernement a bien géré ce moment. Les erreurs de communication ont été déterminantes sur la réactivité des administrations." Paulette Guichard Kunstler, ancienne secrétaire d'Etat aux personnes âgées, rappelle l'amputation de moitié du plan de médicalisation des maisons de retraite. Pas de quoi financer les "deux heures de climatisation par jour suffisantes pour récupérer" souhaitées aujourd'hui par Jean-François Mattei. "On pourrait réquisitionner les grands hôtels climatisés pour bourgeois", ironise alors le député Gremetz.

 

Contradictions. De fait, le premier véritable tacle vient de la droite. L'air de rien, Dominique Paillé (UMP) relève des "propos contradictoires" : "Vous avez dit que le message alarmiste de la DGS n'avait pas été suffisamment relayé. [...] Or dans votre intervention [trois jours après] vous avez fait le choix politique de jouer la maîtrise et la sérénité" relève-t-il. "Avec le recul, quand on voit les courbes de mortalité grimper dès le 4 août, on peut dire que des choses ont été maladroites", reconnaît alors Jean- François Mattei. Mais là encore, "personne n'était informé", pas même le ministre

 

"Je saurai comment faire"

Sa conception de la responsabilité politique a changé.

Par Eric FAVEREAU Libération vendredi 12 septembre 2003

 

Clair et net : "Je n'ai jamais pensé à démissionner. Bien au contraire, je me suis senti investi d'un devoir d'agir", a expliqué Jean François Mattei, devant la mission d'information parlementaire sur les morts de la canicule. Ce drame est avant tout selon lui une catastrophe naturelle.

 

Le ministre de la Santé est tout, sauf un amateur. Professeur de pédiatrie, généticien de renom, spécialiste de bioéthique, croyant et "homme de valeurs" comme il se qualifie, il a donc choisi de rester oublieux de ses nombreuses déclarations sur la responsabilité de l'homme politique du temps où il était député de l'opposition. Evoquant l'affaire du sang contaminé et le rôle des ministres, il déclarait au Figaro le 7 février 1992 : "Quand un bateau s'échoue, peu importent les circonstances, le capitaine, tenu pour responsable, est débarqué. C'est une question de principe et d'honneur... Si le Président et les ministres n'étaient pas informés, c'est que nous ne sommes pas gouvernés. Vont-ils démissionner ? J'en doute ! Où est le sens de l'honneur ? Je ne sais pas qui est coupable, mais il est évident que plus les conséquences sont graves, plus les responsabilités sont haut situées. Plus tard, en octobre, toujours dans Le Figaro : "Je suis convaincu que la responsabilité politique est un engagement personnel, qu'elle doit y rester conforme à la nation de noblesse, de dignité et de courage". Quelques mois avant d'être nommé ministre, dans Les Echos, il déclare, à propos de l'expression "responsable mais non coupable" : "Ce que je sais, c'est que le politique est responsable". Et insiste, reprenant dix ans plus tard, la métaphore du bateau qui coule et du capitaine ajoutant: "Quand un politique échoue, il doit démissionner". Une fois ministre, il est donc un marin qui navigue au gré des situations. Interrogé par Libération fin juillet sur les hôpitaux, il répondait : "La situation est toujours tendue, comme chaque été depuis des années. Mais nous avons pris des mesures d'anticipation afin de pouvoir prendre en charge au mieux les malades". Hier, il assurait : "J'ai vu, je saurai maintenant comment faire pour que cela ne se reproduise pas". Puisqu'il le dit....

 

 

Lourd bilan en Europe

Libération vendredi 12 septembre 2003

 

Du 16 juillet au 15 août, la canicule a fait, en Italie, 4 175 morts de plus qu'en 2002 pour les personnes âgées de plus de 65 ans, selon le premier bilan du ministère de la Santé. Les 5 000 décès devraient être atteints une fois l'ensemble du mois d'août connu. Hier, Jean-François Mattei a estimé "que d'autres pays voisins ont connu ce drame". Ainsi selon le bureau central néerlandais, les Pays-Bas auraient enregistré 1 400 victimes de plus "ce qui en proportion n'est pas loin de nos chiffres", a précisé le ministre.

 

 

 

 

 

Quotidien du Médecin du 10/09/2003

Le rapport Lalande sur la crise sanitaire de la canicule

Comment et pourquoi le système français de santé a disjoncté

 

A catastrophe sanitaire exceptionnelle, diagnostic ravageur : le rapport Lalande commandé par Jean-François Mattei stigmatise, en vrac, l'incurie administrative, la veille épidémiologique inexistante, la permanence des soins libéraux, la saturation des urgences, la pénurie des hospitaliers pour cause de 35 heures et de directives européennes, les fermetures estivales de lits trop nombreuses. Dans ce contexte calamiteux, seul le courage des hospitaliers (médecins et administratifs) comme des médecins de ville sur le pont trouve grâce aux yeux des experts.

 

Moins de trois semaines auront suffi au Dr Françoise Lalande (inspectrice générale des Affaires sociales) et à son équipe d'experts* pour auditionner les principaux acteurs impliqués dans les différentes étapes de la crise : administration centrale, Institut de veille sanitaire, directions hospitalières, services participant à l'urgence (SAMU, SAU, sapeurs-pompiers), responsables de SOS-Médecins, responsables de services de gériatrie, de maisons de retraite et de services d'aide et de soins à domicile. Sans oublier l'Ordre des médecins, le Centre d'épidémiologie sur les causes médicales des décès et même les spécialistes du Center for Disease Control and prevention (CDC) d'Atlanta.

 

Incapable d'anticiper

 

S'ensuit un diagnostic couperet : le rapport décrit l'inadaptation d'un système qui s'est révélé " incapable d'anticiper, d'organiser et de coordonner une réponse adaptée à la catastrophe ". La crise aura agi comme " le révélateur dramatique des difficultés préexistantes du système de soins, et notamment des services d'accueil des urgences et des services accueillant le personnes âgées, ainsi que de la permanence des soins exercée par la médecine libérale ".

Quant aux décès des personnes âgées restées à leur domicile, ils s'expliquent, estime le rapport, par " l'insuffisance de tous les acteurs ", mais aussi, à l'échelon local, par " l'absence de repérage de personnes vulnérables ou des personnes vivant seules et par l'incapacité, particulièrement au mois d'août, à mobiliser les acteurs nécessaires. "

Les critiques du rapport Lalande s'articulent autour des deux principaux chapitres que constituent l'alerte et la réaction. La première s'est enlisée dans les " décalages entre la perception des administrations sanitaires et la réalité de la crise ". L'éphéméride de la crise commence par une nouvelle vague de chaleur annoncée par Météo France le 19 juin. Mais c'est le 2 août que démarrent vraiment les fortes chaleurs, la période du 4 au 12 août étant, par son intensité et sa durée, unique dans les annales depuis 1873, début des archives. Or, si le 6 août un médecin inspecteur de santé publique de la DDASS du Morbihan fait le premier signalement de décès par hyperthermie (lire ci-dessous), si le 10 août le Dr Patrick Pelloux évoque " une véritable hécatombe ", ce n'est que le 14 août que le Premier ministre, lors d'une réunion interministérielle à Matignon, demande l'extension du plan blanc à l'ensemble du territoire.

Ce décalage entre la réalité et la réaction administrative est à l'origine, accuse le rapport, d'un " manque d'anticipation qui a gêné gravement la compréhension du caractère exceptionnel du phénomène et de ce fait l'adaptation rapide du système ".

Sont visés l'Institut de veille sanitaire, auquel manque une organisation ou un système de prospective solide ; le cloisonnement entre administrations du ministère de la Santé (DGS, DGAS, DHOS), entre ministères et avec les services opérationnels.

La DGS en particulier se serait " épuisée dans la recherche d'information, mais sans réelle efficacité " : son communiqué diffusé le 8 août était " décalé par rapport à ce qu'était déjà la réalité du terrain, à savoir les décès toujours plus nombreux de personnes âgées, et il a été peu relayé par la presse ". Il ne faisait pas, en outre, " référence aux personnes consommatrices de médicaments comme les neuroleptiques, les antiparkinsoniens, les diurétiques, tous produits qu'il eût fallu conseiller d'ajuster ".

Quant au Numéro Vert mis en place à partir du 11 août, non sans difficultés, il recevait le 13 août 5 029 appels, dont 16 % seulement étaient traités.

 

La baisse du temps médical disponible

 

Dans ce contexte, la réaction a été aggravée par la période estivale. Dans les hôpitaux, le temps médical disponible était fortement réduit par la mise en œuvre de l'ARTT et par l'intégration des gardes dans le temps de travail, en application aux hospitaliers des directives européennes de 1993 et 2000. Se sont donc cumulés les effets délétères de " la diminution des effectifs de personnels présents, la fermeture des lits, l'absence de bon nombre de chefs de service et de seniors, la présence en proportion plus importante de médecins jeunes, moins expérimentés ".

Le rapport épingle la permanence des soins médicaux et salue le travail des médecins présents (notamment au sein des systèmes de permanence des soins organisés), qui " ont accompli leur travail et effectué leurs gardes avec constance pendant la période caniculaire, souvent débordés de travail et faisant face à des situations humaines et sociales particulièrement difficiles. "

De même, les SAMU-SMUR ont fait face à un accroissement très important de leur activité, une situation classique chaque été mais qui a pris cette année un tour dramatique.

Au final, " tous les hommes et femmes qui ont participé à la prise en charge des victimes de la vague de chaleur en tirent aujourd'hui un sentiment de fierté, celui d'être allés aux limites de ce qu'ils pouvaient donner. Cet effort commun a soudé les équipes d'urgence et toute la communauté hospitalière. Le plus souvent rapporté est celui de l'effet fédérateur de cette vague de chaleur. "

Coup de chapeau est donné à " chaque site, (qui), bien que saturé, s'est organisé pour refroidir (draps humides, ventilateurs apportés de tout l'établissement) et réhydrater tous les patients ; mobiliser toutes les ressources humaines disponibles de l'hôpital à leur chevet ; organiser l'accueil initial pour décourager les patients relevant d'une simple consultation de médecine générale sans risquer de méconnaître une urgence vitale ; s'approprier toute salle climatisée susceptible d'accueillir des patients hyperthermiques ; coloniser les services qui avaient des lits disponibles (chirurgie) ; différer tout ou partie des activités programmées ; et activer les réseaux d'aval (cliniques privées, soins de suite et de réadaptation). "

 

Ch. D.

 

* Pr Sylvie Legrain, chef de service de gériatrie à l'hôpital Bichat, Pr Alain-Jacques Valleron, directeur de l'unité INSERM de recherches épidémiologie et sciences de l'information à l'hôpital Saint-Antoine, Dr Dominique Meyniel, chef du service des urgences médicales de l'hôpital Tenon, avec la collaboration de Maryse Fourcade, inspectrice adjointe des Affaires sociales.

 

L'UNOF-CSMF " regrette " et MG-France " conteste "

 

L'UNOF-CSMF trouve " regrettable " que le rapport Lalande mette en cause la permanence des soins libéraux dans la catastrophe sanitaire liée à la canicule.

" Tout au long de l'année, rappelle le syndicat des omnipraticiens, les médecins de famille permettent le maintien de personnes à domicile (de 350 000 à 500 000 au-delà de 70 ans), en effectuant des horaires de l'ordre de 60 heures par semaine. Ils sont aidés en cela par les professionnels paramédicaux libéraux, sociaux et par leurs confrères médecins spécialistes de proximité ou de plateau technique. Tout ce maillage du territoire a aussi bien fonctionné pendant la canicule que tout au long de l'année. "

" Nous contestons les propos " du rapport a déclaré de son côté le Dr Pierre Costes, président de MG-France, affirmant : " Après les familles, ce sont les généralistes les boucs émissaires (...) Le mois d'août n'a aucune raison d'être différent en termes de permanence, par rapport au reste de l'année. Les établissements pour personnes âgées dépendantes disent avoir manqué de bras pour mettre en œuvre les prescriptions des médecins généralistes. Ce ne sont donc pas les médecins qui manquaient, mais les personnels pour personnes âgées. "

 

Des propositions tous azimuts

 

Le rapport Lalande ne se contente pas de dénoncer les ratages, il multiplie les propositions dans tous les domaines pour que la catastrophe de l'été 2003 ne se renouvelle pas :

- Il faut que l'InVS se réorganise pour créer un système simple et robuste d'alerte basé sur l'activité des services d'urgence et les services météorologiques ; le système d'information sur les décès doit aussi être réformé.

- S'agissant des personnes âgées, il conviendrait de créer des réseaux ville-hôpital gériatriques, d'ouvrir des services de gériatrie dans les hôpitaux de court séjour, de renforcer le plan de médicalisation des maisons de retraite, de recenser les personnes âgées vivant seules ou vulnérables. Il faut aussi valoriser le travail des personnels et rééquilibrer les attributions de postes d'infirmières en faveur de ces services.

- Il est bien sûr essentiel de préparer des programmes d'action " chaleur " inspirés des enseignements tirés de cette crise et des expériences étrangères, et de dresser généralement des plans pour des situations climatiques extrêmes. Il faut également adapter le Plan blanc aux situations d'afflux massif de personnes dans les hôpitaux, hors des situations de catastrophe brutale pour lesquelles il a été conçu.

- Il faut par ailleurs améliorer l'organisation et les moyens des services d'urgence, de façon à ce que les SAU puissent accueillir dignement les personnes âgées et trouver rapidement des lits d'aval adaptés.

- S'agissant de la climatisation, et sans fixer de normes contraignantes, il faut que les établissements (hôpitaux et maisons de retraite) étudient les priorités d'équipement. Simultanément, des études d'ingénierie doivent être menées pour trouver des solutions évitant les risques de légionellose.

- Enfin, il faudrait demander à l'AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) d'étudier les conséquences de certaines prises médicamenteuses et des surconsommations éventuelles.

 

 

La carte sanitaire est morte

Quotidien du Médecin du 10/09/2003

 

 

L'ordonnance de simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santé est parue au " Journal officiel ". Elle renforce le rôle des directeurs d'ARH, supprime la carte sanitaire, simplifie le régime des autorisations. Le schéma d'organisation sanitaire (SROS) devient l'outil unique de planification.

 

 

L'ordonnance de " simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santé ainsi que des procédures de création d'établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation ", adoptée mercredi dernier en conseil des ministres, est entrée en vigueur le week-end dernier, après sa publication samedi dans le " Journal Officiel ".

 

Cette ordonnance, présentée par le ministre de la Santé, Jean-François Mattei, s'inscrit dans le cadre de la mise en œuvre du plan Hôpital 2007. Selon le porte-parole du gouvernement, Jean-François Copé, ce texte " vise, en favorisant la recomposition de l'offre hospitalière, à permettre aux établissements de santé publics et privés de mieux s'adapter aux profondes mutations dans le domaine des techniques et des pratiques médicales et de mieux répondre aux demandes légitimes des patients. Elle doit également permettre d'alléger les démarches administratives pour les professionnels de la santé ".

L'ordonnance comporte quatre grandes catégories de mesures. Le rôle des directeurs d'ARH (agences régionales de l'hospitalisation) est renforcé ; il leur est reconnu un pouvoir de contrôle sur le fonctionnement des établissements de santé. Deuxième axe de la réforme : l'organisation sanitaire est simplifiée, de même que le régime des autorisations. La carte sanitaire est supprimée, le secteur sanitaire remplacé par le territoire de santé. Le groupement de coopération sanitaire, ouvert aux libéraux, peut constituer un réseau de santé et gérer des équipements d'intérêt commun (bloc opératoire, service d'imagerie...). L'ordonnance permet aussi, troisième point, d'accélérer les opérations d'investissement immobilier des établissements de santé. Enfin, les démarches administratives des professions médicales, accomplies lors de leur installation, sont simplifiées.

 

Possibles dérives

 

La sortie de l'ordonnance inspire des réactions dans l'ensemble positives. La Fédération hospitalière de France (FHF), " d'accord sur le projet global de l'ordonnance ", veillera à ce que les ambiguïtés contenues dans les textes d'application (à propos du rôle du SROS, notamment) soient levées (" le Quotidien " du 4 septembre). Pour le Dr François Aubart, l'ordonnance est " un texte très important ", " qui met fin à une arborescence lourde (...) complètement obsolète ". " Cela dit, poursuit le président de la Coordination médicale hospitalière (CMH), le fait de simplifier la carte en mettant en place un système encore flou, celui de la planification par activité, comporte une petite prise de risque : l'objectif fixé pour une zone géographique donnée ouvre le champ à la concurrence. Prenons l'exemple de la périnatalité : si l'ARH décide de délivrer une autorisation pour une maternité de niveau 2 pour tel territoire où il en existe deux, l'une en secteur privé, l'autre en secteur public, on peut imaginer que l'autorisation sera donnée de préférence à la clinique, si le choix est établi en fonction du moins coûtant. Or j'en reviens au leitmotiv habituel : l'hôpital coûte plus cher parce qu'il a plus de personnel, mieux formé et payé davantage. Si la planification aboutissait à ce genre de dérives, ce serait inacceptable. Mais je pense que les ARH auront un modus operandi différent ".

Méfiance et vigilance sont de mise à l'Union des praticiens des hôpitaux publics (UPHP), membre de l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH), qui ne voit pas d'un bon œil la sortie de l'ordonnance de simplification, " c'est-à-dire (d')une loi publiée par le gouvernement sans débat parlementaire ", qui " vient bouleverser l'organisation sanitaire en donnant une importance cruciale aux ARH qui se voient transférer nombre de pouvoirs décisionnaires jusque-là répartis entre plusieurs interlocuteurs ". Quant aux conférences sanitaires de territoire, elles pourraient être " une heureuse idée, à condition qu'elles ne subissent pas le même sort que les conférences sanitaires de secteur, délaissées par le pouvoir administratif régional ", estime l'UPHP.

 

Delphine CHARDON

 

 

Personnes âgées : une consommation médicale qui inquiète l'assurance-maladie

Quotidien du Médecin du 10/09/2003

 

L'assurance-maladie met une nouvelle fois l'accent sur les conséquences du vieillissement sur la consommation médicale, et notamment celle de médicaments, qui reste importante. Pour les responsables des caisses, c'est un enjeu majeur pour l'avenir du système de protection sociale, même si l'on note une baisse de ce phénomène au cours des derniers mois de la vie.

 

 

C'est clair, le vieillissement continu de la population n'arrange pas les affaires de l'assurance-maladie, dont les comptes sont déjà largement dans le rouge.

 

C'est le constat d'une étude de la CNAM qui note que, si aujourd'hui ce phénomène reste limité, les perspectives d'avenir sont beaucoup plus inquiétantes. Ainsi, écrit-elle, " bien que la consommation médicale croisse avec l'âge, la part que représentent les dépenses des personnes âgées dans la dépense totale du régime général n'est pas très importante (sous-entendu aujourd'hui), car les personnes âgées ne sont pas encore très nombreuses. Mais dans la perspective du vieillissement rapide de la population dans les années à venir, cet équilibre va-t-il pouvoir être préservé ?"

 

L'effet génération

 

Pour les auteurs de cette étude, poser la question, c'est déjà presque y répondre : il est à craindre une forte progression des dépense de santé des personnes âgées au cours des prochaines années. Non seulement parce que le vieillissement va prendre de plus en plus d'ampleur, mais surtout parce que ces personnes se sont habituées tout au long de leur vie active et ensuite à se soigner et à consommer des médicaments. C'est ce que l'assurance-maladie appelle " l'effet génération ". D'autres pourraient expliquer ce phénomène par le fait que les progrès sanitaires et sociaux font que les personnes âgées, très au fait des progrès médicaux, sont de plus en plus nombreuses à vouloir profiter des dernières innovations et des dernières découvertes. Ainsi, en 2000, note d'ailleurs l'assurance-maladie, " le niveau de soins dispensés à une personne de 75 ans à 80 ans est pratiquement le double de ce qu'il était huit ans auparavant ". Preuve d'une demande accrue de soins médicaux. Et confirmation : il faut y voir, poursuit cette étude, " l'effet continu du progrès médical qui, pour de nombreuses pathologies, permet des traitements de plus en plus efficaces mais qui sont souvent coûteux ".

Difficultés supplémentaires pour les comptes de la Sécurité sociale mais non pour la santé des Français, cet effet génération, mis en avant par l'étude de l'assurance-maladie, devient " net à partir de cinquante ans et croît très rapidement ensuite. Et son impact sur les dépenses de santé pourrait être majeur dans le prochaines années ".

Les personnes âgées, poursuit cette étude, sont fréquemment affectées par des pathologies qui font l'objet de progrès techniques majeurs mais coûteux. C'est le cas, bien sûr, de la maladie d'Alzheimer ou de l'hypertension. Face à ces problèmes se pose la question de la prévention, pour éviter que ces maladies ne se généralisent. " Si les innovations thérapeutiques, poursuit cette étude, se concentrent sur des générations plus jeunes, parallèlement à un effort accru de prévention de ces pathologies tardives, leur coût pourrait rester modéré à l'avenir. " A l'inverse, " si ces innovations continuent à se concentrer sur les générations plus âgées, les comportements de consommation observés dans cette étude, devraient aller en s'amplifiant ".

Une analyse qui ne manque pas d'inquiéter sur l'avenir des comptes de l'assurance-maladie. Même s'il est vrai, comme le notent les caisses, que la consommation médicale des personnes âgées tend à diminuer dans la période qui précède le décès. Certes, ce phénomène n'est pas toujours compréhensible mais il reste, comme le note l'assurance-maladie, que la durée moyenne de la vie tendant à augmenter, " cette décroissance de la consommation médicale en fin de vie peut constituer un facteur de relative modération des dépenses de santé ".

Il faut cependant avoir à l'esprit les données que doit rendre publiques la Cour des comptes dans les prochains jours (" le Quotidien " du 17 juillet) : si, en 2001, explique ce rapport, les plus de 65 ans représentaient 16 % de la population, ils consommaient 39 % des médicaments prescrits en ville. Avec les problèmes que cela pose en matière d'inter-indications et de iatrogénie médicamenteuse.

 

Jacques DEGAIN

 

 

Tabac, vin... : les pistes du gouvernement pour le PLFSS

Quotidien du Médecin du 10/09/2003

 

 

 

Matignon rend en ce moment des arbitrages pour le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2004, présenté au Parlement à la fin du mois).

 

On sait désormais que l'exercice, cette année, consiste à donner à la Sécurité sociale les moyens de stabiliser son déficit - probablement 10 milliards d'euros à la fin décembre - et cela revient tout de même à trouver, dans l'urgence, quelque 5 milliards d'euros de recettes nouvelles.

Les cigarettes vont être appelées à la rescousse (" le Quotidien " d'hier). Une forte hausse des taxes sur le tabac (dont une augmentation du prix de 20 % est prévue en octobre) est dans les cartons. Toutes les recettes du tabac devraient alimenter désormais les caisses de l'assurance-maladie, Jean-Pierre Raffarin l'a annoncé la semaine dernière. Cela signifie qu'elles n'iront plus, comme c'est le cas en grande partie aujourd'hui, au fonds de financement des allégements de cotisations sociales patronales (le FOREC, qui sert à financer les 35 heures). FOREC que le gouvernement aurait d'ailleurs le projet de supprimer en 2005 en réinscrivant au budget du ministère des Affaires sociales les allégements de charge qu'il finance (allégements Aubry, puis Fillon liés aux 35 heures, ristournes Juppé sur les bas salaires, aides incitatives De Robien : le tout pour un total de 16 milliards d'euros). Il mettrait fin, ce faisant, à quelques années de liaisons dangereuses, le FOREC ayant été très critiqué depuis son installation par Lionel Jospin, notamment quand, en 2002, sa dette avait été reprise par la CADES (la caisse d'amortissement de la dette sociale).

Les recettes sur les alcools - et tous les alcools, y compris le vin, pour lequel un quadruplement des droits de circulation serait à l'étude - devraient, elles aussi, augmenter l'an prochain. Le gouvernement compterait empocher par ce biais quelque 800 millions d'euros de plus que cette année.

La rumeur met d'autres outils dans la boîte à idées du gouvernement. Une révision à la hausse du forfait hospitalier (aujourd'hui de 10,65 euros) en fait partie, qui mettrait donc davantage à contribution les assurés sociaux et leurs mutuelles. Egalement dans l'air du temps - le Pr Jean-Michel Dubernard, président (UMP) de la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale, l'évoquait la semaine dernière dans nos colonnes : une mise à contribution, via une plus grande surveillance des déclarations d'accidents, des assurances spécifiques en cas d'accidents sportifs ou de la circulation.

Voilà ce sur quoi planchent les services du Premier ministre. Quant aux Français, dans un sondage CSA, paru lundi dans le quotidien économique " la Tribune ", ils sont partagés sur la marche à suivre pour préserver le financement de leur système de santé : 35 % optent pour la baisse du niveau de remboursement des médicaments, 30 % pour l'augmentation de la part prise en charge par l'assuré pour les consultations et 20 % pour l'augmentation " des prélèvements comme la CSG ". 23 % ne se prononcent pas.

 

K. P.

 

 

Quotidien du médecin du 09/09/2003

Pour réformer la Sécu, le gouvernement poursuit son discours de la méthode

 

Jean-François Mattei a expliqué aux grandes centrales syndicales la ligne choisie par les pouvoirs publics pour moderniser la Sécurité sociale.

 

 

Le ministre de la Santé a continué à recevoir les grandes centrales syndicales pour évoquer avec elles la future réforme de la Sécurité sociale.

 

A Force Ouvrière, à la CFE-CGC, au Medef, Jean-François Mattei a, une nouvelle fois, expliqué la ligne que le gouvernement allait suivre : clarifier les circuits de financement et adopter des mesures de stabilisation des déficits en 2004 ; attendre 2005 pour faire plus après avoir mené jusqu'en mars une très large concertation. De ce fait, le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale (le PLFSS 2004) sera, comme le précédent, un texte " de transition ", a expliqué le ministre à Jean-Luc Cazette, le président de la CFE-CGC, qui se dit " satisfait de la méthode proposée ".

 

Le Medef ne veut pas d'un déficit " vertigineux "

 

Après sa rencontre avec Jean-François Mattei, Marc Blondel, secrétaire général de FO, se trouve lui aussi - c'est une première - sur la même longueur d'ondes que les pouvoirs publics : " Pour l'instant, explique le leader de Force Ouvrière dans " France-Soir ", voulant éviter une rentrée dure, Mattei dit la même chose que moi, il laisse entendre qu'il abandonne la maîtrise comptable qui était le principe de la réforme Juppé en 1995 [...] Il affirme que la santé peut coûter plus cher que la croissance. D'une certaine façon, il justifie le déficit ". Considérant que ce point de vue est " à l'inverse même d'une politique libérale et d'une couverture individuelle ", le secrétaire général conclut : " J'ai intérêt à soutenir cela ", sans écarter, toutefois, l'hypothèse d'un revirement du gouvernement sous la pression de Bruxelles.

Au Medef, on veut croire aussi que la réforme part sur de bonnes bases. Ernest-Antoine Seillière, président de l'organisation patronale, est sorti de son entretien au ministère de la Santé " avec le sentiment que la réforme de l'assurance-maladie était lancée ". Preuve de sa volonté de voir aboutir ce chantier : le Medef, qui avait refusé de siéger au " Conseil d'orientation des retraites " lors des discussions préalables à la réforme des retraites, a accepté de faire partie du " haut conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie ". Il considère en effet que cette instance est faite " pour accélérer une réforme jugée indispensable ".

Soufflant le chaud et le froid, Ernest-Antoine Seillière met en garde le gouvernement : la réforme, explique-t-il, " passe par un préalable de crédibilité qui est la prise dans les prochaines semaines de mesures destinées à stabiliser un déficit déjà énorme pour qu'il ne devienne pas vertigineux ". Ces mesures, le Premier ministre l'a fait savoir à plusieurs reprises (voir " le Quotidien " d'hier), ne comprendront pas, en tout cas, une hausse de la CSG (contribution sociale généralisée). Sur TF1, Jean-Pierre Raffarin a insisté : augmenter la CSG n'est pas d'actualité puisque le gouvernement " ne veut pas augmenter les prélèvements sur les Français ". Il compte donc sur d'autres recettes. " Par exemple, cite le chef du gouvernement, nous avons décidé d'affecter toutes les recettes de la fiscalité du tabac à la santé ".

Pour l'ancien ministre socialiste des Finances Dominique Strauss-Kahn, le Premier ministre se trompe d'analyse : le déficit de l'assurance-maladie doit mener " inéluctablement à une hausse de la CSG ". Dans un entretien publié par " le Monde ", DSK fait valoir que pour réduire le déficit il n'y a " que deux pistes ". D'abord " la maîtrise des dépenses de santé ". Or, selon l'ancien ministre, le gouvernement " fait l'inverse depuis quinze mois " et c'est " en partie ce laxisme qui mène à l'impasse financière ". Ensuite, " trouver des recettes ", et " quand les bases s'essoufflent à cause de la faiblesse de la croissance, il n'y a pas d'autre solution que d'augmenter les taux ".

 

Quotidien du médecin du 09/09/2003

 

 

Dans notre rubrique " reclassement "….

 

(c’est lui qui proposait de supprimer 1 emploi sur 5 dans les hôpitaux en 1999…)

 

Gilles Johanet aux AGF

 

L'ancien directeur de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM), Gilles Johanet, va diriger les activités " santé et collectives " des AGF, troisième assureur français, à partir du 15 septembre, révèle " le Monde " dans son édition datée du 6 septembre. Magistrat à la Cour des comptes, Gilles Johanet a dirigé la CNAM à deux reprises : entre 1989 et 1993 et entre 1998 et 2002.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ces dossiers qui attendent le gouvernement

Sécu : un terrain miné par des déficits record

 

Le calendrier est parfois cruel. Très affaibli par la catastrophe sanitaire qu'a provoquée la canicule et meurtri par les accusations répétées de mauvaise gestion ou d'aveuglement portées contre lui au lendemain d'un été meurtrier, Jean-François Mattei (dont le remplacement a même été évoqué par plusieurs articles) doit désormais prendre à bras le corps, avec autorité, un autre dossier explosif : la réforme de la Sécurité sociale.

 

Même si Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin ont tenté de déminer le terrain avant l'été, en précisant que l'" adaptation " de notre système de protection sociale se ferait par étapes et dans la concertation, jusqu'à l'automne 2004 (voire sur l'ensemble de la législature), le déficit vertigineux de l'assurance-maladie, qui approchera 16 milliards d'euros sur deux ans (2002-2003), exige des mesures de financement urgentes pour renflouer la trésorerie. Mais au moment où dix jours de canicule ont ébranlé notre système sanitaire et révélé la détresse extrême des personnes les plus fragiles, l'opinion publique aura sans doute encore plus de mal à accepter des décisions douloureuses. D'autant que, contrairement à la réforme des retraites, ce qui touche à l'assurance-maladie a un impact immédiat et sur l'ensemble des Français. Selon un sondage CSA (1) publié par " l'Expansion ", seulement 22 % des Français seraient prêts à prendre davantage en charge financièrement leurs dépenses de santé pour équilibrer durablement les comptes de la Sécu.

 

PLFSS sous tension

 

Quoi qu'il en soit, des échéances cruciales attendent le ministre de la Santé dans les prochaines semaines sur ce dossier. Dès la seconde quinzaine de septembre, Jean-François Mattei aura la confirmation de l'ampleur de sa tâche, avec la traditionnelle réunion de la commission des comptes de la Sécurité sociale qui devrait délivrer un verdict accablant. Pour la seule année 2003, le déficit de l'assurance-maladie tendra vers les 10 milliards d'euros. Dans un contexte où la progression des dépenses d'assurance-maladie ne faiblit pas (6,5 % sur un an, selon les derniers chiffres de la CNAM) et, surtout, où le ralentissement économique tarit les rentrées de cotisations, l'effet de " ciseaux " est inévitable. L'ardoise sera donc salée. Mais le gouvernement s'interdit toujours d'augmenter la CSG, dont un point supplémentaire rapporterait pourtant 9 milliards d'euros. Il faudra donc faire preuve d'imagination. Lors de cette réunion de la commission des comptes, le ministre de la Santé dévoilera les grandes lignes du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2004, que Jean-François Mattei défendra publiquement à la fin d'octobre. Des jalons seront posés pour permettre d'accroître le rôle et la part des organismes complémentaires dans la gestion des dépenses. Le gouvernement devra aussi proposer au Parlement de voter un nouvel Objectif national de dépenses d'assurance-maladie (ONDAM) sur des bases médicales plus crédibles.

Dès le début du mois de septembre, le ministre doit, en outre, ouvrir une phase de concertation " poussée " avec les partenaires sociaux, en espérant aboutir à un consensus sur la nouvelle architecture du système de santé et d'assurance-maladie. Cette réforme de la " gouvernance ", qui impose une clarification des rôles entre l'Etat et les partenaires sociaux, devrait faire l'objet d'un projet de loi spécifique. Certains, comme Alain Juppé, plaident carrément pour la création d'une " cinquième branche de la Sécurité sociale " consacrée spécifiquement à la dépendance des personnes âgées.

Déficits record, tensions sociales... Le 30 juillet dernier, Jean-François Mattei déclarait à " Libération " que la rentrée serait pour lui forcément " délicate ". C'était juste avant la vague de canicule.

 

Cyrille DUPUIS

 

(1) Le sondage a été réalisé les 8 et 9 août auprès d'un échantillon représentatif de 1 001 personnes âgées de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

Article publié dans "le Quotidien du Médecin" du 02/09/2003

A lire aussi :

Jean-Michel Dubernard : pour sauver la Sécu, colmatons d'abord les brèches (04/09/2003)

Sécu : face au gouffre, le gouvernement refuse la thérapie de choc (03/09/2003)

 

 

Ces dossiers qui attendent le gouvernement

Médecine libérale : le début de la fin de la crise ?

 

Le gouvernement devra faire preuve d'habileté en cette fin d'année pour ne pas fâcher les médecins libéraux. Eux qui mettaient beaucoup d'espoir dans l'arrivée au pouvoir de la droite, et surtout dans l'arrivée de Jean-François Mattei au ministère de la Santé, sont aujourd'hui assez sceptiques sur la politique suivie par le gouvernement Raffarin à leur égard et plus largement en matière de santé.

 

 

Ils ont certes applaudi à la première initiative de Jean-François Mattei d'accorder en juin 2002 le C à 20 euros aux généralistes - ce qui mettait fin à l'un des plus importants mouvements de protestation des médecins depuis longtemps et à la grève des gardes du week-end et des jours fériés. Mais, depuis, ils n'ont guère eu de motif de satisfaction.

Ils n'en tiennent pas encore vraiment rigueur au gouvernement, non coupable, estiment-ils, de l'échec des négociations entre les syndicats médicaux et les caisses d'assurance-maladie en avril dernier, puis de la rupture entre ces deux partenaires. Mais cela pourrait ne plus durer.

Inquiet des mouvements de déconventionnement qui ont fleuri un peu partout en France ces derniers mois et des consignes de dépassements d'honoraires lancées par des coordinations médicales de spécialistes de plus en plus importantes et populaires, le gouvernement n'a pas voulu pour autant mettre de l'huile sur le feu en jetant le discrédit et l'anathème sur des mouvements qui ont pris un poids certain dans le monde médical. D'autant que ces mouvements n'étaient pas réellement condamnés par l'opinion publique, malgré les avertissements et les mise en garde des caisses locales. Il est évident qu'une telle situation ne peut s'éterniser.

Et les premiers signes de cette rentrée montrent d'ailleurs une certaine accalmie. Déjà, dans l'ouest de la France, notamment dans l'Orne et dans la Sarthe, là où les conflits ont été les plus durs, caisses et coordinations ont décidé de jouer l'apaisement et les spécialistes ont stoppé leur mouvement de déconventionnement.

L'accord signé entre la CSMF, le plus important syndicat médical libéral, et la CNAM, portant sur la revalorisation de certaines spécialités cliniques et la psychiatrie, malgré les oppositions qu'il a suscitées chez certaines organisations, est aussi un signe d'apaisement et de bonne volonté. Ce qui montre, dit-on dans les milieux gouvernementaux, que la raison commence à l'emporter. On n'en est peut-être pas encore vraiment là.

L'application du règlement conventionnel minimal, qui devrait contenir ces mesures, pourrait intervenir dans les premiers jours de septembre, espèrent les syndicats médicaux, et notamment la CSMF, qui défend cet accord surtout sous le prétexte que les médecins n'auraient rien obtenu du tout si elle n'avait pas signé. Une signature que d'aucuns disent surtout acquise par la pression du gouvernement sur les responsables de la CSMF, ce que ces derniers nient farouchement. Mais la suspicion est réelle.

Reste que l'accord est loin de tout régler : c'est l'avenir du système conventionnel qui est aujourd'hui clairement posé depuis l'échec des négociations entre caisses et syndicats. Ceux-ci réunissent leurs états généraux (le SML) ou leur université d'été (la CSMF) ; ils devront clairement affirmer leurs idées de réforme en la matière et plancher sur les nouvelles relations qui pourraient exister entre ces trois partenaires que sont le médecins, l'assurance-maladie et l'Etat. De même, l'UMESPE, qui regroupe les spécialistes de la CSMF et qui convoque le 13 septembre les Assises de la médecine libérale, devra présenter ses projets de réforme pour promouvoir la médecine spécialisée.

Le gouvernement sera attentif au déroulement de ces différents forums. Nul doute que l'on pourra, en ces diverses occasions, avoir une idée précise de l'état d'esprit des médecins, et notamment des spécialistes qui sont montés au créneau au cours des derniers mois. Alors que le ministre de la Santé est toujours préoccupé, c'est le moins, par les conséquences de la canicule et que toutes les retombées politiques de cette crise sanitaire ne sont pas encore terminées, il n'a pas besoin de voir le monde médical libéral le prendre à partie et lui demander des comptes. La réforme de la Sécurité sociale risque, déjà, de prendre du retard malgré des comptes catastrophiques. Le pire serait que les médecins, et plus largement les professionnels de santé libéraux, entrent en effervescence. Le gouvernement fera tout pour l'éviter.

 

Jacques DEGAIN

Article publié dans "le Quotidien du Médecin" du 02/09/2003

 

Ces dossiers qui attendent le gouvernement

Hôpital : la réforme reste dans le flou

 

La plus grande incertitude planait la semaine dernière sur le calendrier à venir des débats consacrés à la réforme de l'hôpital public. Des débats qui concerneront à la fois le plan Hôpital 2007 (et l'intégration, évoquée par Jean-Pierre Raffarin, d'un volet spécifique sur les urgences), la réforme du financement, celle de la gouvernance hospitalière, le suivi de la mise en place de la RTT, le taux d'évolution des dépenses de l'institution pour 2004...

 

 

Explication du ministère de la Santé : " On sort tout juste de la gestion de la crise dans les hôpitaux, il faut laisser un peu de temps pour reprendre tous ces dossiers. " Un premier bilan sera fait demain au ministère sur trois volets du plan Hôpital 2007 : l'investissement, la tarification à l'activité et la planification sanitaire. A ce sujet, les ordonnances de simplification hospitalières, qui revoient en les assouplissant les règles de la planification sanitaire, passent demain en conseil des ministres.

Peut-être en saura-t-on davantage dès aujourd'hui sur le programme de la rentrée : le ministre de la Santé, Jean-François Mattei, reçoit l'ensemble des acteurs du monde hospitalier (public et privé) pour faire le point sur la canicule, après les avoir reçus un par un la semaine dernière. Les représentants syndicaux espèrent y apprendre le calendrier des réunions des quatre groupes de travail consacrés à la gouvernance hospitalière, au financement des hôpitaux, au statut des directeurs et au statut des médecins hospitaliers. Mis en place à la fin de juillet, ces ateliers sont censés commencer leurs travaux en septembre (la première réunion prévue se tiendra jeudi prochain, sur la gouvernance). D'après certains, le calendrier est maintenu. Mais, pour d'autres, le planning aurait été repoussé de deux ou trois semaines, le temps de mener une réflexion approfondie sur la gestion de la canicule. Dans tous les cas, le résultat des travaux est attendu pour la fin de novembre.

Pour le Dr Rachel Bocher, présidente de l'INPH, les thèmes de réflexion choisis par le ministre sont déplacés : " Plancher sur la gouvernance m'apparaît surréaliste vu l'été passé. Ça n'est pas le souci du patient, qui se demande surtout comment se passent l'accès aux soins et la permanence des soins dans les hôpitaux ", dit-elle.

" La démonstration est faite de l'absolue nécessité de sortir de l'hospitalo-centrisme pour mettre en œuvre rapidement et concrètement des réseaux ville-hôpital, les souffrances rencontrées par les personnes âgées le démontrent ", poursuit le Dr Bocher.

La crise sanitaire de cet été rappelle que l'hôpital travaille à flux tendu. Les urgentistes, le Dr Patrick Pelloux en tête, n'ont eu de cesse depuis des années de mettre en garde le gouvernement contre les risques liés à la restriction de leurs moyens. Le 16 août, Jean-Pierre Raffarin s'est exprimé sur le sujet. Il juge désormais indispensable de " revoir notre système d'urgences dont le rôle doit être revalorisé dans l'organisation de l'hôpital ". " Ce sera l'une des priorités du plan Hôpital 2007 ", " nous devrons boucler ce dossier pour l'automne 2004 ", a-t-il ajouté.

Un engagement repris par son ministre de la Santé : " On voit que les urgences ont besoin de davantage de moyens en équipement et en personnel ", ce qui nécessite " des créations de postes ", a déclaré Jean-François Mattei. Pour autant, aucun responsable syndical ne sait aujourd'hui quoi que ce soit sur le lancement hypothétique d'un plan urgences. D'après le ministère, les premiers éléments de cette réflexion, qui s'inscrit " sur le long terme ", ne sont pas attendus avant le début d'octobre.

Rien ne filtre également sur le taux de l'ONDAM hospitalier 2004, qui sera défini par la loi de financement de la Sécurité sociale en cours de préparation. La Fédération hospitalière de France (FHF) réclame une dotation en hausse de 4,47 % pour les hôpitaux. Un taux qualifié d'" incompressible ", " ne comprenant pas le nécessaire renforcement des urgences ", et en deçà duquel les directeurs devraient " réduire les effectifs du personnel ". La Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) s'appuie, quant à elle, sur une étude de la DREES selon laquelle 38 % des cliniques seraient en déficit (voir page 6), pour réclamer un taux important de reconduction des moyens des cliniques.

Si la tarification à l'activité entre en pratique dès le 1er janvier, 2004 sera la dernière année où les secteurs hospitaliers public et privé recevront une enveloppe budgétaire séparée. On s'oriente ensuite vers une enveloppe unique.

 

Delphine CHARDON

Article publié dans "le Quotidien du Médecin" du 02/09/2003

 

 

Ces dossiers qui attendent le gouvernement

Etudes médicales : en route vers le premier examen national classant

 

L'internat de médecine aura connu ses dernières heures à la session de juin. En 2004, il prendra en effet la formule d'" examen national classant ".

 

Pour la majorité, l'extension de ce concours aux futurs généralistes ne peut que représenter un progrès, l'idée centrale étant de faire passer à ces médecins le même diplôme que les autres spécialistes et atténuer ainsi, si ce n'est faire disparaître, l'éternelle rivalité spécialistes-généralistes. D'autres restent toutefois sceptiques quant à la préparation de cette réforme. " Nous sommes bien sûr favorables à ce que la médecine générale devienne une spécialité, explique Olivier Guérin, président de l'ISNIH (Intersyndicat national des internes des hôpitaux), mais encore faudrait-il que la formation des généralistes soit de même durée que celle des spécialistes. "

L'examen national classant devrait donc avoir lieu fin mai-début juin, comme précédemment. On en ignore encore la date exacte. Les résultats devraient être diffusés en juillet et la procédure de choix devrait se dérouler en septembre 2004. L'examen reste par ailleurs organisé par le ministère de la Santé alors qu'il aurait dû l'être conjointement avec celui de l'Education nationale. Mais les moyens de compétence et financiers ne semblent pas encore avoir été transmis à ce ministère.

Le décret modifiant le décret de 1988, sur l'organisation de l'internat, devrait être remis demain aux rapporteurs du Conseil d'Etat et passer en séance plénière du Conseil d'Etat dans une quinzaine de jours. On peut donc espérer sa publication au " Journal officiel " au début d'octobre.

Ce décret, s'il est validé par le Conseil d'Etat, devrait régler la délicate question de la dérogation pour les postulants à la médecine générale. En effet, les étudiants qui ne seront pas classés en rang utile en médecine générale devraient être affectés en surnombre dans la ville d'origine de leur formation.

Concernant le PCEM 1, rien de nouveau pour cette rentrée, sauf l'arrivée des sages-femmes sur les bancs de toutes les facultés de médecine de France. Pour les quatorze autres " métiers de santé ", il faudra encore attendre quelques années.

Le rapport d'étape du Pr Domitien Debouzie, président de l'université Claude-Bernard à Lyon, fruit des travaux de la commission pédagogique nationale pour la réforme de la première année des études de santé (PAES), devrait être officiellement remis aux ministères de la Santé et de l'Education au début de septembre. Ce document, qui propose une quinzaine d'orientations pour le rassemblement de tous les étudiants se destinant à un métier médical et paramédical au sein d'une même promotion, reste cependant un document de travail. La route risque d'être encore longue avant que ne soit effective la fameuse grande réforme des études de santé.

 

Audrey BUSSIERE

Article publié dans "le Quotidien du Médecin" du 02/09/2003

 

 

Permanence des soins :

la crise sanitaire peut-elle remettre en cause le principe du volontariat ?

 

Le drame sanitaire du mois dernier, avec ses milliers de décès liés à la canicule, a été l'occasion pour certains de réclamer la réorganisation de la permanence des soins et la mise en place de procédures d'alerte. Le système du volontariat, en particulier, fait l'objet de fortes critiques.

 

 

" Si, comme l'ont affirmé certains, il n'y avait pas suffisamment de médecins libéraux de garde le 15 août, pourquoi les préfets n'ont-ils pas réquisitionné ? Cela mériterait des sanctions... Il semblerait aussi que le système n'ait pas bien fonctionné. A la tête de la mission que j'ai menée sur la permanence des soins, j'ai accepté de défendre le principe du volontariat, mais à condition qu'il fonctionne ! Si on a manqué de médecins de garde libéraux au cours de la canicule, alors la permanence des soins dans son ensemble n'est pas organisée de façon satisfaisante et tout est à reprendre. " Et d'abord le système du volontariat.

 

Parole de Charles Descours, président de la mission du même nom sur la permanence des soins, qui ajoute cependant : " Cela dit, selon le syndicat MG-France, plus de 3 000 médecins généralistes étaient de garde lors du week-end du 15 août ; mais pour autant, jamais on n'avait assisté à un tel engorgement des urgences hospitalières. Cela montre que, s'il faut bien sûr donner de plus grands moyens aux urgences, dans un cas pareil, il faut surtout améliorer la prise en charge des urgences de proximité par les médecins libéraux, peut-être en utilisant mieux les possibilités qu'offrent les maisons médicales de garde (MMG) ".

Pour Charles Descours, un autre problème révélé par le drame estival aura été celui du dépistage de l'épidémiologie. Selon lui, les systèmes de veille sanitaire savent s'y prendre pour les maladies infectieuses du type grippe, sida, légionellose, mais " ils n'ont pas la culture de ce genre de catastrophe ; peut-être faudrait-il émettre des bulletins d'alerte comme cela se fait pour la météo ? ".

Un point de vue sur la prise en charge des urgences de proximité par les médecins libéraux que semble partager le Dr Michel Chassang, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), pour qui " la priorité dans la prise en charge doit se situer en amont des structures hospitalières ".

 

Les médecins " ont fait leur devoir "

 

A la Fédération des médecins de France (FMF), le président, Jean-Claude Régi, en est convaincu : " La médecine libérale, contrairement à ce qu'ont dit certains, n'a pas failli dans sa mission, et les médecins libéraux n'ont pas démérité durant la période estivale. " Jean-Claude Régi refuse toute remise en cause d'une permanence des soins basée sur le volontariat : " Le volontariat, ce n'est pas la défausse, c'est la responsabilité ; mais pour exercer une responsabilité, encore faut-il disposer de moyens. Si la permanence des soins dispose de moyens, en termes d'organisation et en termes financiers, on trouvera des volontaires, croyez-moi. "

Du côté de l'UNOF, branche généraliste de la CSMF, le ton est plus incisif encore, et le président Michel Combier refuse que les médecins libéraux fassent office de bouc émissaire : " Ceux qui depuis des années font tout pour diminuer les moyens de la médecine de proximité à la tête de la CNAM (Caisse nationale d'assurance-maladie) nous donnent des leçons ; mais les médecins ont fait leur devoir, à l'instar des autres professionnels de santé. Ayons l'humilité, chacun à son niveau, d'accepter notre part dans la crise que le pays vient de traverser, et de faire comprendre à nos concitoyens que rien ne sera possible sans une prise de conscience des priorités vitales pour la vie en société, avec les conséquences financières que cela implique : la santé avant la bagnole, les personnes âgées avant les loisirs. "

Au Conseil national de l'Ordre des médecins (CNOM), l'heure semble être à la réflexion. L'Ordre a indiqué dès le 21 août vouloir apporter sa contribution à la réflexion engagée par la mission d'experts mise en place par le ministère de la Santé sur l'analyse de la crise sanitaire et sur l'évaluation du système d'alerte, et ajoute qu'il entend " mettre à la disposition de cette mission ses travaux de réflexion sur l'alerte sanitaire, la santé publique et l'organisation des soins ".

Un responsable du CNOM indique au " Quotidien " que, dès le 15 ou le 16 août, l'institution a demandé à l'ensemble des ordres départementaux des informations détaillées sur ce qui s'était passé, afin de pouvoir en tirer des enseignements sur une éventuelle réorganisation des systèmes de soins et d'alerte. Mais à ce jour, les informations recueillies sont encore trop parcellaires et l'Ordre ne souhaite pas s'exprimer plus en détail tant qu'il ne disposera pas de données complètes sur ce sujet.

Frédéric Bastian, le président de SOS-Médecins, a quant à lui une petite idée sur ce qui s'est passé durant l'été : " A SOS, nous disposons d'un outil performant pour recueillir les données épidémiologiques, et dès le 14 juillet, nous avons constaté une augmentation de 10 % de notre activité globale, qui est montée jusqu'à 25 % entre le 1er et le 15 août. Pour cette même période, l'augmentation de notre activité a eu des pics à + 60 % pour la région de Tours, à + 40 % pour Bourges, et + 35 % à Grenoble, pour ne citer que ces villes. Et cette carte d'activité rejoint assez précisément la carte des zones de forte canicule. " Des chiffres confirmés par Emmanuel Sarrazin, président de SOS-Médecins Tours qui indique qu'entre le 1er et le 15 août 2000 les médecins de SOS-Médecins ont signé 53 certificats de décès, alors que pour la même période, ils en avaient signé 6 en 2002 et seulement 4 en 2001.

Selon le Dr Bastian, SO-Médecins a alerté les médias dès le 1er août, " mais on ne nous a pas trop écoutés ". De même, toujours selon lui, SOS-Médecins Tours a tenté d'alerter les autorités sanitaires, mais sans grand succès non plus. On peut s'en étonner, mais SOS-Médecins, qui dispose d'un maillage national important, n'est pas tenu d'alerter les autorités sanitaires quand se produisent des événements semblables, et aucune procédure n'est prévue dans ces cas-là par les pouvoirs publics. Frédéric Bastian est " ouvert à toute forme de synergie avec les réseaux de veille sanitaire ", mais encore faudrait-il qu'un accord soit mis sur pied entre SOS et ces réseaux. Quant à l'implication des médecins libéraux en général, et de SOS-Médecins en particulier, Frédéric Bastian est formel : " Les libéraux, d'où qu'ils viennent, ont joué le jeu durant la canicule ; mais on ne peut que constater que là où nos structures étaient présentes, il n'y a pas eu de problème majeur. Nous avons traité la situation exactement de la même manière que s'il s'était agi d'une épidémie de grippe ou d'une vague de froid. " Le président de SOS-Médecins sait aussi prêcher pour sa paroisse et, interrogé sur les éventuelles modifications qu'il faudrait apporter à l'organisation de la permanence des soins, il n'hésite pas à répondre que " là où SOS-Médecins est présent, la permanence des soins doit s'organiser autour de cette structure ".

Enfin, pour Patrick Pelloux, héraut incontesté de cet été meurtrier, il est grand temps que les pouvoirs publics comprennent qu'il n'est plus possible de fermer des lits d'hôpital l'été ni d'abandonner les consultations, sous prétexte de vouloir faire des économies. Le président de l'Association des médecins urgentistes hospitaliers de France (AMUHF) souhaite par ailleurs que les services d'urgences hospitalières soient enfin dirigés par de véritables chefs de service " et non par tel ou tel au gré des disponibilités ". Quant à la permanence des soins libérale, elle ne trouve pas non plus grâce à ses yeux : " Les événements de cet été ont mis en évidence la faillite du volontariat, tout au moins là où il n'a pas fonctionné. Comment se fait-il que SOS-Médecins ait assuré la permanence des soins quasiment à elle toute seule dans un certain nombre de villes ? Il paraît qu'il n'y avait que deux généralistes de garde dans les Hauts-de-Seine le 15 août... Si c'est vrai, on se fout du monde. Ça aura au moins prouvé que SOS-Médecins, ça marche ". Patrick Pelloux estime par ailleurs qu'il est grand temps de " réformer la direction générale de la Santé (DGS) et l'Institut national de veille sanitaire ".

" Je vais vous dire quelque chose, conclut-il : pendant la période de canicule, tout le monde est venu nous aider, tout le monde, sauf les étudiants en médecine qui ne se sont pas sentis du tout concernés. "

 

Henri de SAINT ROMAN

Quotidien du Médecin, 05/09/2003

 

 

 

Jean-François Mattei impatiente les hospitaliers

 

Le ministre de la Santé a mécontenté les professionnels de l'hôpital en leur présentant mardi, lors d'un premier bilan de la canicule, un calendrier de mise en œuvre de sa politique hospitalière jugé incohérent et hors sujet.

 

Il faudra patienter encore un peu, " jusqu'au premier octobre au plus tard ", promet le ministère de la Santé, pour connaître en détail les modalités d'application des volets investissement et tarification à l'activité du plan Hôpital 2007.

 

Jean-François Mattei, qui devait s'exprimer sur ces deux dossiers avant-hier, a reporté sa communication à la demande de Jacques Chirac, qui a souhaité que le ministre de la Santé soit présent à ses côtés au cimetière de Thiais (Val-de-Marne), lors de la cérémonie officielle organisée pour les 57 victimes de la canicule dont les familles n'ont pas été retrouvées.

La relance de l'investissement hospitalier, Jean-François Mattei l'a largement évoquée mardi matin, lorsqu'il a réuni le monde hospitalier au sujet de la canicule. " Le ministre nous a promis monts et merveilles, des moyens supplémentaires importants, raconte le secrétaire national de Sud Santé, Thierry Lescant, mais, en même temps, il ne nous a donné aucun chiffre ". SUD était venu au ministère réaffirmer ses exigences : davantage de moyens et de personnel pour l'hôpital. Des exigences " que la canicule a confirmées et qui visent à éviter une nouvelle catastrophe, une épidémie de grippe pouvant avoir les mêmes conséquences ", dit-il. Mais déception, Thierry Lescant n'a rencontré " aucune volonté affichée de lancer de nouvelles mesures ", n'a obtenu " aucune précision sur l'ONDAM " (objectif national des dépenses d'assurance-maladie). Aucune allusion, non plus, à la prime promise par Jean-Pierre Raffarin.

" A part les remerciements, le ministre n'avait rien à proposer. La réunion a pris des allures de psychothérapie de groupe, où chacun a pu vider ses angoisses. On a cherché le divan, on ne l'a pas vu ! A la fin, le ministre nous a prescrit deux séances supplémentaires. Point. Sa politique est loin d'apaiser nos inquiétudes. "

 

Nouvelle phase de " réunionnite aiguë "

 

Un sentiment partagé par les autres syndicats de personnel. Jean-Marie Bellot, secrétaire général de FO santé, commente : " On a dit au ministre qu'il manque un groupe de travail consacré au personnel paramédical dans son plan Hôpital 2007. Car il est là le problème : la pénurie de personnel ! Mais notre remarque est tombée à plat. Seule certitude, et elle est loin de nous satisfaire, on entre dans une phase de réunionnite aiguë. "

Mardi dernier, l'agenda des professionnels s'est effectivement bien rempli. De nouvelles convocations ont été lancées par le ministère de la Santé : les 8 et 9 septembre, débat sur les personnes âgées, puis retour sur le bilan de la canicule les 12 et 17 septembre avec les hospitaliers. Reportés de deux semaines, les travaux des quatre groupes mis en place dans le cadre du plan Hôpital 2007 commenceront le 18 septembre. " Avec le gouvernement, on parle d'hôpital le matin, de solidarité l'après-midi, de Sécu le soir, constate Nadine Prigent, de la fédération santé de la CGT, mon sentiment est qu'on découpe les problèmes et que l'on ne veut pas les aborder dans le cadre d'une politique de santé. "

Même impression de " dispersion " pour Thierry Lescant, de Sud Santé, qui regrette " cet étalage du calendrier pour annoncer des mesures complètement morcelées ".

Côté syndicats de médecins hospitaliers, les critiques sont du même ton. " On manque de visibilité, résume le Dr Pierre Faraggi, président de la Confédération des hôpitaux généraux (CHG). On ferait mieux de donner des moyens et de prévoir la démographie plutôt que de retravailler l'organisation interne de l'hôpital dans la précipitation ", via les quatre groupes de travail d'Hôpital 2007. Du discours ministériel, le Dr Rachel Bocher n'a retenu qu'" une cascade de mots qui ressemble à de l'anesthésie, la définition des vraies priorités étant reportée à plus tard ".

Le directeur de la FEHAP (Fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privés à but non lucratif) reconnaît qu'" il n'est pas simple pour le ministre de faire face à une situation dont il ne connaît pas encore la bonne analyse ". Cela étant, ses propos tournent vite au reproche : " Le ministre a conservé une grande ambition par rapport à Hôpital 2007 quand il nous en parle. On a un calendrier d'enfer sur tous les thèmes à la fois, raconte Georges Riffart. Or à partir de ce drame, nos demandes sont très basiques : on attend qu'on nous dise ce qui s'est passé dans les hôpitaux et les maisons de retraite et quelles sont les nouvelles préoccupations de santé publique. "

 

Delphine CHARDON

QdM du 05/09/2003

 

 

 

Assurance-maladie : diagnostic de fond avant ordonnance

 

On connaît désormais le calendrier (étalé) et la méthode (prudente) de Jean-François Mattei pour moderniser l'assurance-maladie. Un " Haut Conseil " posera un diagnostic d'ici à novembre. Des groupes de travail conduiront ensuite une concertation de plusieurs mois, l'objectif étant de proposer un texte abouti à l'automne 2004. Bref, une très longue préparation de l'opinion...

 

Lors de ses entretiens avec les partenaires sociaux cette semaine, Jean-François Mattei a précisé sa méthode et son calendrier pour moderniser l'assurance-maladie " face aux besoins nouveaux de la société d'aujourd'hui ".

 

Epousant les grandes lignes du discours de Jacques Chirac prononcé au congrès de la Mutualité française, à Toulouse en juin dernier, le ministre de la Santé a joué la carte de la prudence, des petits pas, et du dialogue social : le " processus de modernisation du système de santé et d'assurance-maladie " obéira donc à un calendrier étalé sur une année entière. Le projet de loi de réforme ne sera soumis au Parlement qu'à l'automne prochain, à l'issue d'une dizaine de mois de concertation.

 

Les médecins consultés

 

D'ici à la fin du mois de novembre, une instance imitant le Conseil d'orientation des retraites (COR) doit poser un premier diagnostic " partagé ", et préparer progressivement l'opinion à la nécessité de mesures structurelles. Ce " haut conseil de l'assurance-maladie ", qui pourrait réunir 45 membres, devrait être installé rapidement. Les partenaires sociaux (confédérations de salariés et patronat), quelques parlementaires et hauts fonctionnaires, des représentants des organismes complémentaires, des usagers, des établissements publics et privés et des professionnels de santé libéraux (sans doute cinq) feront partie de cette instance. Dans un deuxième temps, le ministre de la Santé (ré)utilisera la bonne vieille méthode des groupes de travail, chargés de conduire une concertation au moins jusqu'au printemps 2004 (février-mars). Plusieurs dossiers lourds devraient y être traités, dont la simplification du financement de l'assurance-maladie, le financement spécifique de la dépendance, la nouvelle " gouvernance " (clarification des rôles de l'Etat et de la Sécu), les modalités de la montée en puissance des organismes complémentaires avec, à la clé, d'éventuels transferts de charges, l'avenir du partenariat conventionnel ou encore les relations ville-hôpital. " Des sous-groupes sur la démographie, la permanence des soins et les réseaux ont également été cités ", précise le Dr Jacques Reignault, président du Centre national des professions de santé (CNPS), reçu avant-hier au ministère.

C'est à l'issue de cette longue phase de discussions et de conclaves divers que le gouvernement élaborera une première synthèse, c'est-à-dire un " projet santé concerté ", au printemps 2004. Le ministre a promis un dialogue " très ouvert " et en a fixé deux limites : " Ni étatisation ni privatisation. "

 

Désir de revanche ?

 

Sans surprise, les deux confédérations de salariés échaudées par l'épisode des retraites (CGT et FO) ont affiché leur méfiance, sans toutefois trop durcir leur discours. Sur France Inter, Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT, a craint que le gouvernement soit " un peu plus sensible aux arguments du Medef qu'à ceux des salariés " si ces derniers n'exercent pas une certaine " pression qui va nécessiter une implication des intéressés ". Marc Blondel, secrétaire général de FO, exige de son côté " une négociation, pas seulement une concertation ". Sous-entendu : le dialogue social devra être extrêmement poussé pour faire passer une réforme qui concernera tous les Français sans exception. La CFDT est prête à jouer le jeu, sous réserve qu'il y ait une réforme de fond l'année prochaine et non pas une simple réformette (voir encadré). " Le calendrier est bon ", a commenté François Chérèque.

Le mois prochain, Jean-François Mattei défendra donc pour la deuxième fois un projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) sans révolution (" le Quotidien " d'hier). L'ambition du gouvernement est en effet désormais de " contenir " le déficit du régime général en 2004 au niveau de celui de 2003, et non plus de le résorber. Le PLFSS devrait du moins permettre de trouver quelques milliards d'euros de recettes nouvelles, en cours d'arbitrage (taxes sur le tabac, l'alcool, etc.), d'éviter certains gaspillages en encourageant les bonnes pratiques ou encore de donner une bouffée d'oxygène à la Sécu (relèvement du plafond du découvert autorisé de 12,5 à 15 milliards d'euros). Quelques surprises ne sont pas à exclure. " C'est la transition qui continue ", ironise un député de la majorité. Le PS, de son côté, a pris date. " La situation est extrêmement grave, prévient François Hollande sur LCI. Il faut que l'on sache ce qui sera demandé aux professions de santé, ce qui sera demandé aux assurés sociaux et aussi à l'ensemble de la société. " Réponses attendues dans un an.

 

Cyrille DUPUIS

 

 

La CFDT pourrait quitter la présidence de la CNAM si...

 

Pour la première fois, François Chérèque a évoqué explicitement l'hypothèse d'un départ de la CFDT de la présidence de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) si le gouvernement " ne s'engage pas dans une vraie réforme ". Inquiet du discours de plus en plus timide du gouvernement, le leader de la CFDT exige la clarification des responsabilités de l'Etat et des partenaires sociaux dans la gestion de l'assurance-maladie. Et des décisions en ce sens avant la fin de l'année. Faute de quoi, la CFDT ne serait plus " totalement légitime " pour demeurer à la tête de la caisse. " Nous, on n'est pas traumatisés par les réformes, apparemment, il y en a qui le sont ", ironise François Chérèque.

 

 

 

 

 

Le Monde du 4 septembre

La "modernisation" de la "Sécu" est reportée à l'automne 2004

Une cellule de réflexion est chargée d'établir un diagnostic d'ici à novembre

 

Le gouvernement achève la rédaction du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), qui doit être présenté au conseil des ministres du 8 octobre. Et c'est peu dire que ce "budget" social est difficile à boucler, tant la situation du régime général est alarmante - 10 milliards d'euros de déficit en 2003 - et tant l'homme chargé de ce dossier, Jean-François Mattei, apparaît politiquement affaibli par la catastrophe sanitaire de l'été.

 

En recevant successivement, mardi, François Chérèque (CFDT), Marc Blondel (FO) et Bernard Thibault (CGT), le ministre de la santé a confirmé à ses interlocuteurs syndicaux que la "modernisation" de l'assurance-maladie - le terme de réforme n'étant plus d'actualité - était reportée à l'automne 2004. Il a annoncé la création d'une sorte de haut conseil de l'assurance- maladie chargé, comme le COR l'a fait pour les retraites, de dresser un diagnostic d'ici à novembre. Une tâche impossible à mener en si peu de temps, a fait remarquer la CGT.

 

Echaudé par les mois de contestation qui ont accompagné le débat sur les retraites, Matignon avait tranché, au début de l'été, en faveur du report à l'automne 2004 de sa deuxième grande réforme sociale. Officiellement pour laisser toute sa place à la concertation. Officieusement pour franchir, sans encombre, un premier semestre 2004 riche en élections. Les événements de l'été n'ont pu que renforcer Jean-Pierre Raffarin dans ses convictions que la prudence politique commande d'attendre.

 

Mais la situation financière de la Sécurité sociale, elle, ne le permet guère. Entre la progression des dépenses (autour de 6-7 %), la révision à la baisse de la croissance et de mauvaises rentrées de cotisations - la masse salariale du secteur privé n'ayant augmenté que de 2,8 % au lieu des 4,1 % prévus -, l'année 2003 va renouer avec des niveaux de déficit jamais vus depuis la récession de 1993. La commission des comptes de la Sécurité sociale tablait, en mai, sur une sensible détérioration des comptes (- 7,9 milliards d'euros). Elle se réunira au cours de la troisième semaine de septembre et annoncera, finalement, un déficit de 10 milliards d'euros.

 

La trésorerie du régime général est si mal en point que les pouvoirs publics ont décidé de relever de 12,5 milliards à 15 milliards le plafond des avances que la Caisse des dépôts peut faire à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss). Sans ce nouveau relèvement, la Sécurité sociale aurait eu, en fin d'année, les plus grandes difficultés à rembourser les assurés sociaux...

 

En 2004, le ralentissement persistant de l'économie ne permet pas d'espérer un redressement rapide de la situation. De plus, la branche maladie et l'assurance-vieillesse, jusqu'alors excédentaires, verront, l'an prochain, leurs excédents fondre comme neige au soleil. Avec une assurance-maladie lourdement déficitaire, il sera quasiment impossible de revenir à l'équilibre.

 

Le gouvernement, qui avait déjà affiché, en septembre 2002, des comptes en déficit, doit décider dans les prochains jours s'il retient dans le PLFSS 2004 une stabilisation du déficit autour de 10 milliards ou s'il le laisse filer au-delà. Bien que les ultimes arbitrages ne soient pas encore rendus, la première des solutions, qui consiste à contenir le déficit au niveau record de 2003, semble avoir les faveurs de Matignon. Pour ce faire, le gouvernement devra trouver de nouvelles recettes ou emprunter. A moins qu'il ne se résolve à adopter des mesures d'économie draconienne, une hypothèse aujourd'hui peu probable.

 

Officiellement désireux de ne pas compromettre par des mesures de financement ponctuelles les chances d'une réforme plus structurelle de l'assurance-maladie, le gouvernement paraît s'orienter vers un PLFSS a minima, qui comporterait des mesures classiques comme la hausse du tabac et de l'alcool. En revanche, l'idée de faire payer à chaque assuré 50 centimes d'euro par boîte de médicaments ou par feuille de soins paraît écartée, le gouvernement n'ayant pas l'intention d'accabler les personnes âgées, qui sont de gros consommateurs de médicaments.

 

Hostile à l'augmentation de la contribution sociale généralisée - un point de CSG rapporte quelque 9 milliards en année pleine -, le gouvernement n'a guère d'autre choix que de se tourner vers la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) ou vers l'emprunt. En attendant le train de mesures draconiennes qui devront être prises après les élections de 2004.

 

Claire Guélaud

 

 

La réforme de la Sécu se perd en cogitations

Jean-François Mattei annonce la création d'une "instance" de réflexion.

Par François WENZ-DUMAS Libération, mercredi 03 septembre 2003

 

"Il n'y aura pas de réforme de l'assurance maladie", avait affirmé Jacques Chirac lors de son intervention du 14 juillet. En annonçant hier aux dirigeants des trois principales organisations syndicales qu'il recevait l'un après l'autre ­ François Chérèque (CFDT), Marc Blondel (FO) et Bernard Thibault (CGT) ­ qu'il allait créer une "instance" de réflexion chargée d'établir un diagnostic sur la Sécurité sociale, le ministre de la Santé, Jean-François Mattei, semble suivre à la lettre l'injonction du président de la République.

 

Car la première conséquence de la création de cette nouvelle instance de réflexion, qui devrait, selon François Chérèque, être mise en place "dans les jours qui viennent", est en effet de repousser d'au moins un an toute réforme de fond de l'assurance maladie.

 

Comme Jospin. En attendant, le gouvernement pourra se contenter de simples mesures d'"adaptation", selon l'expression du chef de l'Etat. Les travaux de ce conclave devraient durer plusieurs mois. Et une réforme ne pourrait donc pas être lancée avant la conclusion du budget 2005 de la Sécurité sociale, lequel sera voté fin 2004 par le Parlement.

 

A bien des égards, la méthode Mattei ressemble donc à celle employée par Lionel Jospin sur la réforme des retraites. Après avoir demandé au délégué général au Plan de l'époque, Jean-Michel Charpin, de réaliser un rapport, le Premier ministre socialiste avait créé en mai 2000 le COR (Conseil d'orientation des retraites) pour établir... un diagnostic. Résultat : cinq ans après son arrivée à Matignon, la réforme des retraites n'était toujours pas engagée.

 

Le problème avec l'assurance maladie, c'est qu'à la différence des retraites le besoin de financement est immédiat. En attendant que la nouvelle instance de cogitation rende son verdict, les organismes de Sécurité sociale devront trouver, au minimum, 7,9 milliards d'euros (selon les prévisions du printemps de la Commission des comptes), voire plutôt 10 à 12 milliards si l'emploi continue à fléchir, et avec lui les rentrées de cotisations sociales. Jamais, depuis 1995, le trou de la Sécu n'a atteint un tel niveau.

 

Plafond relevé. Pour faire face à ses dépenses, la Sécurité sociale en est donc réduite à demander à son banquier des facilités de trésorerie supplémentaires, à hauteur de 2,5 milliards d'euros. Le gouvernement prépare un décret autorisant l'Accos, qui centralise les cotisations sociales et les redistribue aux organismes de Sécurité sociale, à relever de 12,5 à 15 milliards d'euros le plafond du découvert autorisé. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale voté à l'automne 2002 avait déjà porté ce plafond de 4,4 à 12,5 milliards d'euros.

 

Mais le gouvernement ne pourra pas éternellement recourir à cet expédient. Quel que soit le diagnostic du futur conseil d'orientation de la Sécurité sociale, il lui faudra trancher : augmenter les cotisations ou réduire des prestations.

 

Aucune mesure concrète à l'issue d'une réunion entre trois ministres et quarante participants. Pas d'urgence pour les vieux

Par Eric FAVEREAU mercredi 03 septembre 2003

 

 

"Cela fait vingt ans que l'on essaie de mobiliser sur une prise en charge décente des personnes très âgées. Alors quelques jours de plus..." Un responsable de la fédération hospitalière

 

Des dalles mortuaires provisoires au cimetière de Pantin, en Seine-St-Denis (93), le 15 août dernier, en pleine vague de chaleur. Une soixantaine de victimes parisiennes de la canicule dont les corps n'ont pas été réclamés par leurs proches seront inhumées mercredi au cimetière de Thiais, dans le Val-de-Marne (94).

© REUTERS

 

Du monde, beaucoup de monde. Puis de grandes déclarations de principe. Mais, finalement, rien de précis. La réunion de préparation du plan interministériel "vieillissement et solidarité" qui s'est tenue pendant plus de deux heures, hier après-midi au ministère des Affaires sociales, a eu beau réunir trois ministres et plus d'une quarantaine de participants (1), aucune mesure ni orientation n'a été rendue publique. Ni même évoquée. Juste l'annonce de la constitution de six groupes de travail. Et le rappel que ce plan sera présenté par le Premier ministre le 1er octobre.

 

Plan. "Les mesures d'urgence après l'annonce des 11 000 morts dus à la canicule ? On les attend toujours", notait pourtant avant de participer à la rencontre Pascal Champvert, président de l'Association des directeurs d'établissements d'hébergement pour personnes âgées (Adehpa). Ajoutant : "Quand il y a une catastrophe dans l'agriculture française, on n'attend pas le résultat des groupes de travail. Immédiatement sont débloqués 500 millions d'euros." Il n'empêche, pour lui comme pour les autres participants, ce plan vaut bien encore quelques semaines d'attente. "Cela fait vingt ans que l'on essaie de mobiliser sur une prise en charge décente des personnes très âgées. Alors quelques jours de plus...", résumait ainsi un responsable de la branche vieillesse de la Fédération hospitalière de France.

 

Instruction. En ouvrant la réunion ­ qui faisait suite à celle tenue une semaine auparavant autour du Premier ministre ­, le ministre des Affaires sociales, François Fillon, a d'abord rappelé sa priorité : "Au retard dans l'alerte du mois d'août ne doit pas s'ajouter un retard dans l'après-crise. Nous avons le devoir d'organiser ensemble ce retour progressif. Les préfets et les départements sont aujourd'hui mobilisés pour assurer le retour à domicile des personnes âgées, affaiblies par la canicule et encore hospitalisées", a-t-il déclaré. Précisant qu'une instruction a déjà été "envoyée aux préfets leur demandant de prendre les dispositions nécessaires sur le plan organisationnel et financier pour favoriser dans les meilleures conditions possibles les sorties d'hôpital. Les crédits nécessaires seront mobilisés sans attendre le plan d'ensemble".

 

Six groupes. Puis le ministre a annoncé la création de six groupes de travail. Aux thèmes assez classiques. Le premier portera sur "l'amélioration de la prévention et l'élaboration et la mise en oeuvre d'un dispositif de veille et d'alerte". Un autre sur l'offre et la qualité de l'hébergement collectif. Un sur la vie à domicile, un quatrième sur la prise en charge sanitaire des personnes âgées, un cinquième sur la gestion des ressources humaines. Et enfin le dernier groupe, le plus important, portera sur les questions de financement. Mais là encore on reste dans le vague : dans les propos de François Fillon, la création d'un cinquième risque (à côté des quatre autres déjà couverts par la Sécurité sociale : maladie, vieillesse, famille, accidents du travail-maladies professionnelles) ou la suppression d'un jour férié sont à étudier, mais sans plus de précision.

 

"Tout cela est très classique. On est sur l'expectative", résumait, hier, le délégué général du Syndicat des maisons de retraites privées (Synerpa), Luc Broussy. "On se refuse à faire encore un procès d'intention. On travaille avec le gouvernement en espérant qu'il n'y a pas un scénario écrit d'avance que l'on ignorerait." Pascal Champvert, lui aussi, se disait dubitatif : "On attend la déclinaison concrète. Ce n'est qu'à l'aune des crédits débloqués que l'on verra la volonté du gouvernement. Les mesures, on les connaît. Il y a une centaine de projets. Tout est prêt. L'urgence, c'est le financement.". E.F.

 

(1) Etaient présents, hier, les responsables des maisons de retraite et du secteur de l'aide à domicile, le monde hospitalier, des associations de personnes âgées, la Croix-Rouge, des syndicats infirmiers et de médecins libéraux, et les grandes directions des ministères impliqués.

 

 

Personnes âgées : les professionnels prient l'Etat de "respecter sa parole"

Claire Guélaud

 

"où en est-on des mesures d'urgence ?" Plus de quinze jours après la catastrophe sanitaire de la première quinzaine d'août, qui a fait plusieurs milliers de victimes chez les personnes âgées, les professionnels du secteur médico-social et de l'aide à domicile s'étonnent qu'aucune disposition particulière n'ait été prise par le gouvernement, alors que 500 millions d'euros ont été débloqués pour les agriculteurs victimes de la sécheresse. Ils entendaient le faire savoir, mardi 2 septembre, lors d'une première séance de travail organisée au ministère des affaires sociales.

 

François Fillon, ministre de tutelle du secrétaire d'Etat aux personnes âgées, Hubert Falco, devait, à cette occasion, sortir du silence qu'il a observé pendant la canicule. Quant au ministre de la santé, Jean-François Mattei, il ouvrait, le même jour, une série d'entretiens avec les partenaires sociaux sur la prise en charge des personnes âgées, en recevant successivement François Chérèque (CFDT), Marc Blondel (FO) et Bernard Thibault (CGT).

 

La concertation qui s'engage doit durer un mois. Elle portera sur différents thèmes (l'aide à domicile, les dispositifs d'alerte, l'offre d'hébergement, etc.) et elle est censée aboutir à un ensemble de propositions que Jacques Chirac pourrait reprendre à son compte le 1er octobre, lors d'une conférence sur le vieillissement et la solidarité. Lundi, le chef de l'Etat a reçu le professeur Françoise Forette, gériatre et directrice de la Fondation nationale de gérontologie.

 

C'est sur le terrain du budget que les représentants des maisons de retraite et des services d'aide à domicile devaient d'abord insister. Et pour cause : MM. Fillon et Mattei n'ont pas inscrit dans le "budget" de la Sécurité sociale les 183 millions d'euros de crédits destinés à la prise en charge des personnes âgées, qui auraient dû l'être au titre du plan quinquennal lancé en 2000 par le gouvernement Jospin.

 

MODERNISER LES MAISONS DE RETRAITE

 

"L'Etat doit respecter sa parole, quelles que soient les alternances politiques, pointe Luc Broussy, délégué général du Synerpa. Dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale -PLFSS- pour 2003, il n'y avait, à l'origine, aucune mesure nouvelle pour les personnes âgées en établissement. Après une première journée de mobilisation des professionnels, le 18 mars 2003, Hubert Falco a obtenu le déblocage de 80 millions d'euros. Mais 50 ont été pris sur les crédits de l'aide à domicile. Du point de vue de la prise en charge globale des personnes dépendantes, tout cela n'avait guère de sens."

 

Souvent agacés par le discours "culpabilisant" qui, estiment-ils, a été tenu sur les familles et irrités par le silence des présidents de conseils généraux, qui financent en partie l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), les professionnels entendaient rappeler à l'Etat ses responsabilités. Et exiger, au titre de l'urgence, le déblocage de 100 millions d'euros de crédits supplémentaires. Quant à la mise au point d'un nouveau plan pluriannuel, elle doit permettre, à leurs yeux, de moderniser les maisons de retraite et de recruter des personnels en nombre, aujourd'hui, cruellement limité. "Nous estimons à 2 milliards d'euros sur cinq ans les crédits nécessaires pour embaucher quelque 50 000 infirmières et aides-soignantes. C'est la condition nécessaire pour que la France rattrape son retard sur l'Allemagne et sur l'Angleterre", précise Gérard Vincent, directeur général de la Fédération hospitalière de France (FHF), qui regroupe 280 000 lits de long séjour sur les 680 000 existant en France.

 

Chez les professionnels, l'idée de faire de la dépendance un cinquième risque assuré par la Sécurité sociale - après la maladie, les accidents du travail, la famille et la vieillesse - est accueillie avec un intérêt prudent. Le projet n'est pas nouveau - le gouvernement de Jacques Chirac en 1987 et celui de Pierre Bérégovoy en 1992 y avaient travaillé -, et il coûterait entre 10 et 24 milliards d'euros.

 

 

Les raisons de la colère

Par Sandrine CABUT

vendredi 29 août 2003

 

Denise (1), 81 ans, Paris XXe

"Mon APA a été sabrée de 350 euros, sans explication"

 

"Quand j'ai eu l'APA (allocation personnalisée d'autonomie, ndlr), il y a deux ans, ç'a été une explosion de joie. Je n'avais pour vivre que 1200 euros mensuels, la pension de réversion de mon mari, et je ne voulais pas être assistée par mes enfants. Avec 600 euros en plus chaque mois, j'ai pu payer une auxiliaire de vie. Elle m'aidait pour le ménage, les courses, la cuisine. Et, surtout, c'était une sécurité et une compagnie. Il y a quelques mois, mon APA a été sabrée brutalement de 350 euros, sans aucune explication. J'ai seulement compris, en entendant à la radio, que le gouvernement allait réduire les aides.

 

"J'ai dû arrêter l'aide à domicile. Maintenant, je cherche une maison de retraite, car sans APA je ne peux plus rester chez moi. Je suis autonome mais, à 81 ans, je vais vers des années de fatigue et de grande vieillesse ; je dois prévoir un autre mode de vie. Le problème, c'est que c'est hors de prix. Ça m'est égal de vieillir dans un fauteuil Louis XV, je n'ai pas besoin de luxe d'apparence mais juste d'être bien. La diminution de l'APA, c'est très violent et honteux. On se moque des personnes âgées. Ce gouvernement qui a besoin d'argent tape sur le social et la culture, parce que ce sont deux choses dont la droite considère que le peuple n'a pas besoin. Enlever un jour férié, je ne suis pas contre, mais c'est encore pénaliser les petites gens."

 

(1) Son prénom a été changé.

 

- Michel C., 64 ans, Charente

 

"Cette aide me coûte plus cher qu'elle ne me rapporte"

 

"La réalité, c'est qu'avec l'APA je paie 3 938 euros de plus par an à l'institution où vit ma femme ! Elle est atteinte d'une maladie d'Alzheimer depuis dix ans, et j'ai dû la placer il y a trois ans. Quand j'ai entendu parler de l'APA début 2002, on m'a dit que, compte tenu de mes revenus élevés, je n'y avais pas droit. L'institution me coûte plus de 25 000 euros par an, mais il est vrai que je n'ai pas de problèmes financiers : j'avais une entreprise que j'ai revendue pour m'occuper de mon épouse, et je touche une bonne retraite de cadre.

 

"En février 2002, j'ai eu la mauvaise surprise de constater une augmentation de 17 % sur la facture. La directrice m'a dit qu'elle serait compensée par l'APA, que j'obtiendrai. J'ai fait une demande au conseil général, car entre-temps on m'avait expliqué que cette allocation ne dépendait pas du niveau de ressources. Après des mois d'errance du dossier, notamment pour des problèmes de changement de département, j'ai enfin reçu la notification nous accordant l'APA pour deux ans en janvier 2003. Le problème, c'est que son montant ne compense même pas l'augmentation du prix de journée. Je ne suis pas seul dans ce cas, j'ai rencontré d'autres personnes à qui l'APA coûtait plus cher qu'elle ne rapportait. Ce n'est pas pour me plaindre, l'important est que ma femme soit bien prise en charge, mais c'est vrai que ce n'est pas logique, et, à force, je pompe dans mes économies".

 

 

Guillaume Sarkozy, chef d'entreprise et numéro 3 du Medef:

"Supprimer un jour férié pour les personnes âgées a quelque chose de romantique"

Par François WENZ-DUMAS, Libération, vendredi 29 août 2003

 

 

S'il est une catégorie enthousiaste à l'idée de supprimer un jour férié, c'est bien celle des patrons. Depuis que l'idée a été lancée mardi par Raffarin, lors d'une réunion avec des professionnels s'occupant du troisième âge, ils ne tarissent plus d'éloges sur cette "formidable" initiative qui, selon l'OFCE, pourrait rapporter 1,8 milliard d'euro par an. Et tant pis si, comme le craint l'Observatoire français des conjonctures économiques, l'idée conduit à la suppression de 30 000 emplois - 100 000 en cas de baisse de production -, le patronat est euphorique. A l'exemple de Guillaume Sarkozy, frère du ministre de l'Intérieur, président des Tissages de Picardie et vice-président du Medef, principale organisation patronale.

 

Si l'on supprimait un jour férié, quelles en seraient pour vous les conséquences ?

 

Je ne suis pas dans le secret des projets gouvernementaux. Mais nous pouvons dans les entreprises y réfléchir assez simplement. On compte dans une année en moyenne 220 jours de production. Si on supprime un jour férié, cela signifie que l'on en aura 221, c'est-à-dire une augmentation de 0,5 % de notre capacité de production. Ce n'est pas grand-chose, mais, quand on a mis en place les 35 heures, on avait bien perçu les conséquences de la diminution de cette capacité sur la réduction de nos marges. Si on l'augmente, je peux amortir un peu mieux mes coûts fixes.

 

L'effet risque d'être marginal, surtout si ce gain de productivité sert à financer une contribution sociale pour le troisième âge...

 

A quoi cela doit servir, ce n'est pas à nous, entrepreneurs, de le dire. Ce que nous constatons, c'est qu'il y a, dans l'idée de supprimer un jour férié pour financer la solidarité, quelque chose de plus ou moins romantique qui nous plaît. Parce qu'elle montre que l'on peut obtenir plus en travaillant plus. Pendant trop longtemps, on a entretenu l'illusion qu'on pouvait travailler moins et obtenir davantage. Cette démarche redonne sa noblesse au travail.

 

N'avez-vous pas aussi un peu l'arrière-pensée d'ouvrir une brèche dans les 35 heures ?

 

Cela n'a rien à voir. Il ne faut pas se leurrer sur l'impact des 35 heures : leur effet a été de généraliser les heures supplémentaires. Je le constate dans notre entreprise : en juillet, pour assurer la production, il a fallu y recourir massivement. Résultat : la marge a été nulle alors que l'on travaillait davantage. Autre effet des 35 heures, elles ont entraîné une hausse du smic qui a brouillé l'échelle des rémunérations dans une branche comme la nôtre, le textile. La suppression d'un jour férié ne changerait rien à cet état de fait. Si l'idée nous paraît intéressante, c'est vraiment parce qu'elle crée un lien entre travail et progrès social.

 

Quel jour férié vous semble le plus opportun de supprimer ? Le 8 Mai ? Un des deux lundis de Pâques ou de Pentecôte ?

C'est vraiment au gouvernement d'y réfléchir et de choisir. Encore une fois, pour nous, chefs d'entreprise, le plus important est le signal donné : il faut travailler un peu plus pour donner quelque chose.

 

Sécu : face au gouffre, le gouvernement refuse la thérapie de choc

Cyrille DUPUIS du 03/09/2003

 

 

Dans quinze jours, la commission des comptes de la Sécurité sociale présentera officiellement à Jean-François Mattei les prévisions des déficits du régime général pour 2003 et 2004. La situation, qui s'est encore dégradée, s'annonce catastrophique. Un " trou " de 10 milliards d'euros est attendu cette année, qui pourrait approcher 15 milliards l'an prochain. Le ministre de la Santé, qui reçoit les partenaires sociaux, cherche des mesures de financement et d'économie. Mais le PLFSS 2004 ne fera, semble-t-il, que poser des jalons.

 

Jean-François Mattei ne pouvait rêver pire rentrée. Alors que la crise sanitaire provoquée par la canicule n'a pas fini de faire des vagues, le ministre de la Santé ne se fait plus aucune illusion sur ce qui l'attend sur un autre dossier dont il a directement la charge : les comptes de la Sécu. A la lecture du rapport traditionnel que la commission des comptes lui remettra officiellement mercredi 17 septembre, Jean-François Mattei risque d'avoir le tournis. Selon " Les Echos " du 1er septembre, le régime général accuserait des déficits record, au-delà des projections les plus sombres : une dizaine de milliards d'euros pour 2003 (les dernières estimations, datant de mai, faisaient état de 7,9 milliards) et, si rien n'est fait, une quinzaine de milliards d'euros l'année prochaine. Certes, la commission des comptes avait anticipé au printemps dernier " le creusement du régime général ", mais la profondeur du gouffre peut surprendre. " Pour 2003, cette dégradation de deux milliards d'euros ne me semble pas impossible car l'activité a été plus faible que prévu, analyse François Goulard, député UMP du Morbihan. En revanche, je ne crois pas du tout qu'on atteindra 15 milliards en 2004 car l'économie risque de rebondir. "

 

Un PLFSS " prudent, trop prudent "

Reste que le gouvernement ne peut ignorer cette pente dangereuse. Excluant toujours l'augmentation de la CSG, qui n'est " pas à l'ordre du jour ", il va devoir trouver rapidement d'autres recettes mais surtout tenter d'infléchir enfin la croissance des dépenses de santé, qui se poursuit au rythme annuel de 6,5 %. " Soyons clairs : pour l'instant, rien n'a été fait de sérieux pour diminuer les dépenses ! ", analyse sèchement un député de la majorité qui conseille au gouvernement de regarder " ce qui vient d'être fait par les Allemands " (voir ci-dessous). Parmi les pistes avancées avant l'été figurait notamment une mise à contribution financière des assurés par le biais d'un forfait de 0,5 à 1 euro par feuille de soins ou par boîte de médicament. Mais le gouvernement aurait renoncé à toute thérapie de choc, préférant toujours réformer le système à dose filée, d'ici à 2005, comme Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin l'ont laissé entendre avant l'été. " On s'achemine vers un PLFSS 2004 prudent, trop prudent...(projet de loi de financement de la Sécurité sociale) ", confirme un bon connaisseur du dossier. Dans cette hypothèse, la mise en place d'un nouveau ticket modérateur d'ordre public ne serait évidemment pas retenue. Dans l'entourage du gouvernement, on insiste sur l'impréparation de l'opinion et la difficulté de trouver sur ce sujet un consensus. " Je vois mal s'appliquer en France les mesures draconiennes prises en Allemagne ", constate un parlementaire proche de Jean-François Mattei. L'année dernière, le ministre de la Santé avait déjà défendu un " PLFSS de transition ". L'histoire pourrait donc bien se réécrire.

 

Un an pour installer la maîtrise médicalisée

A l'heure des derniers arbitrages, Jean-François Mattei a en tout cas une occasion rêvée de prendre le pouls de l'opinion. Depuis hier, il consulte méthodiquement les responsables des organisations syndicales dans le cadre de la modernisation du système de protection sociale. L'hypothèse de la création d'une branche spécifique de la Sécurité sociale consacrée à la dépendance a été évoquée. Après la CFDT, FO et la CGT, le ministre de la Santé reçoit aujourd'hui notamment le Dr Jacques Reignault, président du Centre national des professions de santé (CNPS), et Jean-Pierre Davant, président de la Mutualité française. Nul doute que l'un et l'autre rappelleront au ministre les exigences respectives des professionnels de santé libéraux et des assurés sociaux. Les efforts devront être équitablement répartis. " Si on ne traîne pas, nous pouvons nous engager à mettre en place les outils de la maîtrise médicalisée dans les douze mois, comme l'a demandé le président de la République ", affirme le Dr Reignault, au nom du CNPS. " Mais, prévient-il aussitôt, il faudra alors ouvrir aussi le débat sur le panier de soins, sur les choix en matière de prise en charge : or, après les retraites, il semble que le gouvernement hésite à lancer deux grandes réformes dans la même année. " La préparation du nouveau budget de la Sécu s'apparente à une équation insoluble. La réalité de la situation comptable exige à l'évidence, au-delà des traditionnelles recettes de poche ou du transfert de la dette sur les générations futures, un plan de grande envergure, dont le gouvernement hésite toujours à poser la première pierre.

 

Réforme : quand l'Allemagne montre l'exemple

 

La situation de l'assurance-maladie et plus largement de la Sécurité sociale va-t-elle permettre une trêve politique en France et être à l'origine d'une entente cordiale, le temps d'une réforme, entre la majorité et l'opposition, entre le gouvernement et les principaux leaders de l'opposition ?

 

Certains le souhaitent dans les divers camps, aussi bien notamment à l'UMP qu'au Parti socialiste, les deux principaux partis politiques. On en est cependant encore loin, très loin. On n'est pas en Allemagne où une telle union autour de la réforme de la Sécurité sociale est devenue réalité.

Outre-Rhin, en effet (voir notamment le " Quotidien " des 25 juin et 24 juillet 2003), le chancelier social-démocrate Gerhard Schröder et l'opposition chrétienne démocrate (CDU-CSU) ont décidé, devant la dégradation des comptes de l'assurance-maladie, de ne faire ni surenchère ni démagogie politique et, au contraire, d'essayer de s'entendre autour d'une réforme qui permettrait de sauver le système. Un premier compromis a été obtenu en juillet qui permettait alors, selon la ministre sociale-démocrate de la Santé, Ulla Schmidt, de continuer " à assurer la continuité des soins ", tout " en cassant des structures encroûtées ".

Ce compromis doit permettre d'économiser 9,9 milliards d'euros dès l'an prochain, pour atteindre progressivement, d'ici à 2006/2007, quelque 23 milliards d'euros. Mais l'accord n'était pas complètement acquis.

Des voix s'étaient élevées, notamment au sein du SPD, pour critiquer ce compromis jugé trop coûteux pour les patients qui devraient devoir mettre davantage la main à la poche.

L'accord définitif entre les deux camp est intervenu il y a seulement quelques jours, le 22 août, après une nuit de négociation entre majorité et opposition.

" Toutes les questions ont été réglées ", a alors assuré la ministre sociale-démocrate à l'issue de près de treize heures de négociations-marathon avec le responsable des négociations pour l'opposition CDU-CSU, Horst Seehofer, ancien ministre de la Santé du gouvernement Kohl.

A l'issue de ces nouvelles discussions, quelques modifications ont été apportées au compromis élaboré fin juillet.

Les indemnités journalières, versées à partir de la septième semaine de congé maladie, seront financées uniquement par les salariés dès le 1er janvier 2006 et non en 2007 comme initialement prévu.

Les deux parties se sont également mises d'accord sur les modalités de couverture des prothèses dentaires.

Le projet prévoit que leur remboursement ne soit plus couvert par le régime général à partir de 2005 mais par une assurance complémentaire qui pourra être soit publique, soit privée.

Pour les assurés du système public (90 % des personnes couvertes), une cotisation supplémentaire sera mise en place afin, selon Horst Seehofer, " d'assurer une concurrence équitable " entre public et privé.

Le projet de loi, qui prévoit aussi de diminuer les cotisations d'assurance-maladie de 14,4 % du salaire brut à 13,6 % en 2004 et 12,15 % en 2006, doit être examiné par le Bundestag, la chambre des députés, dans la deuxième semaine de septembre. Son entrée en vigueur est prévue pour le début de 2004.

Certes, il faut reconnaître que ce compromis était indispensable au gouvernement, dans la mesure où l'opposition est majoritaire à la chambre haute du Parlement, le Bundesrat. Il n'en reste pas moins que chaque partenaire a discuté avec la volonté d'aboutir à une réforme qui permette de sauver le système de protection sociale. Sans doute, un exemple pour le monde politique français.

 

J. D

du 03/09/2003

 

 

Le PS pour un " panier de soins " fondé sur l'utilité médicale

 

A l'université d'été du Parti socialiste, à La Rochelle, un certain nombre de responsables politiques se sont exprimés sur le volumineux dossier de la santé avec deux thèmes principaux : les solutions à apporter au déficit chronique de l'assurance-maladie et la gestion de la catastrophe sanitaire par le gouvernement actuel.

 

Tout d'abord, un constat partagé tout à la fois par Claude Pigement, délégué national du PS à la Santé, et Claude Evin, ancien ministre de la Santé : à la lumière du déficit annoncé de l'assurance-maladie, estimé par Claude Pigement à 30 milliards d'euros sur trois ans, (la réalité pourrait encore être plus cruelle), la preuve est aujourd'hui faite que " le système a montré ses carences et ses limites ", et qu'" il ne faut plus avoir peur de le bousculer ". Et même si Claude Evin reconnaît qu'en la matière les socialistes n'ont pas toujours fait preuve de l'audace à laquelle ils appellent aujourd'hui, il est temps, en matière de panier de soins, " d'abandonner la vision comptable et de mettre sur pied un panier de soins fondé sur l'utilité médicale ", seul moyen selon eux, d'aboutir à " une maîtrise médicalisée des dépenses de santé ".

Reste à savoir si la redéfinition du " panier de soins " suffirait à rééquilibrer les comptes de l'assurance-maladie. Le PS propose donc d'autres pistes de réflexion : tout d'abord, établir " les bases d'un contrat de droit et de devoir entre l'Etat et les professionnels de santé " ; mais il faudra bien aussi trouver de nouveaux financements et, toujours selon Claude Pigement, il sera difficile à l'actuelle majorité d'augmenter la cotisation sociale généralisée (CSG) ou d'allonger la durée de la CRDS (cotisation pour le remboursement de la dette sociale créée par Alain Juppé) ; de plus, le gouvernement ayant " les mains liées par toutes ses promesses de baisse des impôts ", il conviendrait, pour rééquilibrer les comptes, de " mettre en place une vraie politique de l'emploi qui seule permettra un financement pérenne de l'assurance-maladie, ainsi qu'une politique de réduction des gaspillages ".

 

Carence politique et administrative

 

A La Rochelle, il a aussi été question de la catastrophe sanitaire liée à la canicule, l'occasion pour Paulette Guinchard-Kunstler, ancienne secrétaire d'Etat de Lionel Jospin aux Personnes âgées de se montrer très critique envers François Fillon " qui n'est pas apparu dans la crise ". Paulette Guinchard-Kunstler souligna qu'il était bien commode pour le gouvernement de culpabiliser les familles plutôt que de remettre en cause ses méthodes de gestion de la crise et regretta le gel par l'actuel gouvernement d'un budget de 183 millions d'euros pour les maisons de retraite. Quant à Claude Pigement, il a répété que la politique du bouc émissaire n'était certes pas la bonne mais qu'il fallait reconnaître qu'il y avait eu " carence politique et administrative ". Le délégué national du PS à la Santé a posé deux questions à l'attention du gouvernement : " Pourquoi y a-t-il eu tant de morts alors que d'autres pays européens ont connu des températures identiques sinon plus élevées ? Le meilleur système de santé au monde a-t-il ou non failli ? ". Et de dénoncer pêle-mêle l'abandon de la maîtrise médicalisée des dépenses, la baisse du taux de remboursement de 617 médicaments utiles aux Français, la tentative du gouvernement de réduire l'aide médicale d'Etat et, enfin, les inégalités sociales françaises devant les questions de santé : " Selon le milieu social dont ils sont issus et la région où ils vivent, les Français peuvent voir leur espérance de vie varier de plus ou moins neuf ans ", a-t-il conclu.

 

De notre envoyé spécial, Henri de SAINT ROMAN